Chapitre 30 - Bal royal

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Se tenant dans un coin de l'atelier, Richa écoutait Farr'än et Sirul s'excuser en chœur de leur retard.
La nuit était tombée sur le palais Vervaïl, c'était à présent le lustre aux sphères colorées qui éclairaient la pièce, les invités commençaient à arriver dans la salle de réception à laquelle Lalïl, qui attendait avec elle, devait la conduire, et sa robe n'était apparemment pas encore prête.
Lorsque la jeune fille était arrivée dans l'atelier, après avoir passé la journée avec Yennaël à la bibliothèque, où Rukménire les avait rejoints pour quelques heures, elle avait découvert les deux tailleurs royaux en panique.
Yennaël avait pu récupérer sa tenue mais la sienne avait encore besoin de quelques retouches. Richa les attendait s'agiter de l'autre côté de l'étagère qui les dissimulait, eux et sa mystérieuse robe.
Elle ne leur en voulait pas pour ce contre-temps. Au contraire, elle les remerciait mentalement de retarder ainsi son arrivée au bal et elle espérait que ces derniers ajustements prendraient encore de longues minutes, tout tant qu'elle arrivait le plus tard possible à cette maudite réception. Sans compter qu'il allait également falloir qu'elle se coiffe et se maquille, avec l'aide de Lalïl, puisque, comme elle ignorait à quoi ressemblait la robe, elle n'avait pu se préparer à l'avant. Autant de choses qui creusaient cet appréciable retard.
Malheureusement pour elle, les voix de Sirul et Farr'än lui annoncèrent à l'unisson que c'était terminé. Les épaules de la jeune fille s'affaissèrent dans son soupir.
Malgré son manque de motivation d'envie, elle contourna l'étagère pour rejoindre les deux tailleurs, ce qu'elle n'avait pas été autorisée à faire précédemment.
Les deux tailleurs encadraient un mannequin qui portait la robe dans laquelle Richa était censée déambuler ce soir.
La jeune fille n'avait jamais été attirée par tout ce qu'on appelait de manière stéréotypé les ''trucs de filles'' et encore moins par ceux de princesse mais elle devait néanmoins reconnaître que le travail incroyable des deux tailleurs forçait à l'admiration. Non seulement à cause de la masse de travail que cette tenue représentait mais également à cause de la tenue en elle-même.
La jupe longue formait une traine de quelques centimètres à l'arrière. Le bas était d'un rouge sang soutenu qui s'élevait en lignes irrégulières en cédant peu à peu la place à un vert amande strié de fines et discrètes rayures verticales couleur or, argent, bronze, vert foncé, pourpre, blanc et bleu roi. Le corsage formait un bustier auquel directement intégré le large collier qui montait de la poitrine jusqu'au cou en s'étendant légèrement sur les épaules. Il représentait des dizaines de feuilles où se retrouvaient les mêmes couleurs que dans les rayures.
Un hêtre pleureur aux racines gorgées de sang, à l'écorce et aux feuillages parcourus de couleurs différentes, symbolisant un royaume aux origines tachées de sang mais qui s'élevait grâce à la diversité, sur un fond vert amande.
C'était le blason des Terres de Sang interprété sous la forme d'une robe que Richa avait sous les yeux. Elle en restait stupéfaite.
La main tendue, elle suivit la forme du bustier et le tissu doux glissa sous ses doigts.

« Alors ? Lança Farr'än. Sans vouloir nous vanter, je crois que nous pouvons dire que nous nous sommes bien débrouillés.

– Elle est superbe, complimenta Richa, mais ce sont...enfin, c'est les couleurs du royaume.

– Conformément au souhait de Monsieur Sarrion. Confirma Sirul.

– Allez, vous êtes déjà en retard, Mademoiselle. La poussa Farr'än.

– Parce que vous croyez que je suis capable d'enfiler un bazar pareil ? Si vous en doutez, je vous dis que la réponse est non. Prévint Richa.

– C'est pour ça que je suis là, moi. »

Sourit Lalïl en pressant amicalement l'épaule de Richa pour la rassurer, sachant qu'elle appréhendait grandement.
Sans perdre de temps, l'elfe retira la robe du mannequin, aidée par Sirul et Farr'än puis les deux jeunes femmes gagnèrent les appartements de Richa, avec également une paire de hauts escarpins à brides rouge sang.
Avec l'assistance de Lalïl, Richa passa la robe qui s'adapta parfaitement à ses courbes. L'elfe se chargea de nouer le laçage complexe qui fermait le bustier en se fondant parfaitement dans le vêtement.
Celui-ci se révéla plus confortable que ce que Richa redoutait mais il entravait néanmoins beaucoup plus ses mouvements que ses toilettes habituelles. Elle ne pouvait pas en dire autant des escarpins. Si elle parvint à trouver son équilibre dessus assez aisément en quelques secondes, comme si elle en avait déjà porté, elle eut mal aux pieds presque immédiatement.
Installée derrière la coiffeuse de la salle de bain, elle laissa Lalïl confectionna une large tresse plaquée sur le sommet de son crâne avec les mèches de côté de son crâne, dégageant son port de tête et ses oreilles effilées.
Ce fut également l'elfe qui choisit ses bijoux. La jeune fille dut se résigner à retirer les anneaux qui perçaient son oreille droite, à regret, pour les remplacer par de discrètes perles blanches sur chaque lobe. Le collier intégré à la robe étant déjà suffisamment imposant, il valait mieux éviter les bijoux trop voyants. Ce fut pour la même raison que la tiare dont Lalïl ceignit son front était simple elle aussi. Il s'agissait d'un cercle d'or plat qui ne faisait que les deux tiers de son front.
Pensant que c'était terminé, Richa alla pour se lever mais Lalïl la força à se rasseoir en lui signifiant qu'il y avait encore le maquillage, ce que la jeune fille avait oublié. Pourquoi fallait-il que toutes ces préparations soient si longues ?
Grommelant tout bas, Richa s'efforça de prendre son mal en patience pendant que Lalïl sélectionnait les produits à utiliser sur le visage de la jeune fille. Elle le recouvrit d'un voile de poudre de la même teinte que sa carnation comme base puis elle en utilisa une autre plus rosée, sur ses pommettes. Ses paupières se virent habiller d'un discret fard argenté terminé par un trait noir se ponctuant d'une pointe au ras de ses cils noircis de mascara, plus par principe que car il y en avait véritablement besoin. La touche finale fut la laque rouge sang sur ses lèvres.
Richa observa son reflet que lui renvoyait son miroir, la tête légèrement penchée sur le côté, circonspecte. L'image était belle et séduisante mais Richa ne se reconnaissait pas en elle.
Se tournant vers Lalïl, qui rangeait la coiffeuse, elle s'enquit avec une petite incertitude :

Le Souffle de Kaëv'ah - Tome 4 : L'Héritage du Sang [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant