50 | Oui, je le veux

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🩰 ANABELLA 🩰
Paris

— Rompre le contrat ?!

Ma voix fait sursauter les autres clients du café autour de nous alors que Jim reste de marbre, touillant sa boisson chaude. Je serre les poings et essaye de contrôler ma respiration.

— C'est sa décision...

Son sourire se crispe alors que mes narines se gonflent sous la colère. Je plaque brusquement mon dos contre le dossier de ma chaise et tente de calmer la rage qui fuse en moi. Autour de moi, les serveurs zigzaguent entre les tables, servant les commandes. Sur la terrasse, la petite brise de vent me fouette le visage.

— C'était écrit dans le contrat, je ne t'apprends rien, Bella. Neuf mois de projet avec la possibilité d'allonger le temps... Ou d'y mettre un terme pour une raison valable. Ici, la raison valable est le problème qui vous relie qui n'est plus possible, certaines clauses n'ont pas été respectées aussi. Ça n'a duré que cinq mois...

— Mais tu sais que ce sont des conneries !

Il soupire et frotte son visage de ses paumes. Il a l'air épuisé. Jim m'a contactée ce matin pour un rendez-vous professionnel. Et voilà qu'il me prévient que Devon veut arrêter le projet. Ce dernier n'a pas été capable de venir lui-même pour me l'annoncer, préférant passer par son manager.

Le peintre ne veut plus faire l'exposition. Il ne veut plus montrer mes maux et plus m'avoir comme muse. Cette pensée fait atrocement mal.

Le blond soutient mon regard puis ferme ses paupières. Je fais semblant de m'occuper les mains avec la paille de mon jus de fruits pour ne pas m'arracher les ongles. Le soleil tape sur le sol parisien, l'été approche à grands pas. Pourtant, l'hiver est au cœur de mes relations sentimentales. L'impression que tout stagne, que tout est gelé. Plus rien n'est chaleureux et brûlant.

La passion a déserté. Une froideur est apparue.

— Il a besoin d'aide.

Mes lèvres s'entrouvrent puis se referment. Les paroles de Jim résonnent autour de nous, comme une vérité qui fait mal. Mon cœur se compresse. Le manager de Devon est au courant de tout : l'histoire de Devon, son crime, son pacte, son mal-être. Ses rides de tristesse montrent qu'il ne reste pas indifférent face à cela. Il est le meilleur ami de Devon et bien qu'ils montrent rarement leur attachement, il l'aime comme un frère et ça le détruit de le voir ainsi. Le choc a été brutal et il essaye de s'en remettre, il se sent impuissant.

Comme moi.

Sauf que cette nouvelle bouscule toutes les bonnes initiatives que j'avais entreprises pour Devon : être patiente, attendre sagement, attendre qu'il guérisse seul et qu'il revienne. J'ai l'impression que j'ai été prise pour une idiote. Avoir pris comme motif : « non-respect des règles et problème entre les deux signataires » fait bouillir en moi une haine incommensurable. Jamais je n'aurais pensé qu'il aurait été capable de mettre fin à tout, à nous.

Est-ce qu'il est vraiment passé à autre chose ?

Mon estomac se révulse sous le coup d'une énième trahison.

— C'est lui qui me repousse, prononcé-je durement.

Mon reproche enrobe ma voix d'une épaisse colère. Un sourire attendri incurve ses lèvres. J'ai de la peine pour lui, je sais que l'artiste a dû, lui aussi, le mettre à la porte pour pouvoir rester seul. Ses yeux en amande chagrinés me regardent avec détresse.

Alors, je comprends que je dois faire un choix. Pour moi. Pour Devon. Pour tout le monde.

J'expire à pleins poumons, les battements de mon cœur s'accélèrent et je lui tends ma main.

Nectar Of GodsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant