Lorsqu'on traverse les Enfers... ( Percy Jackson )

Chapitre 42

Saviez-vous que les courtisans de la reine Pénélope étaient des sacrés teignes et que dans cette partie des Enfers leurs armes étaient physiques et pouvaient blesser ? 

Moi non plus. Je l'ai découvert en me prenant une flèche dans l'épaule en me jetant devant Camilla qui s'était fait égratigner par plusieurs estocades d'épée. Nous étions finalement venues à bout des morts, mais je retiendrais que les goules sont de sacrés nuisances.

Dans l'obscurité presque totale, seulement éclairé par des cristaux bioluminiscents qui diffusaient une lueur verdâtre sur nos visages, l'Achéron portait bien son surnom de fleuve fantomatique, pont du monde mortel et des Enfers ; des brumes mystiques nous enveloppaient alors que l'on s'enfoncait plus profondément dans les limbes.
Je ne m'étais jamais sentie aussi perdue dans le monde des Morts. Ma peau devenait progressivement translucide, comme si moi-même je n'étais en soi plus très vivante.

C'est alors qu'émergèrent les esprits : après les goules et les monstres, nous étions enfin parvenues à destination. Mon épaule gauche était inutilisable, le bandage que m'avait fait Camilla était tâché d'Ichor, et elle était épuisée et couverte d'égratignures. Les fantômes nous observaient silencieusement avancer vers un autel en onyx parfaitement ouvragé avec la représentation des héros venus consulter l'oracle des morts et ce qu'il en était advenu de leur destin; je pouvais notamment reconnaître Ulysse, dont nous avions affronté les ennemis peu auparavant. Mais ce n'était qu'un demi-dieu parmi tant d'autres. D'ailleurs nos propres silhouettes émergeaient peu à peu sur un pan encore vierge de la pierre noire. Il ne restait plus qu'à espérer ressortir vivantes de cette aventure.

Je sortis l'encens, les pommes et les drachmes d'or, et mis en place mon sacrifice aux morts.

- Ô héros, ô divinités chtoniennes, acceptez cette modeste offrande et permettez moi de parler à Bianca Di Angelo, vaillante Chasseresse d'Artémis et fille d'Hadès.

Tous les esprits disparurent en l'espace d'un instant et un silence pesant nous cloua sur place ; des myriades de yeux invisibles scrutaient nos moindres faits et gestes.
Les drachmes s'envolèrent dans un nuage de fumée qui tourbillonna pour former une vague silhouette : la jeune fille en tenue de Chasseresse me sourit, sa longue tresse de cheveux noirs posée délicatement sur son épaule.

- Bonjour Bianca...

- Bonjour, ma sœur.

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La revoir, tout en sachant que j'aurais pu la sauver, que j'aurais pu me sacrifier à sa place, me fit l'effet de cent couteaux s'enfonçant dans mon cœur. Les larmes dévalaient mes joues ; la culpabilité m'enserrait la gorge. Je tendis la main pour la prendre dans mes bras, mais son sourire désolé me rappela que cela n'était malheureusement plus possible... 

- Bianca... Je... 

L'ancienne fille d'Hadès me coupa d'un signe de main. L'encens était déjà brûlé à moitié ; il ne me restait plus beaucoup de temps. Mais qui était le dieu qui avait établit cette limite de temps ?! Que j'aille lui tirer les oreilles ! 

- Ne dis rien, ce n'est pas de ta faute. Je suis heureuse d'avoir rencontrée ma sœur, même si ce fut bref. Et puis, tu n'as pas le temps pour des bavardages inutiles : alors quelle est ta question, Leïa ? 

Je ravalai mes larmes alors que Camilla posa une main sur mon épaule valide : Bianca avait raison, nous n'avions pas de temps à perdre et nous ne devions pas nous attarder dans ce temple de la Mort. La fille d'Aphrodite déplaça sa main dans la mienne, me faisant terriblement rougir sous l'œil attendrie de ma demi-sœur. 

- Tout va bien, La' ?

- Oui, oui, dis-je à la Colombe avant de me tourner vers Bianca. Je dois t'avertir que Nico a disparu ; ta mort l'a anéanti. Je le cherche pour le protéger de Luke et de son armée, mais je n'arrive pas à le localiser, malgré mes tentatives de vol d'ombre. Aurais-tu un indice pour ma quête ? 

L'attention de Bianca sembla s'échapper quelques instants, comme si elle se déplaçait auprès de Nico, avant que ses yeux noirs ne se verrouillent dans les miens. Une inquiétude sincère habitait ses pupilles, faisant monter mon angoisse. 

- Il est dans le Labyrinthe de Dédale : un véritable piège à demi-dieux, où seuls quelques héros savent se diriger. 

Ok, cette quête s'annonçait plus difficile que prévue. J'espère simplement qu'on ne recroise pas le Minotaure... Je n'avais pas forcément que de bons souvenirs de ma rencontre avec la méchante vache. 

- Faites attention à l'intérieur : nombreux sont les demi-dieux qui sont devenus fous dans ces couloirs. Et puis, prend garde à Nico : il est accompagné d'un spectre qui a une terrible influence sur lui. 

- Très bien, merci Bianca. Sache que j'aurais aimé apprendre à te connaître et t'offrir une famille... 

- De même, Leïa. Je regrette de ne pas t'avoir connue... Att -.

La Chasseresse allait dire quelque chose à l'instant même où son image se brouilla. Je reculai subitement en me mettant sur mes gardes, plaçant la fille d'Aphrodite derrière moi. Le spectre de ma sœur subissait comme des interférences, même si un tiers de l'encens n'était pas encore consumé. 

Tous les fantômes réapparaissent dans une agitation sans précédent, les torches clignotèrent avant de s'éteindre brusquement, nous laissant dans l'obscurité la plus absolue, et mes sens s'affolèrent en m'indiquant un danger omniprésent. Une odeur de souffre envahit les berges de l'Achéron, et des sifflements lointains nous parvinrent aux oreilles. La fille d'Aphrodite serra plus fort ma main et l'angoisse nous mit toutes les deux sur nos gardes. Un monstre approchait, et un gros. 

C'est alors que devant nous, dans une lumière aveuglante, une présence éclata. Je sortis ma fourche et la pointa devant nous. Il fallait qu'on réussi à fuir ; cependant, nous étions cernées. Apparut alors un autre spectre, et le choc me fit lâcher mon arme. 

Devant moi se tenait une femme de la vingtaine, magnifique, rayonnante avec des cheveux d'un blond doré et des yeux d'un bleu éclatant, pailletés d'or et d'un vert surnaturel. Elle possédait des yeux hypnotisant. On aurait dit Cassidy, mais avec dix ans de plus. Des larmes me montèrent aux yeux alors que je me rendis compte de qui se tenait devant moi. Je n'avais même jamais vu de photos ; tout ce que je savais d'elle, je me l'étais imaginée. Et la réalité était mille fois plus belle que tous mes rêves.  

Devant moi se tenait Monica Hawkins, fille d'Apollon... et accessoirement ma mère. 

- Maman... 

La fille d'Apollon me souriait de toutes ses dents en me tendant une main vers le visage. Le temps semblait s'être figé alors qu'une légère brise me caressa la joue, faisant couler lentement une larme solitaire à l'endroit où ma mère aurait dû me toucher. 

- Ma chérie, j'ai beaucoup de choses à te dire et très peu de temps pour le faire ; Python arrive, et il a faim.