Chapitre 26 - Val

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Je marche vivement vers la voiture, l'esprit en ébullition. 

Trop d'indices se sont accumulés devant moi. Le fait que James ait mal au bras, qu'il connaisse le prénom et le journal de Keysha, l'intuition avérée qu'Haylee sait quelque chose... ce même quelque chose pour lequel Keysha et Céline et peut être ma mère sont mortes... et maintenant il me faut retourner là où tout a commencé. 

Je tiens presque toutes les pièces du puzzle, mais il me manque encore le moyen de les assembler. 

Perdue dans mes pensées, je manque de passer à côté de la voiture. Mon père fronce les sourcils mais ne commente heureusement pas mon étourderie. Il doit la mettre sur le compte du stress de m'être retrouvée cernée d'adultes inconnus pendant une bonne heure. Je prends place sur le siège passager, en songeant au fait qu'il faudra bientôt passer la conduite accompagnée. Enfin, ce sera possible seulement si mon père ne se fait pas arrêter pour des crimes qu'il n'a pas commis. 

Il faut à tout prix que je prouve la culpabilité de James Mikkaelson. 

Mais ça, ça signifie travailler contre Jenny. 

Je repense à l'oncle et la nièce. Ces deux là entretiennent une relation étrange. Je n'ai jamais bien compris si ils étaient aussi proches que des frères et sœurs ou si ils étaient bien plus que ça. Je pencherai plutôt pour la deuxième situation, après les avoir côtoyés en action. Jenny reproche à Perez d'avoir une attirance malsaine pour ses élèves filles, mais James n'est pas tellement mieux. Lui, ce n'est pas seulement ses élèves le problème, c'est sa nièce et c'est presque plus grave. 

Manipulation, me souffle mon esprit de passionnée de psychologie. Il la manipule, sûrement depuis petite, pour arriver à ce résultat. 

Une lumière s'allume d'un coup dans ma tête. Voilà la solution pour que Jenny revienne de mon côté! Il suffit de lui prouver, tout comme elle veut me prouver que mon père est un salopard, que son James adoré est aussi dangereux que Jacques! 

Très fière de mon idée, je farfouille dans mon sac pour trouver un papier et un crayon et en faire un plan. Interloqué, Perez me glisse un regard étonné tout en conduisant.

— Tu révises pour la prochaine évaluation de physique? 

— Non, je fais un super stratagème pour sauver Jenny des griffes d'un prédateur, je réponds en griffonnant un début de plan. 

Un éclat de rire moqueur accueille ma déclaration pourtant sérieuse. 

— Encore tes Wendigos et tes skinwalker? Grandis un peu, Val. Ça n'existe pas. Concentre toi plutôt sur des choses réelles. Tiens, par exemple, tes cours de sciences si tu ne veux pas que ta moyenne en prenne un grand coup. 

Vexée, j'appuie un peu plus que nécessaire sur mon crayon, dont la pointe traverse le papier. Je décide de ne pas relever et me contente de continuer mon plan tout en me défendant:

— Le therme général est « cryptids », le pluriel de Wendigo est Wendigowak. Je parlais d'un vrai prédateur, pas d'une créature. Et enfin je ne vois pas le problème à me perdre dans mon univers, à n'importe quel âge. 

— Le problème, Valencía, c'est qu'à force de te perdre dans les nuages tu auras de plus en plus de mal à en redescendre. Je dis ça pour ton bien. Je ne tiens pas à ce que ma dernière enfant termine morte ou séquestrée. Je ne serai pas toujours là pour te protéger. Il faut que tu apprennes à te défendre seule, et tu ne pourras jamais y arriver si tu restes dans tes illusions d'enfant. Fais un peu attention à comment sont les autres, ça te sortira de nombreuses impasses. 

— C'est vrai que tu as toi même très bien fait attention à comment sont les autres, je réplique agacée. C'est pour ça que tu n'as jamais rien fait contre Jacques et que tu n'as jamais repéré l'idée de maman de s'ôter la vie. 

Éducation mortelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant