La rentrée

262 15 30
                                    

Arrivée devant le lycée, je regarde l'heure qu'il est, les portes n'ouvrent que dans dix minutes. J'ai réussi à arriver en avance, c'est presque un miracle étant donné le temps qu'il m'a fallu pour me préparer.
Pour ne pas me faire remarquer, je m'isole de la foule en lançant la playlist de Billie Eilish. Je ne suis pas totalement prête à affronter les potentielles réactions à mon égard après tout ce qu'il s'est passé. Certains pourraient éprouver de la haine alors que d'autres ressentiraient du dégoût ou même de la pitié mais, quoi qu'il en soit, plus ils seront loin de moi, mieux ça sera.

- Tiens, qui vois-je en train d'essayer de se cacher ? dit une voix que je ne connais que trop bien. Valentina ?
Je me retourne, irritée. Un sourire sarcastique s'est dessiné sur ses lèvres roses imbibées de gloss.
- Apparemment pas suffisamment puisque tu me vois.

Cette jolie rousse aux boucles parfaites et au maquillage de star est un peu le genre de peste qu'on adore détester. Autrement dit, la fille la plus populaire du lycée et également mon ancienne meilleure amie.
Elle se positionne devant moi suivie de ses deux pots de colle, Nina et Claire, deux sœurs jumelles tout droit sorties d'une série pour adolescents.
- Qu'est ce que tu fous ici toi ? 
- Je viens faire un tennis, ça me paraît évident non ? lui répondis-je d'un ton détaché.

Elle me fixe, une expression mesquine scotchée sur le visage.

- Oui, mais je te demande ce que tu viens faire ICI ! Tu aurais pu aller ailleurs après tout ce qu'il s'est passé ! Ce ne sont pas les lycées qui manquent dans cette région !

La sonnerie retentit, laissant peu de place à une sur-enchère de notre part.

- Allez les filles, on y va. Ce fut un plaisir de discuter avec toi Valentina, mais fais attention à toi car tu risques d'en baver cette année si tu restes ici, d'autant plus que tu redoubles et qu'il est fort probable qu'on se retrouve dans la même classe. Allez ciao !

Rosa me tourne le dos, suivie de sa petite tribu de pétasses allumées.
Ce n'est pas plus mal, si je commence à l'ouvrir maintenant, je n'ai pas fini. J'avais tellement de choses à lui dire, mais l'envie me manque. Je n'ai pas suffisamment l'énergie pour ça, je dois la mettre à profit pour des choses bien plus importantes. Pour l'heure, il me faut aller à la rencontre de la directrice avant de commencer les cours, pour régler deux trois détails. Forcément, plusieurs mois d'absence ne s'effacent pas en un clin d'œil.

Le bureau de madame Langlois est assez modeste, rien d'extraordinaire, un mobilier plutôt simple avec du bois comme matière dominante. Quant à la directrice, c'est une dame d'une cinquantaine d'années, plutôt mince et élégante. Elle est coiffée d'un carré plongeant de couleur rouge avec une mèche qui retombe impeccablement au dessus de ses lunettes. C'est fou d'avoir l'air cool et sévère en même temps.

- Mademoiselle De Luca, asseyez vous je vous prie. Comment allez vous ?

Elle me dévisage par dessus les lunettes, me jaugeant d'un air grave. Je détourne le regard tant le sien est perçant, débordant de jugements. Je décide toutefois de ne pas me démonter et replonge mes yeux dans les siens.

- Je vais bien, merci.

Bien entendu, c'est totalement faux, je vais mal, très mal. Je préférerais être chez moi, loin de cet endroit de malheur où tout peut arriver et où je me fais agresser avant même le début de l'année. Malheureusement, j'ai promis à ma mère d'obtenir mon bac pour continuer mes études par la suite. Certaines promesses devraient avoir l'option "peut être rompue en cas d'extrême urgence".

- Parfait. Je tenais à vous avertir que vous avez loupé énormément de cours, et que même en redoublant, ça ne sera pas simple. Vous devrez travailler plus dur que les autres pour obtenir votre diplôme, j'espère que vous en avez conscience ? Sans parler des raisons de votre... "absence".  Que cela ne se reproduise plus.

ValentinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant