« Un. Deux. Trois. Nous avons notre vainqueur ! »
Sous les acclamations du public, Evangéline lâcha le bras de son adversaire, qu'elle avait plaqué au sol. Puis, en rejoignant le centre de l'arène de fortune, elle passa un bras sur son front pour essuyer la sueur. Une mèche frisée de ses cheveux châtains s'était échappée de sa tresse pendant le combat, et tombait devant ses yeux.
L'organisateur de ces combats illégaux, Raul, passa entre les cordes et la rejoignit en courant pour saisir son bras et le lever. Le public cria de nouveau. Malgré les lumières aveuglantes, Eva vit de nombreux hommes s'échanger des billets et des bourrades. Peu de gens pariaient contre elle généralement, seuls les nouveaux le faisaient, préférant croire en une armoire à glace plutôt qu'en une femme.
Elle jeta un coup d'œil vers son adversaire, encore sous le choc après le coup qu'elle lui avait infligé. Ses amis étaient en train d'essayer de lui faire reprendre ses esprits pour le sortir.
« Tu as été brillante ce soir, lui glissa Raul sans cesser de sourire à la foule. Comme toujours. »
Elle se contenta de dégager son bras et de descendre de l'arène. Dans son dos, Raul annonçait les combats du lendemain d'une façon qui lui était propre, vouée à attirer plus de monde. Et à l'enrichir encore plus.
Elle rejoignit le petit couloir dédié aux combattants, qui séparait la foule en deux, pour rejoindre les loges. Du moins, c'était ce que ces pièces délabrées prétendaient être. Elle remonta la sombre allée, éclairée de quelques plafonniers qui éclairaient mal et décorée de vieilles affiches de précédents combats. Certaines la représentaient elle.
L'Ange.
C'était le nom qui était inscrit sur sa porte. Elle était l'une des seules combattantes à avoir sa loge attitrée. Rares étaient les favoris de Raul, et Eva était au-dessus de tous.
Elle claqua la porte derrière elle et s'effondra sur le siège le plus proche, qui grinça sous son poids. Puis elle retira le masque qu'elle portait sur les yeux, le jeta plus loin, détacha ses cheveux, qui retombèrent en une épaisse et longue masse de mèches frisées, et se laissa aller contre le dossier, paupières fermées.
Elle resta longuement ainsi, à profiter de ces quelques instants de répit, à écouter les acclamations lointaines du public toujours en délire. Raul avait fini son petit discours, puisqu'elle ne l'entendait plus, mais elle savait que certains s'appropriaient l'arène pour s'affronter les uns les autres. Ça finissait ainsi tous les soirs. Et lorsque l'alcool se mêlaient à ces règlements de compte désorganisés, il y avait généralement beaucoup de blessés. Voire des morts. Et Raul s'assurait toujours d'arriver un peu trop tard avec les montagnes qui lui servaient de gardes pour mettre tout le monde à la porte.
« Regarde-moi tous ces billets, petit ange ! »
Elle soupira. Raul n'avait même pris la peine de frapper avant d'entrer. Mais il s'assurait toujours de bien refermer derrière lui et de laisser deux de ses hommes sur le palier. Personne ne devait savoir ce qui se disait à l'intérieur.
Eva n'ouvrit qu'un œil, ce qui lui suffit pour le voir en train de compter, certainement pour la centième fois, tout l'argent qu'il avait gagné ce soir.
« Mais c'est moins bien que les autres soirs, conclu-t-il en posant une partie du butin sur une table bancale. Il y a de moins en moins de nouveaux dans le public, et même ceux qui sont là pour la première fois ont entendu parler de toi et parient en ta faveur. Ce qui n'arrange pas nos affaires. »
Elle souffla de nouveau et se redressa. Elle savait ce qu'il allait lui dire ensuite.
« La prochaine fois, tu devras perdre. »
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La Cité de Sang
FantasyComment prouver son innocence dans la Cité du sang ? Evangéline rêve de racheter sa liberté et de quitter cette vie qu'elle déteste. Mais la Cité de Sang n'offre que peu de possibilités aux personnes comme elle. Contrainte de se battre lors de comb...