Chapitre 15

1K 40 8
                                    

Plaçant à leur place les pinces de dépannage que je viens d'acheter, je ne dis pas un mot à Topper qui m'a conduit jusqu'au magasin. Ensuite, nous sommes passés prendre des bières en prévision d'une fête sur la plage. Enfin, fête... c'est plutôt un après-midi entre les amis de Topper. Lui, il insiste pour que je vienne, pour que je réalise tout ce que je "manque", comme il aime dire.

Depuis la veille, je l'ai évité. À chaque fois qu'il tente d'ouvrir la bouche, je trouve un prétexte : je tousse, je fais du bruit. Cette fois-ci, j'allume la radio, espérant couper court à toute conversation, mais visiblement, il en a assez.

— Bordel, Aïkida ! Arrête ! S'écrie-t-il, visiblement à bout.

Je reste silencieuse, croisant les bras tout en fixant la route devant nous, frissonnant sous l'effet de la clim qui souffle dans l'habitacle. La climatisation souffle froid dans l'habitacle, mais je ressens une chaleur oppressante monter en moi.

— Quoi ? Je murmure enfin, d'un ton exaspéré.

— Quoi ? Tu me demandes "quoi" ? S'emporte-t-il, ses yeux rivés sur la route, les sourcils froncés. Vous faites ça tous les jours ? Voler des trucs ? Enfreindre les règles ? Vous mettre en danger ? Dit-il, sarcastique.

Je serre les mâchoires, ma main serrant instinctivement le bas de mon siège.

— On a fait ça pour Pope. Tu le sais très bien, alors arrête, Topper.

— C'est pas une raison ! Tu as failli mourir ! S'énerve-t-il, sa voix montant d'un cran. C'est ça que tu veux ? Devenir une gangster ? Finir ta vie en prison ?

— Arrête ! Criais-je, les nerfs à vif. Qu'est-ce que tu veux que je dise, Topper ? Que je regrette tout ? Que je suis désolée ? Ben je le suis pas. On a fait ce qu'on devait faire, point. Pourquoi tout le monde s'obstine à me rappeler que je suis "revenue d'entre les morts" ?! Comme si c'était une excuse pour tout. Je prenais déjà des risques avant, et ça n'a pas changé ! C'est VOUS qui avez changé, pas moi !

Il ne répond rien. Il se contente de passer une vitesse, les yeux rivés sur la route. Je tourne la tête vers la fenêtre, mes bras croisés, frustrée. Il soupire longuement, cherchant ses mots.

— Kida, tu crois que je m'inquiète juste parce que c'est "dangereux" ? C'est bien plus que ça ! Quand tu es revenue... tu sais dans quel état ça nous a mis, maman et moi ? Tu crois vraiment qu'on peut juste "oublier" ? On ne veut pas revivre ça.

Je reste silencieuse quelques instants, fixant le paysage qui défile à l'extérieur. Ses paroles tournent en boucle dans ma tête. Je sais qu'il s'inquiète, mais ça m'étouffe, cette pression, ce regard constant qui me rappelle sans cesse que j'ai été sur le point de disparaître.

— Et tu crois que moi, j'ai envie de revivre ça ? Je souffle finalement, ma voix tremblant légèrement malgré moi. Mais je peux pas rester là, à rien faire, Topper. C'est pas moi.

Mon ton est sec. Est-ce que quelqu'un, un jour, comprendra ? J'ai juste envie de voir John B. Si même lui me traite différemment, alors peut-être que le problème, c'est vraiment moi.

— C'est pas ce que je dis, mais...

— Mais rien, Topper. Vous êtes tous insupportables.

— Je comprends que t'aies besoin d'agir, de te sentir utile, mais tu te mets en danger inutilement, Kida. Tu n'es plus obligée de prouver quoi que ce soit. On s'inquiète pour toi, c'est tout.

Je me crispe à ces mots, le ton paternaliste qu'il emploie m'exaspère.

— C'est toujours ça, hein ? Vous vous inquiétez pour moi. Tu t'inquiètes, maman s'inquiète... et moi, je fais quoi ? Je continue à être cette petite chose fragile à vos yeux, incapable de prendre des décisions ?

Outer Banks tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant