Chapitre 12

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Anaé


Quelles étaient les probabilités pour que, dans un château aussi immense que celui-ci, dans lequel je n'ai eu de cesse de me perdre ces trois derniers jours, Sa Majesté le roi soit celui qui m'ait entendue répondre comme une charretière à ses hommes ?

Bon, d'accord. Elles étaient hautes puisque que nous sommes dans son château.

— Votre Majesté, s'inclinent les gardes, à mon instar.

Je suis foutue.

C'est impossible qu'il n'ait rien entendu.

Et pourtant, la chaleur dans sa voix et le sourire amène qu'il arbore s'opposent à tout ce à quoi j'aurais pu m'attendre d'une réaction de sa part.

— Nous nous apprêtions à entrer, continue-t-il. Anaé, ma chère, pourquoi ne pas vous joindre à nous ?

— Je... J'en serai ravie, répliqué-je en me redressant.

— Après vous.

Les gardes s'écartent aussitôt, les joues toujours aussi rouges. Pendant que je pénètre dans la pièce, je leur offre mon plus beau sourire et leurs mines renfrognées pourraient être la nouvelle image qui émerge lorsque je pense à une victoire. Le roi et son second me suivent dans le clair-obscur de la salle.

— Se perdre dans ce dédale de couloirs peut être effrayant, mais je présume qu'il n'en est rien pour vous, soupçonne le roi.

Je pince les lèvres une seconde seulement avant de m'avouer vaincue :

— Vous m'avez démasquée.

Un rire léger s'échappe de ses lèvres, le même qu'au petit-déjeuner que nous avons partagé.

— Savez-vous qui était aussi du genre à fureter ? Dastan. Sauf que sa curiosité le poussait le plus souvent hors des murs du château. Je suis certain qu'il croit, encore aujourd'hui, que sa mère et moi ne savons rien de ses petites escapades secrètes. Si je n'étais pas au courant de ses tendances à fuir le palais, Jazéphine n'aurait jamais été prompte à le laisser faire.

La lueur qui scintille dans ses yeux me fait chaud au cœur. Je croyais déjà Dastan quand il m'assurait que ses parents sont aimants, mais chaque jour, j'en ai la preuve sous les yeux.

Je lui réponds par un sourire de la même teneur que le sien, puis il me désigne l'intérieur de la pièce, dans laquelle la lumière jaillissant des fenêtres chasse enfin la pénombre qui y régnait et me dévoile un fabuleux décor.

— Soyez la bienvenue dans la salle du trône.

J'en reste pantoise.

Devant moi se dressent deux magnifiques statues en pierre de lune. La première est une femme. Un diadème en forme de croissant de lune orne son front. La deuxième représente un homme qui porte une auréole de rayons solaires autour de la tête. Ils se font face, la main gauche soutenant le plafond aux moulures quintessenciées et aux corniches alambiquées, et se tendent la main droite l'un vers l'autre.

— Ce sont...

— Séléné et Hélios. Les dieux créateurs d'Asteria.

Mais la beauté de la pièce ne s'arrête pas là.

Sous le dais et ses épais rideaux de velours bordeaux aux volutes dorées et aux motifs astraux et floraux, s'élèvent cinq marches et une estrade qui mènent tout droit à deux sièges somptueux taillés avec finesse, malgré leur imposance. L'un est surmonté de l'astre du jour ; l'autre de l'astre de la nuit – symboles d'Asteria et de son histoire : les trônes du Soleil et de la Lune.

Asteria : L'Héritage des AstresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant