Chapitre 8

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Evangéline resta longuement allongée dans son lit, à regarder le plafond. Elle aurait dû se sentir heureuse d'avoir ajouté quelques billets dans ses économies, mais elle était en colère. Et elle ne savait même pas pourquoi.

Elle avait juste envie de se défouler. Mais pas sur un simple sac de frappe. Elle avait besoin d'avoir des réactions, de réfléchir, d'entendre des acclamations, de se faire aduler.

C'était décidé, elle débarquerait dans les arènes ce soir. Raul lui en voudrait certainement de ne pas l'avoir prévenu, mais elle s'en fichait. Et puis, l'effet de surprise que déclencherait son arrivée rendra le public plus réceptif. Et surtout, elle voulait voir la panique dans les yeux des autres combattants, qui ne s'attendaient pas à avoir à l'affronter.

Oui, ce serait une bonne soirée. De quoi oublier... beaucoup de choses.

Il était tard dans la matinée lorsqu'elle sortit enfin de son lit. Elle n'avait pas l'habitude de traîner, même quand elle avait un coup de mou. Elle préférait réfléchir sur son sort avec un gâteau au citron sur les toits de la basse Cité. Et surtout, Mama ne la laissait jamais dormir autant.

Et si Mama ne l'avait pas encore sortie de son lit, c'est qu'elle se rendait bien compte qu'elle avait besoin de temps.

Evangéline descendit dans la cuisine, espérant trouver sa part du petit déjeuner. Mais les filles n'avaient rien laissé. Sauf qu'elle savait qu'elles avaient une réserve de gâteaux dans leur salon, et elle allait se faire un plaisir d'en piquer.

Alors elle se faufila discrètement dans le salon, où certaines filles se prélassaient en lisant un livre ou en jouant aux cartes. Elle se dirigea directement vers le placard et piqua des petits gâteaux à la vanille et au chocolat, le genre de gâteaux rares dans les bas-fonds que Mama ramenait de la Haute Cité lorsqu'elle s'y rendait.

Armée de son paquet, la couche remplie de gâteaux, elle s'approcha de la table de jeu et observait la partie qui se déroulait avec une grande curiosité. Elle se plaça derrière Leha et analysa le visage des autres. Leha avait un bon jeu mais au vu des expressions de Neseh, cette dernière en avait un meilleur.

« Toujours vivante, Lily ? »

Evangéline arqua un sourcil en tourna la tête vers Keda, qui lisait un livre un peu plus loin.

« Charles est doué, mais pas à ce point, désolée. »

Elle fourra un nouveau gâteau dans sa bouche en haussant les épaules. Neseh laissa échapper un rire sec, mais elle ignorait si c'était à cause de sa remarque ou de la partie.

« Doué ou pas, j'espère que tu as profité de lui la nuit dernière, commenta Keda. »

Eva se tendit. Par le Dieu du Sang, est-ce qu'il n'avait pas apprécié la nuit dernière ? C'était la pire chose qui pouvait lui arriver, elle avait besoin de l'argent qu'il aurait pu lui donner. Elle devait se rattraper, demander à Mama qu'il revienne.

« Pourquoi ? S'enquit-elle, inquiète. Il est allé voir Mama ? »

Neseh rit de nouveau.

« Qu'est-ce qu'elle a ? S'énerva Evangéline en plissant les yeux.

–Ton Charles n'est pas allé lui parler, lança Neseh en abattant ses cartes sur la table, dévoilant son jeu et mettant fin à la partie. Et il ne parlera plus jamais. »

Eva fronça les sourcils.

« Arrête avec ton air suffisant et dis-moi ce qu'il se passe à la fin !

–Il est mort, Evangéline, annonça Keda en posant son livre. »

Elle se figea, les yeux fixés sur Keda. Comment ça, mort ? Il ne pouvait pas être mort, il était avec elle quelques heures auparavant seulement.

La Cité de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant