À Whitesboro, les Black Bikers sont toujours la loi.
Jordan Pierce, jeune étudiante en biologie à l'université de Denton, travaille dans un bar à thé pour financer sa vie, à Whitesboro. Après une nuit terrible, quatre ans plus tôt, elle est persuadé...
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Je ne sais pas à quel moment tout a foiré. Sûrement quand Lindsay a ramené plusieurs canettes de bière, ou alors quand Logan nous a sorti un paquet de cigarette de sa poche. Définitivement quand Susan a jeté de la weed sur la table. J'aurais dû me douter à ce moment précis que ça finirait mal, mais je n'ai pas réfléchi.
Non.
Comment une gosse de seize ans aurait pu croire que quelque chose d'aussi terrible arriverait ?
Alors que je fixe le plafond blanc de cette chambre d'hôpital, rien ne pourrait me faire oublier cette odeur de brûlé, de chair qui fond, de... mort. Rien ne pourra jamais me faire oublier ça.
— Jordan Pierce ?
Mon regard quitte le plafond et se pose sur un agent de police. Il m'observe avec gêne, je sens aussitôt mon corps trembler alors que je remonte la couverture jusqu'à mon menton pour me cacher.
— Je suis désolé de vous déranger aussi tôt, mais nous avons besoin de...
J'arrête de l'écouter. Je ne vois que son regard qui n'ose pas se poser sur moi, ses yeux qui m'évitent et fixent le vide, alors que je suis bien là. Ma vie sera donc comme ça, désormais ? Les gens m'éviteront, parleront sur moi, mais ne me regarderont plus ?
Je sens mon cœur s'emballer dans ma poitrine en réalisant que cette fille que j'étais hier n'est plus rien aujourd'hui. Je ne serais plus jamais la même gamine innocente. Je ne serais plus jamais moi.
— Vous avez des nouvelles de mon père ?
C'est la seule chose que j'arrive à dire ou à laquelle j'arrive à penser, à travers toutes mes pensées obsessionnelles qui tourbillonnent dans ma tête.
— Oui. Il est...
Son hésitation me coupe le souffle. Est-ce que mon père est mort ? Est-ce qu'il m'a abandonné, lui aussi ? Est-ce que je suis seule ? C'est ma faute. Tout est ma faute.
— ... en soin intensif, mais il va bien. Les docteurs sont confiants et ont pu s'occuper de lui à temps. Il aura des séquelles physiques, mais le pire est passé.
L'odeur du feu, de la fumée, de la peau, de l'alcool... Tout se mélange dans ma tête. Je ne sais plus quoi regarder, quoi faire, je me sens soudainement étouffée. L'odeur s'infiltre dans mes narines, dans mon esprit, dans mon âme. Elle obstrue mes poumons et me fait trembler.
Mon père a failli mourir. À cause de moi.
— Vous avez tous les deux survécu, c'est un miracle.
Survécu ? Non, je ne pense pas. Je pense que je suis morte cette nuit, alors que ma maison prenait feu et que mon père était bloqué sous la charpente.
Je pense que je ne pourrais jamais vivre à nouveau alors que l'odeur de la mort est devenue une odeur que je connais.
