Chapite 20 Caballo partie 1

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Au sommet du monde d'Arbol, Luna sortit du temple tel qu'elle l'avait fait au début de son épopée. Elle regarda les grandes montagnes et le lever du soleil en se souvenant du sentiment qu'elle avait ressenti à cet endroit par le passé. Tel qu'elle l'avait déjà fait, elle descendit la montagne par le même chemin emprunté auparavant. Lorsque la jeune femme croisa le lieu de naissance d'Arbol, elle pensa aux enfants. Une portion d'elle s'inquiétait pour eux tandis qu'un autre côté avait confiance qu'ils trouveraient le bonheur dans ce monde magnifique.

En moins de temps que cela lui avait pris la première fois, elle arriva enfin au plateau. Dès son arrivée, l'aventurière scruta l'horizon à la recherche de ce qui l'avait poussé à affronter le danger du monde rouge. Tandis que le vent soufflait dans ses cheveux, les souvenirs de l'histoire de Descortées s'invitaient dans sa tête. Allait-elle réussir à charmer une monture qui la mènerait à la plaine fantôme comme le présageait le récit? Le cœur plein de doute, la jeune femme laissa la caresse de l'air sur son visage apaiser ses craintes. Aussi longtemps qu'elle vivait, l'espoir perdurait.

Après un long moment d'attente, un mouvement lointain attira son attention. Tels que la première fois qu'elle les avait aperçus, les chevaux suscitèrent l'admiration.

Hésitante, il y eut un long moment d'observation avant de prendre confiance et de s'approcher lentement de son objectif. Le corps un peu crispé, la jeune femme espérait que ses pas ne susciteraient pas la crainte chez ces êtres bien plus grands et lourds qu'elle.

Toutefois, lorsque ceux-ci remarquèrent la présence qui s'approchait, ils s'écartèrent rapidement au grand désarroi de l'exploratrice qui essaya en vain de les rattraper. Un peu dépitée, les jambes fatiguées, Luna s'arrêta en constatant son incapacité à rivaliser avec leur rapidité.

Toutefois, ce n'était pas un échec qui allait décourager l'aventurière qui essaya à nouveau, mais cette fois-ci elle comptait bien s'approcher à leur insu.

Tapis dans l'herbe, la sauveuse rampait que lorsque les regards se tournaient vers le sol. Heureusement pour elle, la brise soufflant dans le foin masquait son avance. La patience la rapprocha de son objectif jusqu'au moment où la harde s'éloigna naturellement de leur position originale. Voyant qu'elle perdait du terrain, la peur de manquer sa chance s'empara de son être provoquant une vague de chaleur et des tremblements à mesure que son cœur se resserrait dans sa poitrine. Plus de doute, elle devait surgir de sa cachette. D'un coup, elle bondit et courut inutilement puisque les chevaux se hâtèrent vers le versant opposé du plateau.

Amusé par la scène, Arbol se mit à rire tandis que sa camarade ne partageait pas ce sentiment. Elle devait absolument trouver un moyen de monter l'un de ces chevaux. Comment y parvenir? C'est alors que l'être spectral lui dit:

― Tu n'approcheras jamais ces êtres si tu ne parles pas avec ton coeur.

Luna arqua le sourcil tandis qu'elle reprenait son calme, le regard vers le sol et l'esprit occupé à se demander ce que son compagnon insinuait. Frustrée de ne pas y voir clair, elle serra les poings, déterminée à recommencer aussi souvent qu'il le faudrait.

― Que comptes-tu faire? Bondir sur l'un d'entre eux, le chevaucher, le forcer à traverser les mondes et à affronter les fantômes? Ces êtres sont plus lourds, plus forts et plus rapides que toi. Tu ne peux pas les forcer à t'obéir avec ton corps frêle.

Mécontente, l'humaine dut avouer que son compagnon spectral la forçait à regarder la vérité sans filtre. Toutes tentatives se solderaient en échec.

― Jamais tu ne m'aurais amené au bout du monde avec cette attitude obnubilée. Je t'ai suivi parce que tu m'as apprivoisé.

― C'était simple, tu étais attaché à moi, admit la jeune femme, un sourire en coin.

Son compagnon gloussa avant d'ajouter :

― Tu ne peux pas débarquer dans leur vie et tout chambouler. Ils doivent s'habituer à ta présence. Ils doivent apprendre à te connaitre...

Luna leva les yeux vers le lever du soleil, puis elle sentit la brise dans ses cheveux. Si elle voulait approcher ces animaux, elle devait effacer son sentiment d'urgence. La paix intérieure pouvait peut-être favoriser son approche.

La jeune femme prit une grande respiration et garda son calme. La fin du monde pouvait encore attendre. À la lumière de cette pensée, le temps s'écoula sans peser sur ses épaules. Puis, avec un sentiment léger qui berçait son cœur, elle se mit à fredonner un air qu'Arbol chantonnait souvent pendant leur voyage. Un air joyeux et paisible qui au fil du temps se mit à lui procurer un certain apaisement.

Calme et sereine, la jeune femme scruta les montagnes, les arbres et les feuilles. La beauté du monde faisait miroiter ses plus beaux atouts qui forcèrent un sourire sur les lèvres de celle qui le contemplait.

Les jours s'écoulèrent sur ce plateau habité par la harde. Lorsque le troupeau mangeait ou courait au gré du vent, l'intruse en faisait de même. La jeune femme se laissa bercer ainsi par cette vie paisible qui se concentrait sur l'instant présent.

Durant son périple, l'aventurière profitait des moments où les chevaux broutaient calmement l'herbe pour refaire des provisions et pour laver son linge. La nuit, elle se couchait dans l'herbe et observait les étoiles accompagnée de son compagnon. Le matin, elle retrouvait le troupeau avant de suivre leur rythme de vie. En tout temps, la harde restait à portée de vue.

Tandis que son linge séchait sur les branches d'un arbre, Luna fredonnait en faisant un dessin sur la berge d'un ruisseau. C'est alors qu'elle entendit un bruit qui attira son attention. En faignant de ne rien avoir entendu, la jeune femme continua ses dessins tandis qu'Arbol chuchotait à son oreille ce qui se produisait derrière elle.

― Ne fais aucun geste brusque, il approche craintivement.

L'exploratrice ne put empêcher un sourire sur ses lèvres à mesure que l'excitation s'emparait d'elle. Tellement de questions bourdonnaient dans sa tête. Pour y répondre, il lui suffisait que de tourner le regard, mais cela la mettait à risque de perdre le fruit de ses efforts. Heureusement pour elle, Arbol sentait ses émotions et il sut qu'elle voulait en savoir plus.

― C'est le grand tout noir. Il approche avec intérêt pour ce que tu fais.

L'exploratrice se sentit vulnérable lorsque l'énorme monture piétina le sol près d'elle. Le souffle coupé, elle essaya de garder la note jusqu'au moment où l'animal descendit sa tête à son niveau. Quelle belle bête extraordinaire! Quelle chance unique d'avoir un contact avec une créature aussi majestueuse!

Toutefois, malgré les apparences, Luna put sentir une crainte provenant du nouveau venu. Alors elle reprit son chant envoutant qui semblait rassurer la monture. Puis, elle arrêta les simagrées avant de doucement se tourner vers l'animal craintif.

― Ne crains rien. Je suis ton amie, dit-elle calmement.

Le cheval resta méfiant, mais son coeur se calma en voyant Arbol s'approcher. C'est à ce moment que l'exploratrice apprit que les animaux pouvaient eux aussi voir les esprits et ceux-ci leur apportaient du réconfort. Confiant, l'être spectral toucha son museau et le cheval se calma.

― Ne crains rien. Elle est ton amie.

D'un coup, un bonheur envahit la jeune femme. Avait-elle réussi à charmer ce cheval? Est-ce que ce majestueux animal lui faisait confiance? Luna n'eut d'autre choix que de se lever pour en avoir le coeur net. La main devant elle, la sauveuse avança sa paume en direction du cheval avec l'espoir qu'un lien de confiance puisse se tisser entre eux. À son approche, celui-ci ne déguerpit pas au premier instant. Au contraire, il la regarda droit dans les yeux. Sans hésiter, elle posa calmement sa main sur son museau.

― Il est magnifique, dit-elle à son compagnon.

― C'est un beau cheval. Il pourra peut-être un jour nous mener à la plaine fantôme.

― Quand?

― Cela prend du temps pour gagner la confiance des êtres vivants. Cela prendra le temps qu'il faudra. Nous avons déjà un bon début.

Luna flatta longuement le museau de l'animal, puis elle le laissa repartir. Chevaucher une monture allait être une tâche plus longue que prévu. Toutefois, l'aventurière était prête à patienter le temps qu'il faudra. 

La plaine fantômeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant