Nectar Of Gods

42 | Le secret d'un artiste

🩰 ANABELLA 🩰
Paris

Deux heures. C'est le temps qui m'a fallu pour récolter plusieurs informations sur Devon.

      1. Il est sacrément mignon sur les photos de famille. Des photos qui ne montrent que sa tête d'adolescent.

      2. Au-delà de la peinture, c'est un grand musicien. Du piano à la guitare, des clichés le montrent épanoui dans le domaine.

      3. Ses parents sont adorables. Sa famille est adorable. Aucun doute : il a baigné dans l'amour et la bienveillance depuis sa naissance.

Et c'est tout. À vrai dire, il n'y a rien de plus alléchant que ce que je savais déjà avant de venir ici.

Pourtant, je ne cesse de me demander pourquoi avec moi c'est un tout autre Devon que je vois : celui qui transporte une noirceur amère sur les épaules. Non, ce n'est pas un Devon heureux, souriant, mais un Devon maussade et terriblement mystérieux qui me fait face depuis le début.

Qu'est-ce que tu ne me dis pas, mon beau peintre ?

Une hanche collée contre la table basse, un verre de vin à la main, j'examine la grande maison des Russel. Il y a de tout : ici, l'art excelle. Et la richesse aussi. Des tableaux décorent les murs, des photos de famille se dressent fièrement dans les couloirs, dans les cadres, et des pots de fleurs faits à la main s'étalent sur les tables. La maison est immense, le mobilier sacrément luxueux et le vin beaucoup trop de qualité pour ne pas le goûter. J'avale une grande gorgée en soupirant d'aise. La fête d'anniversaire de Leonora est plus que réussie. Cette fille est très entourée et de la plus belle des manières. Amis et famille se mélangent dans la pièce créant une foule d'amour et d'excitation. L'atmosphère est particulièrement charmante, une douce musique sensuelle se dégage des grosses enceintes du salon alors que je la regarde bouger des hanches avec ses amis tout en étant taquinée par sa tante qui rigole à gorge déployée. Sa longue robe jaune lui va à ravir et elle brille de mille feux, comme un soleil trop éclatant à la plage.

Elle a ce que je n'ai jamais eu et la voir si heureuse me fait sourire tristement. Je l'ai vu rire avec son père et embrasser sa mère en pleurs lorsqu'elle a émis son discours de remerciement. Mon cœur n'a jamais été aussi serré d'amour, témoin de leur lien. Elle a désormais vingt-deux ans, le même âge que moi. Des décorations d'anniversaires raffinées cachent les grandes baies vitrées où la Lune se dresse fièrement. Tout le monde est incroyablement bien vêtu, prêt à vénérer le jour de naissance de cette femme. Je mentirais si j'affirmais que je n'avais pas été angoissée avant de venir ici. Entrer chez les Russel est intimidant. J'ai eu l'impression de poser les pieds dans un lieu sacré et de n'avoir pas ma place autour de cette richesse artistique. Mais, ils ont su me mettre à l'aise. Certes, je ne sais pas quoi faire d'autre que de boire ce délicieux liquide, mais ce n'est pas si dérangeant. Et c'est en particulier parce que j'ai accès à ce dans quoi Devon a plongé enfant.

J'ai accès à sa famille et j'adore décortiquer leur esprit de là où je me tiens. Je ne sais pas si c'est l'alcool, mais je n'ai jamais autant été à l'aise avec des inconnus. Je crois que le fait qu'ils me connaissent en tant que muse du peintre m'aide beaucoup. Avec les photos du Louvre, je ne suis plus le secret de Devon. Alors, je me tiens près d'eux, discute de temps en temps puis introduis doucement Devon où quelques indices s'échappent. Des souvenirs de lui m'ont été partagés, mais aucun n'a su me mettre sur la trace d'un secret longtemps protégé.

Le seul qui aurait pu m'aider à creuser plus loin que la surface froide de l'artiste est Milan, son frère qui n'est pas là. Leonora m'a prévenue qu'il ne sera pas présent en début de soirée, lorsque je le cherchais et désormais, je suis frustrée. J'avais tout misé sur Milan Russel, celui qui voue une haine incommensurable à Devon. Il aurait pu m'être d'une grande aide. Merde.