11. Trois petites règles

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San Francisco –

Charlie

La première lame vient se loger entre mes jambes.

Je vais le tuer.

Je n'ai pas peur, je suis enragée, ce mec est une vraie ordure. Je ne lâche pas ses yeux quand le deuxième couteau atterrit juste à côté de ma tête. La foule retient son souffle. Pour qui il se prend au juste ? C'est son bar, ok on aura compris, monsieur tient à tout diriger et avoir le dernier mot, malheureusement tu n'es pas tombé sur n'importe qui. Je suis joueuse, bien plus que toi.

Il reste un couteau.

- Faites tourner la roue, dis-je à l'assistante trop absorbé à maté l'imbécile qui joue avec ma vie.

Elle m'observe une seconde, hésitante, puis se ravise, attrape le haut de la roue. Je lance un dernier coup d'œil à Zachary, debout à quelques mètres de moi, faisant tourner la dernière lame dans sa main. Comprenant mon intention, il fronce les sourcils puis finis par afficher un large sourire.
Si je ne le détestais pas, il pourrait me plaire.

- Vous êtes sûre ? demande l'assistante.

J'acquiesce et elle finit par tirer sur la roue pour me faire tournoyer. Je ferme les yeux, prise dans le tourbillon j'en oublie presque pourquoi je suis là. Enfin presque, jusqu'à ce que la brûlure d'une coupure vienne chauffer la peau de mon bras. Je grimace, la douleur est supportable mais le souvenir qui me frappe l'est beaucoup moins.

« Tu sais ce qui manque à cette belle petite poitrine ?
Je sanglote de froid, de peur, de haine. De deux doigts il tourne mon visage vers le fond de la ruelle. Personne ne viendra m'aider, si je dois mourir ce soir je me battrai. Trois ou non, je dois essayer. J'inspire profondément, réfléchissant à un plan quand je sens le froid glacial d'une lame contre ma gorge.
- Du sang, reprend-t-il.
Sa prise autour de mon cou s'accentue, sa lame appuyant de plus en plus contre ma trachée me coupant le souffle. Puis d'un coup sec il entaille mon cou, laissant échapper mon liquide chaud.
Je crie à nouveau, le repousse d'un mètre seulement mais sa main rencontre à nouveau ma joue, plus fort cette fois, avant que je ne puisse faire un pas de plus.
- Crie encore une fois et je t'égorge, chuchote l'homme. »

Je hurle mais pas de douleurs, je suis effrayée, je n'arrive pas à sortir de mon souvenir. Je suis tenue, mes liens ne se sont pas encore défaits.
La roue ralentie est aussitôt je sens mes liens céder et mes genoux rencontrent le bois de l'estrade où se tient la roue. Mes mains viennent recouvrir mon visage, je veux que ça s'arrête.

- Eh ! C'est fini !

Je l'entends, j'essaye de m'accrocher à sa voix grave et tendue mais je n'arrive pas à chasser les images, je suis encore prisonnière de mon souvenir.

J'ai froid, terriblement froid, comme la nuit pendant mes cauchemars, je pue l'alcool et j'ai un goût métallique dans la bouche, celui du sang, de mon sang. La seconde d'après j'ai l'impression d'avoir des milliers d'aiguilles qui me transperce le bras me ramène au milieu du bar. J'ouvre les yeux et regarde immédiatement ma blessure. Ses doigts sont enfoncés dans ma chair ouverte.

Je ressens enfin la douleur.

- Mais t'es dingue ou quoi ! crié-je en repoussant sa main.

Son regard glacial braqué sur moi.

- Viens avec moi, ordonne-t-il en se levant.

- Même pas en rêve.

J'abaisse ma manche et quitte l'estrade, le reste de la foule est retournée à ses occupations. Je rejoins Jenna, complètement choquée mais je n'ai aucune envie de parler. Je veux juste finir mon travail et m'enfermer dans ma chambre. Je récupère un plateau et je suis sur le point de partir chercher une commande quand une main saisit mon poignet.

RememberOù les histoires vivent. Découvrez maintenant