Chapitre 11: Ignorance

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Ça grinçait, ça crissait, le métal hurlait et une odeur de poisson pourri agressait l'odorat : Kisame aiguisait ses kunai.

Le nukenin souriait joyeusement au milieu de la pluie d'étincelles. Les flammèches venaient cuire ses bras nus, Samehada dans un coin se tortillait avec bonheur, l'humidité suintait des murs, tout était bien dans le monde pour le déserteur de Kiri. La seule chose qui aurait pu rendre cet instant meilleur, ç'aurait été une brune attachée au mur et essayant désespérément de lutter contre la pieuvre d'eau qu'il aurait modelée.
Son sourire prédateur s'élargit. Itachi-san détestait ça – il trouvait toujours un moyen de lui rendre la vie infernale dès qu'il ramenait une femme – mais Itachi était présentement occupé avec la Konoha nin, comme tous les jours depuis quasiment une semaine. Kisame savait qu'il ne lui faudrait que quelques minutes pour courir au prochain village, kidnapper une femme selon ses goûts et la ramener. Après, il n'aurait plus qu'à la dénuder, l'enchaîner et profiter du spectacle, cet exquis mélange de plaisir, de douleur et d'humiliation qui envahissait le visage de ses amantes.

Il sentit un frisson le parcourir, à l'idée de la peau tannée d'une brune de l'Herbe rougie par les griffures, ses yeux laissant couler des larmes de désespoir, son corps tremblant sous l'assaut d'un plaisir qu'elle refusait – et le moment délicieux où il tracerait une ligne sanglante sur son cou…

Samehada savoura avec lui l'image saisissante. L'Epée détestait le sexe mais adorait la violence, et pour se faire pardonner de ses péchés charnels, Kisame lui laissait toujours boire le sang des femmes avec lesquelles il jouait.

Oui, peut-être pourrait-il remonter à la surface et tester ses armes fraîchement aiguisées sur une cible vivante… L'idée semblait merveilleusement attrayante, après plus d'un mois d'abstinence et cette cruelle déception concernant la fausse brune de Konoha. Une pluie d'étincelles tomba sur son bras quand il changea l'angle d'aiguisage d'un kunai, laissant des brûlures violettes sur sa peau bleue.

Kisame leva le pied ; la roue à aiguisage s'arrêta progressivement en crissant contre le métal. Il jeta le kunai d'un geste négligent sur la pile près du mur. Le plus proche village se trouvait à une dizaine de kilomètres à l'Ouest, mais il en avait vu un autre lors de leur dernier passage, vingt kilomètres au Nord, plus discret et bien pourvu dans la marchandise qui l'intéressait. Samehada lui envoya son approbation, excitée par la vision sanglante qu'ils venaient de partager, et se lova dans sa main quand il saisit son manche. Elle adoucit sa surface minérale quand l'Epéiste la posa avec amusement sur son épaule nue. Pas de cape aux nuages rouges pour cette petite excursion – si l'Akatsuki commençait à enlever des paysannes au hasard, les Cinq Puissances allaient se poser des questions. Non, mieux valait rester incognito.
Bien sûr, Kisame ne se faisait pas trop d'illusions sur ses capacités à passer incognito. Un homme-requin de deux mètres à la peau bleue avec une Epée bandée sur le dos ? Forcément un professionnel des missions d'infiltration. D'une discrétion à toute épreuve. Absolument aucune caractéristique spécifique, non Monsieur !

Le déserteur haussa les épaules. Bah ! Au pire, il pouvait toujours tuer les témoins, pas vrai ?
Samehada l'enveloppa d'une vague d'approbation. Il y avait des moments, comme ça, où l'Epée adorait son Epéiste.

Rétrospectivement, Kisame savait bien que c'était une mauvaise idée, que ça ne pouvait pas fonctionner. S'il se coupait le doigt en jouant avec un shuriken pendant la nuit, Itachi vérifierait le matin que la plaie était bien refermée ; on ne pouvait pas faire quelque chose dans un rayon d'un kilomètre autour d'Uchiha sans qu'il trouve un moyen de le savoir.
C'était pour ça, entre autres, que Deidara s'était mis à l'appeler Dieu (« Omniscience, yeah ! »). Ça avait beaucoup fait rire Kisame au début (un peu moins quand il avait commencé à se demander si, par les Kamis, le déserteur d'Iwa ne serait pas sérieux).

Voilà pourquoi, avec leurs années de vagabondage commun, il ne fut pas surpris en sentant un pic de chakra dans le couloir qu'il allait emprunter. Il avait pourtant fait l'effort de passer par le couloir à l'opposé du cachot de la Konoha nin.
Bah – c'était le prix à payer pour avoir quasiment le chakra d'un Bijû et un génie pour coéquipier. Passer inaperçu prenait une toute autre ampleur. Kisame étendit ses sens et en fut récompensé quand un léger bruit de tissu se fit entendre dans son dos. Il se retourna, une Samehada agacée sur son épaule.

« Ah, Itachi-san, dit-il à l'autre déserteur. Qu'est-ce que la femme a dit ?

L'autre homme pencha la tête, « je ne suis pas dupe » peint sur ses traits félins.

- Des choses… intéressantes. Où allais-tu ?

- Faire prendre l'air à Samehada, quelques courses, répondit innocemment Kisame.

Il était plus grillé qu'une anguille sur un barbecue. Les yeux rouges étaient fixés dans les siens et d'une seconde à l'autre, Itachi-san allait ouvrir la bouche et constater, de ce ton paisible et implacable qui donnait la chair de poule à des shinobi d'élite…

- Sans cape.

Gagné. Comme quoi, même les déserteurs psychopathes et taciturnes pouvaient être prévisibles.

- Une envie de fraîcheur, sourit Kisame en exhibant sa dentition de requin.

Maintenant qu'il était fichu, autant y aller jusqu'au bout, pas vrai ? Il pourrait peut-être exaspérer un peu son coéquipier, et Itachi pouvait être tellement amusant quand son contrôle parfait craquait légèrement…
Mais l'autre déserteur n'était pas d'humeur joueuse. Son Sharingan était activé, les runes noires tournoyant avec une lenteur hypnotique.

- Nous devons remplir la mission originelle, déclara-t-il. La date limite est dans cinq jours.

Et Kisame savait que l'euphorie qui l'envahissait était partiellement provoquée par Samehada qui voulait enfin de l'action !, mais il se passa malgré tout la langue sur les lèvres avec appétit. Cinq jours maximum pour un peu de torture et un assassinat ? L'ordre de mission, s'il s'en rappelait bien – et il s'en rappelait bien : il était un shinobi de rang S, après tout – disait effrayer la population et leur donnait un mois entier, parce que le système de sécurité du lieu était extrêmement complexe, aucun des ninjas que j'ai engagés n'a réussi !
Kisame pariait sur deux jours pour entrer sans se faire repérer, trois s'il se montrait généreux. Puis Itachi-san lui laisserait la partie salissante et oh, c'était encore mieux que les paysannes brunes de l'Herbe car Uchiha ne pourrait rien lui reprocher : celui qui les payait voulait qu'on retrouve un corps déchiré avec des traces de viol.

Un peu de cruauté salariée, qui était-il pour dire non ? Samehada ronronna avec affection.

Plus qu'à aller chercher sa cape et ils étaient partis. Dans des moments comme celui-là, Kisame ne regrettait vraiment pas d'avoir déserté.

Pour Le Choix d' Itachi (Itachi x Sakura)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant