Chapitre 14

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Anaé


Calathi nous a peut-être dévoilé le véritable but de ses cours, les séquelles de ses exercices, elles, ne m'épargnent pas. Ma nuque est si raide que j'ai cette folle impression qu'elle ne supportera plus ma tête pendant très longtemps.

Contre toute attente, la femme que je pensais être une vipère s'est avérée plutôt agréable. Non sans son ironie, elle expliquait les choses avec tact et fermeté, mais ses conseils en valaient la peine. Elle nous a même félicitées pour nos efforts à la fin de la leçon. J'étais tellement absorbée par mon apprentissage que je ne me suis pas du tout attardée sur Hélicie, dont la présence à ce cours me rend follement curieuse. Mais chaque fois que je souhaite faire connaissance, je m'aperçois qu'elle a déjà filé comme le vent.

Je retourne à ma chambre reposer mon dos et ma nuque avant le dîner. Trois coups à ma porte me sortent de mon repos. J'autorise l'entrée à Jasmine et elle se rapproche du lit avec un sourire intrépide sur les lèvres.

— Comment s'est passé votre supplice, ma dame ?

La malice imprègne son jeune visage à mesure que je lui raconte le coup de théâtre de Calathi. Aussi, lorsque ses yeux brillent d'un trop plein d'éclat et que les coins de ses lèvres s'étirent beaucoup trop loin, je coupe court à ma narration.

— Tu étais au courant.

— Oui, et j'étais convaincue que vous ne tiendrez pas plus d'une journée. Votre désespérante retenue m'a fait perdre un pari très lucratif.

J'ouvre la bouche pour riposter, puis me ravise, mon sourire répondant à son espièglerie débordante.

— Petite créature vicieuse. Ravie de savoir que tous mes faits et gestes font l'objet de paris.

— Je vous arrête tout de suite, aucun membre de la cour astérienne n'est épargné par nos gageures, au cas où vos chevilles se mettraient à enfler.

— Bien fait pour ton argent. Ça t'apprendra à douter de moi.

J'ai bien envie d'en savoir davantage sur leurs petits jeux entre domestiques, mais même si cet échange est tout ce qu'il y a de plus amusant, pour moi comme pour Jasmine, je doute qu'elle soit disposée à me donner tous leurs tenants et leurs aboutissants. Il y a sûrement des secrets que je suis certaine de ne pas vouloir connaître. De toute manière, je suis trop épuisée pour la supplier de tout me déballer.

— Pourrais-tu m'apporter le dîner dans la chambre, s'il te plaît ? Je ne suis pas sûre d'avoir suffisamment d'énergie pour sortir de mon lit.

— Arrivée depuis peu et déjà sur les rotules ? Ça ne présage rien de bon pour la suite, si vous voulez mon avis.

Je puise dans mes forces restantes pour lui décocher mon regard le plus noir, qui récolte pour réponse un sourire si aiguisé qu'on s'y couperait.

— À vrai dire, je venais vous informer que Son Altesse le prince vous attend à l'entrée du château.

Je jette un œil par-delà la fenêtre : le soleil va bientôt se coucher. Où veut-il m'emmener à cette heure-ci si ce n'est pour dîner ?

— Maintenant ?

Jasmine opine du chef. Malgré la fatigue qui s'accumule en moi, je me lève d'un bond. J'inspecte ma tenue et demande à Jasmine :

— Sais-tu où il m'emmène ?

— Pas cette fois.

— En es-tu certaine ?

Je plisse les yeux. Ils m'ont déjà fait le coup une fois, ils peuvent recommencer. Jasmine me voit l'observer suspicieusement et laisse échapper un éclat de rire.

Asteria : L'Héritage des AstresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant