Chapitre 14

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Depuis ce matin, je fuis mes propres émotions comme la peste. Je me renferme dans des activités rasoirs pour m'occuper l'esprit et ne surtout pas repenser à ce qui est arrivé ce matin.

En sortant de la douche ce matin, j'ai réussi à fuir de l'appartement en toute discrétion, ce qui était inutile parce qu'Elijah m'attendait sur le canapé, mais j'ai tellement paniqué que je lui ai lancé mes clefs dans le visage et suis partie en prétextant être en retard. Je pense que mes réactions l'ont un peu ébranlé et qu'il a pris peur, donc, il ne m'a pas suivi. Tant mieux. Comme quoi, être un peu folle peut servir.

Mais en arrivant à la librairie, je me suis retrouvée confrontée à Quinn qui m'attendait avec un café chaud au caramel et des cupcakes. Je ne sais pas qui de nous deux étaient le plus rouge : lui, qui était gêné d'être là pour suivre les ordres de son supérieur, ou moi qui venait de me doigter en pensant à ce même supérieur. Bref, rien n'allait et je l'ai fait partir en prétextant un câlin qu'il a fui pour mon plus grand bonheur.

Depuis, je cherche à m'occuper comme je peux pour ne pas avoir à penser à ce qui est arrivé et à la réaction disproportionnée de mon propre corps.

Je n'ai couché avec personne depuis plus d'un an et demi, et ça ne me manque pas spécialement depuis. Je n'en pleure pas la nuit, je ne me sens pas frustrée, tout va plutôt bien de ce côté-là. En plus, le dernier homme avec qui j'ai couché m'a écœuré de mon propre corps et depuis, j'ai un peu de mal.

Pas qu'il ait été méchant ou agressif, non. Je l'ai rencontré lors d'une soirée au Délire, il était même charmant et gentil, mais il était de passage à Whitesboro pour rendre visite à sa famille et c'était tout. Alors, quand nous en sommes arrivés à la fin de la soirée, il m'a invité à venir chez lui et c'était tout simplement... bizarre. On devait se dépêcher pour avoir fini avant que son cousin ne rentre, ou que sa tante rentre, et on devait être silencieux.

Bon, les impératifs familiaux, je sais que c'est contraignant et je ne le blâme pas pour ça, mais je me suis retrouvée par être englouti par tout ça sans même le vouloir véritablement. Je pensais que ce serait spontané, que ça me soulagerait un peu, que ça serait drôle... Mais c'était juste calculé et plutôt ennuyant.

Il n'était pas ennuyeux, durant la soirée, mais l'est rapidement devenu dès lors que nous sommes entrés dans une relation plus intime. Et là, j'étais déjà foutue, j'étais dans la chambre qu'il occupait et je n'ai plus osé dire non.

Lorsque nous avons terminé, j'ai juste récupéré mes affaires, pleuré un petit coup en rejoignant ma voiture en faisant la marche de la honte, et je suis rentrée chez moi avec une boule au ventre. Pendant les deux semaines suivantes, j'avais peur qu'on sache ce que j'avais fait, comme si j'étais devenue la putain de la ville, alors que ce n'était même pas le cas. Bon, les stéréotypes de la société sont entrés dans ma tête et ne veulent plus en sortir, c'est comme ça.

Mais bref, depuis mon arrivée à la librairie, ce matin, je ne peux rien faire d'autres que tourner en rond pour m'occuper l'esprit et m'empêcher de penser à ce qui aurait pu se passer ce matin. D'autant plus qu'en y réfléchissant, Elijah n'avait même pas l'air de comprendre ce qui se passait et même qu'il ne semblait pas me voir comme... ça.

J'ai l'impression d'être une simple personne quand il me regarde : ni homme, ni femme, juste une couche de peau sur des os et un cerveau qui contrôle le reste. Il peut avoir une petite chaleur dans le regard, une petite étincelle qui me fait vibrer, mais ça ne dure jamais longtemps. Et ce matin, alors que j'étais en train d'imaginer notre baise comme une folle, il était tout simplement inquiet. Ça ne fait pas de moi un monstre d'avoir vu ce que je voulais voir et de ne pas avoir pris en considération ses émotions ? Et voilà. Je suis un monstre.

Black Bikers, Tome 4 : La renarde passionnée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant