Chapitre 9 La peur partie 1

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Luna resta au sol, immobile à la lisière des marches. Pendant ce temps, Arbol, lui, regarda l'entrée et fut enchanté lorsque la grande bouche s'éloigna. Enfin en sécurité, l'être spectral se lança sur son hôte.

― Nous sommes vivants!

Cependant, il fut surpris de voir que sa compagne ne partageait pas sa joie. Au contraire, elle resta au sol sans rien dire. Son souffle saccadé montrait sa tentative en vain de reprendre son énergie.

― Est-ce que ça va?

La jeune femme ne dit rien, alors, pris de panique, Arbol inspecta son hôte. Il remarqua aussitôt que du sang coulait sur le sol attisant ainsi ses craintes.

― Es-tu gravement blessée?

Aucune réponse outre des petits sons entre chaque respiration. L'être spectral se mit alors à scruter la jeune femme et s'aperçut qu'aucune blessure mortelle n'était présente. Arbol ne comprenait pas ce qui se passait. C'est alors que des spasmes prirent le contrôle du corps de l'aventurière qui se mit à régurgiter.

― Qu'est-ce que tu fais? Pourquoi te débarrasses-tu de ta source d'énergie? Tu aurais dû faire cela avant de courir, tu aurais été plus légère. Maintenant, c'est inutile.

Luna n'écouta pas son compagnon. Toutes pensées se tournaient vers la grande bouche. Il n'y avait rien d'autre dans sa tête. Encore et encore les mêmes images. Elle revivait ce moment terrible de sa vie. Intrigué, son compère s'approcha et se connecta à ses émotions. Il ressentit en elle une peur allant au-delà du raisonnable. C'est à cet instant qu'il comprit que les petits sons entre les respirations n'étaient pas des tentatives de parler, mais des plaintes de douleur. La jeune femme souffrait de maux inconnus à l'esprit. Son teint devint livide et son corps resta sans réaction aux actions d'Arbol comme s'il n'existait pas.

― Qu'est-ce qui se passe? demanda l'entité spectrale. Pourquoi te sens-tu ainsi, Luna? Le monstre est parti. Tu n'as plus de raison d'avoir peur. Tu peux te calmer. Fais-moi confiance, tu es en sécurité.

Les paroles n'adoucirent pas la douleur de son hôte qui resta toujours au sol. Alors, l'esprit mit les mains sur la tête de l'aventurière et entra dans sa conscience. Il y vit la grande bouche et ressentit toute la frayeur que la jeune femme avait vécue. Un effroi que lui-même ne put tolérer. Alors, il arrêta et la peur s'évanouit petit à petit. Cependant, l'anxiété de Luna ne se dissipa pas pour autant.

― Arrête de penser à lui. Tu dois t'en remettre!

Mais, ces mots ne changèrent rien.

― Est-ce que ton corps est cassé?

Arbol mit ses mains sur la tête de sa compagne et il commença à fredonner une petite chanson. Il chanta et chanta. Le temps passa et les cernes de Luna se creusèrent. La faim et la soif apparuerent, puis enfin le regard de la jeune femme se leva pour se poser sur son ami qui la regarda attentivement en lui disant:

― Cela fait trop longtemps que tu es éveillée. Le soleil s'est couché et s'est relevé. Pourtant, tu n'es pas tombée dans cette étrange transe que vous, les êtres qui bougent vite, vivez chaque nuit. Tu dois dormir.

― Je n'y arrive pas, avoua enfin Luna.

― Il le faudra.

― Pas maintenant. Je n'y arriverais pas, Arbol. Je ne peux pas dormir même si je suis fatiguée. Il y a cette pression dans ma poitrine qui me garde éveillée.

― Il faut que tu essayes. Ce n'est pas bon pour ton corps de rester éveillé trop longtemps. De plus, j'ai vraiment hâte de te montrer ce que j'ai trouvé.

L'aventurière se releva avec difficulté. Elle se sentait si faible, mais sa curiosité eut raison de ses maux.

― Qu'est-ce que tu as trouvé?

― Tu dois dormir d'abord.

― Non, Arbol. Je dormirai après.

― Il ne faut pas, tu serais trop stimulée par les symboles et j'ai peur que cela aggrave ton cas.

― D'autres symboles? Je dois les voir. Je dois me changer les idées.

― Tu n'es pas dans l'état.

― Arbol, montre-moi sinon je pourrais couper une connexion particulière! brusqua la jeune femme.

― C'est bon! C'est bon, dit Arbol en s'agenouillant. Je ferais ce que tu demandes. Tu n'as pas à évoquer la peine ultime pour me convaincre.

Luna réfléchit un instant et elle pensa qu'Arbol avait raison, ses paroles avaient dépassé sa pensée. À contrecœur, elle avoua:

― Je suis désolée, je sais que je ne devrais pas.

Son ami hocha simplement la tête sans rien dire et il fit signe à sa comparse de le suivre. Ils n'allèrent pas très loin avant d'atteindre un couloir rempli de symboles et de lumières aux murs. Luna reconnut ce type de structure. Elle prit le temps de réfléchir avant de se souvenir du lieu où elle avait vu ces hiéroglyphes. Puis, cela lui revint. Les murs ressemblaient étrangement à l'endroit où elle s'était réveillée de son long sommeil. Le moment où tout avait commencé. Il devait forcément y avoir un lien entre ces deux endroits. Alors, sans attendre, elle marcha le long du couloir en passant sa main sur chacun des symboles bleutés. Elle suivit le corridor jusqu'à ce que celui-ci l'amène à une grande pièce éclairée par des centaines de petites lueurs sur les parois de la pièce. C'était magnifique et si intrigant en même temps.

― C'est incroyable, dit finalement Arbol. Je n'avais jamais vu de telles structures.

― Moi non plus, Arbol. Je n'avais jamais vu ça.

― Cet endroit ne t'évoque aucun souvenir? demanda Arbol. Pourtant, tu disais que tu avais vécu dans la cité. Tu aurais dû certainement visiter ce lieu auparavant.

Luna resta les yeux grands ouverts d'émerveillement. Elle contempla le toit qui semblait étoilé avant de poser son regard à nouveau sur Arbol.

― Je suis désolée. Je ne me souviens pas. Aucune impression. Rien. Pourtant, je devrais me souvenir de quelque chose. Ces murs et ces symboles sont les mêmes que ceux à l'endroit où j'ai repris connaissance. Si je n'ai pas visité cet emplacement, je dois tout de même avoir visité le lieu où j'ai repris connaissance avant ma perte de mémoire.

― Sauf si tu as été transportée pendant que tu dormais, supposa Arbol d'un air songeur. Si ce secteur t'était interdit d'accès à l'époque, cela expliquerait qu'il ne t'évoque aucun souvenir.

― Si c'est le cas, cela signifie que cet endroit devait être d'une grande importance pour les anciens.

― Peut-il y avoir les réponses à nos questions?

― Peut-être bien...

Luna se mit à déchiffrer les symboles, mais rapidement, le manque de lumière eut raison de sa fatigue et elle s'assoupit finalement au travail.

La plaine fantômeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant