Chapitre 43

113 5 0
                                    

J'avais ramassé mon arme et me tenais prête à écouter attentivement une personne à qui je voulais poser mille questions. Seulement, si un serpent géant, monstre millénaire qui aimait des descendants d'Apollon au goûter, nous poursuivait, nous n'avions pas le temps pour mes états d'âme. Ma mère semblait avoir éloigné toutes les présences néfastes des environs, au moins pour un temps. 

- Ma chérie, avant que tu ne partes, il faut que je te parle de qui je suis, de mes pouvoirs de demi-déesse. Je vais te le montrer... 

Je me sentis comme tomber en arrière, la main de Camilla toujours serrée dans la mienne, et paniquai quelques instants avant que mon dos ne heurte violemment le sol de la Colline des Sang-Mêlés. Des demi-dieux s'agitaient de partout, alors même qu'une jeune fille blonde de dix ans descendait du ciel dans un rayon de Soleil. Ma mère... A l'instant où ses pieds touchèrent le Sol, une lyre apparut au-dessus de sa tête. Apollon l'avait immédiatement revendiquée, donc ; elle était soit extrêmement chanceuse avec tous les indéterminés qui habitaient le Bungalow 11, soit extrêmement puissante. 

Tous les pensionnaires s'agenouillèrent et c'est à cet instant que ma mère ouvrit brusquement les yeux. Ceux-ci étaient entièrement verts fluorescents et une brume verdâtre s'échappa de la bouche de la nouvelle demi-déesse. Un voix caverneuse sembla résonner dans l'entièreté de la Colonie des Sang-Mêlés. 

- Je suis un réceptacle de l'Oracle de Delphes, serviteur de la Pythie, Oracle du Seigneur Apollon. L'avenir m'apparaît quand la Pythie le désire. 

A ce moment-là, ma mère s'effondra comme une poupée de chiffon. Je chutai à nouveau en arrière avant de me retrouver dans le Bungalow 7 sur son sol marbré. On était en pleine nuit, et quatre enfants du dieu du Soleil y dormaient à poings fermés, dont ma mère. Tout d'un coup, une brume verte s'échappa du lit de l'adolescente d'une quinzaine d'années, réveillant les trois fils d'Apollon ; l'un d'entre eux, en voyant les signes, sortit du Bungalow à toute vitesse et fonça - je le suppose - à la Grande Maison prévenir Chiron. 

Ma mère se redressa brusquement dans son lit et ouvrit des yeux d'un vert fluorescent. 

- La fille des dieux ainés aura le sang de l'or le plus pur, 

Quand les dieux se retrouveront au pied du mur, 

Deviendra la Quatorzième à la flamme olympienne, 

Si  à abandonner les hommes elle se résigne. 

Chiron arriva à ce moment-là, alors même que ma mère s'effondrait affolant ses deux demi-frères. Le centaure était perplexe. 

- Que vient-il de se passer, Chiron ? 

- Je n'en sais rien, Christopher, je n'en sais rien. 

Tenant fermement Camilla, je tombai à nouveau en arrière ; les pièces commençaient à s'assembler dans mon esprit, et cela me terrifiait. Nous arrivions cette fois-ci sur une plaine fleurie, avec un petit cabanon en son centre. Une femme blonde d'une vingtaine d'années, enceinte jusqu'au cou, en sortit, et si elle n'avait pas eu cet arc accroché à son épaule, j'aurais pu croire qu'elle était tout à fait normale. 

Malheureusement, ce portrait idyllique fut perturbée par une vague de boue qui fit trembler l'entièreté de la plaine. La demi-déesse banda son arc comme elle le pouvait malgré son ventre rebondit. Une déesse endormie se forma à partir de terre qui se soulevaient ; si je ne savais pas qui elle était et ce qu'elle s'apprêtait à faire, j'aurais presque pu la trouver belle et apaisante. Elle n'ouvrit pas la bouche, mais sa voix sembla émaner du sol elle-même. 

Monica Hawkins, fille d'Apollon, je ne peux pas laisser cet enfant naître : elle contrecarrera mes plans à l'avenir, et sa puissance consistera une menace au règne de mes fils.

- Gaia, de mon vivant tu ne toucheras pas à un cheveu de ma fille ! 

Je le sais bien. 

Un pic rocheux émergea derrière ma mère. J'aurais voulu la prévenir, mais aucun son ne sortait de ma bouche. Je ne pus qu'assister à la scène la plus horrible de mon existence. La roche transperça la poitrine de ma mère et Gaia s'évanouit comme elle était arrivée. La fille d'Apollon cracha des gerbes de sang avant de s'effondrer dans le parterre de fleurs. Elle respirait encore quand la Lune et le Soleil apparurent tous deux dans le ciel : un char argenté et un char doré se précipitèrent vers ma mère, mais je savais qu'ils n'arriveraient pas à temps. Malheureusement, je connaissais déjà la fin de ce rêve. Les jumeaux Olympiens coururent auprès de la blonde qui agonisait : Artémis utilisa tout de suite ses pouvoirs pour voir comment allait le bébé, et Apollon tomba à genoux, véritablement peiné, et il prit fermement la main de sa fille. 

- Ma fille, je suis désolé. Je suis arrivé trop tard... 

- Papa, ma fille... Est-ce que ma fille va s'en sortir ?... 

Le dieu du Soleil se tourna vers sa sœur qui s'affairait à me garder en vie.  Je n'aurais jamais cru que les dieux pouvaient avoir l'air aussi humains. 

- Artémis ? 

- Je peux la faire accoucher, mais ta fille y laissera la vie. 

- Non !

- Si ! Dame Artémis, sauvez ma fille, je vous en supplie ; tel est mon dernier souhait. 

Le dieu et sa fille s'étaient écriés en même temps, causant une nouvelle canne de toux sanglante à ma mère. La déesse de la maternité acquiesça gravement et un halo argenté entoura les femmes. Un bébé apparut langé dans les bras d'Apollon alors que ma mère était morte dans les fleurs, le sourire aux lèvres. Les deux dieux se relevèrent d'un même mouvement. Apollon me regarda d'un œil peiné. 

- Je vais t'amener dans un orphelinat et je tenterai de te protéger des monstres aussi longtemps que les Parques me le permettront.  

Camilla me serra dans ses bras alors que nous tombions une dernière fois en arrière. Une prophétie me concernait, et visiblement je trahirai les humains. Je ne voulais pas me résigner à abandonner les humains !

Nous étions revenues dans le temple de Thanatos quand ma mère me sourit d'une manière navrée. Je savais que cela voulait dire que j'allais à nouveau devoir l'abandonner, mais savoir que ma mère avait des pouvoirs divinatoires ne me créait qu'une nouvelle myriade d'interrogations à l'esprit. 

- Le temps est venu pour toi de continuer ta quête, Leïa. Python arrivera d'une seconde à l'autre. 

Et comme pour confirmer ses dires, un serpent titanesque s'extirpa de la galerie que nous avions emprunté pour venir à l'autel. Ma mère se décala et désigna un delta bleu dans le mur de la main. Une entrée du Labyrinthe... 

- Prends garde à toi dans ce piège car ton père ne pourra pas te sauver. Et n'oublies pas que le sens des prophéties n'est jamais clair. 

J'entraînai la fille d'Aphrodite dans un saut et dans une course pour échapper au coups de crocs de l'ennemi mortel d'Apollon. Je touchai le delta du bout des doigts, créant un passage juste assez grand pour nous deux. Le spectre de ma mère se plaça entre le monstre et moi dans un dernier signe de son amour pour moi. 

- Je t'aime, maman ! Promis, je te rejoindrai le moins rapidement possible ! 

C'est alors que le Labyrinthe se referma derrière nous deux, nous abandonnant à nouveau dans l'obscurité absolue. Nous étions dans le plus grand piège de demi-dieux ayant été inventé par le plus célèbre fils d'Athéna : le grand et unique Dédale. 

Lorsqu'on traverse les Enfers... ( Percy Jackson )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant