Passé décomposé

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Deux ans plus tôt

Meredith

Je suis consciente que ma santé n'est pas optimale. Ma maladie est rare mais elle n'en est pas moins dangereuse pour autant.
Cependant, si j'avais écouté les médecins toute ma vie, Valentina n'existerait même pas. Je me suis toujours battue pour elle car je suis fière d'avoir pu la mettre au monde, elle est tout ce que j'ai de plus cher sur terre. Toutefois, elle n'a que seize ans, et je ne peux pas me permettre de partir maintenant. Elle a encore besoin de moi, même si je dois juste prendre des précautions, au cas où, mon corps en déciderait autrement.
Je suis assise dans le canapé, un plaid sur mes jambes, attendant la visite de mon amie. Je dois impérativement lui parler. Cela fait presque une heure que je l'ai appelé, elle ne devrait maintenant plus tarder. Au moment où je me penche sur le programme télévisé, l'interphone sonne. Je bondis pour aller répondre, aussi vite que mon cœur et mon souffle me le permettent. Une voix féminine et enjouée, que je ne connais que trop bien, prononce un doux "C'est moi". J'attends devant la porte que je commence à entrouvrir me faisant entendre des pas qui s'approchent, depuis le palier.
- Bonjour Olivia, ça me fait plaisir... de te voir, lui lâchais-je avec un grand sourire. Entres... je t'en prie.
- Bonjour ma chérie. J'ai fais au plus vite car ça avait l'air grave, que se passe t'il ?

Je l'invite à venir s'installer à table, en lui servant un café noir pour elle et un thé à la menthe pour moi. Je bois une gorgée pour me donner du courage, avant de lui expliquer les raisons de mon appel.
- Comme tu as pu le constater, mes problèmes de... respiration, sont de plus en plus... présent. J'essaye au maximum de... ne pas le montrer... mais comme tu t'en doutes... ma santé ne me laisse pas tranquille. Pendant plusieurs années j'ai pu vivre normalement... mais aujourd'hui, je sens que... je sens que quelque chose ne va pas... je manque d'air et je passe...  la plupart de mon temps à dormir... je ne peux même plus travailler. C'est à peine si ... c'est à peine si j'arrive à être là pour Tina. Mes aller-retours incessants à l'hôpital... m'épuisent de plus en plus et... j'ai besoin de toi...
- Bien-sûr, dis moi en quoi je peux t'aider ? Tu sais que je serais toujours là pour Valentina et toi, répondit-elle en prenant mes mains dans les siennes.
- Je le sais... et je te remercie pour tout ce que tu fais déjà...

Je reprends une gorgée tandis qu'elle m'imite.

- Voilà, je ne vais pas y aller par quatre chemins... je n'ai pas de famille à part toi. Je ne veux pas alerter... le père de Valentina, elle ne le connaît pas et ... bref, tu es la seule personne... à qui je pourrais confier ma fille... les yeux fermés, et c'est ce que je compte faire. J'ai commencé à me renseigner... tu pourrais être sa tutrice. Légalement, tu es sa marraine... et tu es la seule personne apte... à t'occuper d'elle. Enfin, si tu es d'accord... bien entendu.

Je prend une grande inspiration car j'ai dépassé mon temps de parole autorisé par mon corps, prise par l'émotion et l'importance de cette déclaration. De son côté Olivia me fixe, un air triste et soucieux se dessinant petit à petit sur son visage. Elle comprends où je veux en venir.

- Meredith je ne sais pas quoi dire, je n'arrive pas à croire qu'on ai cette conversation en réalité, avoua t-elle les larmes lui montant aux yeux.
- Olivia je t'en prie ! Quand tu deviens mère... ta plus grande peur est de partir... car tu sais que personne n'aimera ton enfant... comme toi tu l'aimes. Mais avec toi... ce poids sur mes épaules s'allège un peu... Excuse-moi... Mon souffle, toujours mon souffle... Je t'en supplie... j'ai besoin d'être sûre que tu pourras être là pour elle... physiquement et légalement j'entends. Je ne veux pas qu'elle se retrouve... dans un foyer pour adolescentes... ou je ne sais où.

Cette fois c'en est trop pour elle. Elle s'effondre, place sa tête entre ses mains, reprends ses esprits un instant et me regarde de ses yeux rougis. Mes yeux, commencent à s'humidifier également lorsque je réalise le poids de ce que je suis en train de lui demander.

- Bien-sûr, bien-sûr que je serais là. Comment veux-tu que l'on fasse ?

............................

Tina

- Valentina !

Ma voix préférée m'appelle, celle de Rosa. C'est une jeune fille grande et élancée avec de magnifiques cheveux bouclés roux qui lui tombent sur les épaules, et de très beaux yeux bleus. Elle et moi sommes amies depuis l'enfance, et nous avons été très souvent dans la même classe. Toutefois, nos chemins se sont séparés lorsque elle a redoublé sa troisième, ce qui nous a certes séparées une fois arrivées au lycée, mais seulement pendant les cours car à l'extérieur, nous nous retrouvions autant que possible.

- Hey, la plus belle. Assieds-toi vas-y, en lui montrant la place libre face à moi.
- Merci beaucoup. Alors, comment va Meredith ?
- Disons que, ça pourrait être pire. Les médecins ne se prononcent pas pour le moment, lui répondis-je en tripotant nerveusement mon ebly du bout de ma fourchette.
- Mais ils lui ont posé un pacemaker non ?
- Oui mais, elle est toujours aussi fatiguée. C'est pour ça qu'elle est à l'hôpital le plus clair de son temps d'ailleurs, sous surveillance quasi-constante.

Je sens mes yeux s'humidifier. Je préfère changer radicalement de sujet quitte à passer pour une bipolaire.

- Tu sais que Will n'a pas arrêté de me regarder et de me faire des sourires pendant la pause ce matin ? Je suis tellement fan de ses yeux et le blond de ses cheveux ... Il a un visage angélique.
- C'est vrai qu'il est craquant ! Jeremy n'est pas mal non plus. J'ai de la chance d'être dans la même classe qu'eux ! dit-elle en me taquinant gentiment.
- J'aurais peut être du redoubler moi aussi finalement... Dis moi, tu penses que tu pourrais... Enfin...
- N'en dis pas plus, je lui parlerais pour en savoir plus !
- Tu es vraiment parfaite !
- Je le sais, me répond-elle d'un air adorable qui pourrait faire craquer n'importe qui.

Nouveau flashback, quelques jours plus tard, la même année.

Nous nous retrouvons à la sortie des cours, et c'est aujourd'hui que Rosa était censé parler à William. Nous commençons à marcher en direction des zones pavillonnaires pour aller chez moi.
- Alors ?
- Tu as passé une bonne journée ma beauté ? Mais oui bien-sûr et toi Valentina ? Excellente je te remercie !
me dit-elle nonchalamment, comme pour me faire poireauter.
- Rosa je t'en prie, abrège mes souffrance, je t'en prie, lui lançais-je en me plaçant devant elle, marchant à reculons.
- Bon, bon, ça va, tiens toi bien !
- Je suis toute ouïe...
- La vérité c'est que je n'ai pas eu besoin de lui demander quoi que ce soit. C'est lui qui est venu vers moi en me demandant si nous étions amies toi et moi.

Je n'en crois pas mes oreilles. Des petits papillons commencent à se réveiller gentiment dans le creux de mon ventre.

- Continue, tu lui as dis quoi ?
- Je lui ai dis que nous étions amies depuis l'enfance, ce à quoi il a répondu par une question...
- Quelle question ?
- Il m'a demandé si il était ton style de mec.

OH MON DIEU ! Nous nous mettons à hurler de joie en sautillant sur place comme deux gamines, en plein milieu de la rue, mais je m'en fiche, je me délecte de cette petite parenthèse joyeuse de ma vie.
- Ce n'est pas tout, poursuivit-elle en me regardant avec des yeux pétillants. Il nous a invité à une fête chez lui samedi soir ! Mais ne t'en fais pas Cendrillon, tu seras rentré avant minuit !
- Te moque pas ! Tu sais que je n'aime pas trop ça les fêtes étudiantes. Ça finit toujours mal !
- Ne fais pas ta rabat-joie et puis... ça pourrait te changer les idées ! Allez dis oui ! Tu ne vas pas me laisser y aller toute seule quand même...

J'hésite. D'un côté, j'ai très envie d'y aller car elle a raison, cela me ferait penser à autre chose qu'à Maman mais, d'e l'autre, j'ai peur. J'ai vu suffisamment  de films à ce sujet pour savoir à quoi ça ressemble. Bien que nous soyons arrivées en bas de chez moi, je n'ai toujours pas pris ma décision.

- Écoute, laisse-moi y réfléchir, ok Rosa ?
- Bon d'accord, mais ne réfléchis pas trop hein, me dit-elle en me gratifiant d'une moue résignée. La vie est faite d'aventures qui ne se réfléchissent pas ! À demain ma belle.

ValentinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant