22/ Douleur

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Mon bras me fit mal, lorsque Micker me prit contre lui, pour me relever comme il le pouvait.

Mon bras me fit mal, lorsque Micker essaya de récupérer son téléphone, pour contacter de l'aide.

Mon bras me fit mal, lorsque, dans la panique, il le fit tomber sur les cendres noires des arbustes.

Mon bras me fit mal, lorsque, en s'excusant, il le récupéra, alors que je luttais contre l'inconscience.

Mon bras me fit mal, lorsqu'il appela, j'ignorais qui, quelqu'un, quelqu'un qui, je l'entendis malgré la brûlure lancinante de mon bras, poussa un cri de frayeur.

 Mon bras me fit mal, lorsqu'il me soutint, me porta presque, pendant des mètres, pendant une minute, pendant un siècle, me murmurant de ne pas le laisser, de tenir bon, qu'ils arrivaient.

   Mon bras me faisait mal, et je voulais le dire, je voulais crier que je souffrais. Mais tout ce que je pus faire, fut d'articuler un murmure presque inaudible :

     - Mick...

     - Qu...a...

     - On a... ré..

     - Gar... forc...

     - On a réussi...

  Je m'écroulais, je m'échappais de la poigne de mon ami, et le contact dur et froid du sol envoya une décharge brûlante dans tout mon bras, d'une telle violence qu'elle me coupa le souffle, qu'elle arrêta le cri qui allait jaillir de ma gorge, de mon âme, avant même que je n'émette le moindre son.

  Je sentais quelque chose de mouillé, de liquide, couler sur mon visage. Je pensais une seconde que ces larmes s'étaient trompées, qu'elles ne devaient pas couler sur mon visage, mais sur la brûlure atroce qui rongeait mon bras. Peut-être pourraient-elles l'apaiser ? Mais non, c'était ridicule, comment, de si petites gouttes, auraient-pu réduire l'immense douleur, l'immense rage de la brûlure qui dévorait mon bras, qui dévorait mon âme ?

  Des points noirs valsaient devant mes yeux, mais j'aperçus quand même un homme, cet homme courir vers moi et me prendre dans ces bras, alors qu'une femme se précipitait à sa suite, un air d'épouvante contrastant fortement avec son habituel si beau visage.

  J'ignorais pourquoi, mais l'arrivée de cet homme, le contact de ces bras qui me soulevèrent, provoqua en moi comme une pointe d'émotion. Mais je ne savais pas pourquoi, je ne savais même pas ce que pouvait être cette minuscule chose, cette infime émotion, si petite, si seule perdue au milieu du déluge de douleur qui s'abattait, qui pulsait en moi.

  Puis...

Il me sembla que le temps s'arrêta.

  La douleur elle, ne cessait guère, je commençais même à douter qu'un monde sans elle soit possible, tant elle était immense, dévorante.

  Ma tête bascula en arrière, elle était lourde, si lourde, pleine, si pleine de toute cette douleur, elle faisait mal, si mal, et pourtant elle était si vide, incapable de quoi que ce soit.

  Je les vis, au ralenti, tomber un à un, ces flocons de feu, et ils me firent même esquisser un sourire.

  L'homme me regarda, lui aussi semblait éprouver une douleur, une si grande inquiétude en me regardant, que je voulus, à lui aussi, lui montrer, lui faire comprendre comme c'était beau, comme c'était merveilleux.

Le Jeu T1 : AloneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant