Chapitre 27

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Anaé


Plongée dans l'air enjoué et entêtant sifflé par les oiseaux, j'arpente les couloirs du château avec une joie renouvelée. Cette proximité avec Dastan m'avait tant manquée. M'endormir blottie dans ses bras et me réveiller enlacée à lui. Sentir nos deux cœurs battre à l'unisson. Toutes ces sensations délaissées ces dernières semaines ont été décuplées cette nuit.

Puis ses révélations sur l'issue malheureuse du conseil m'ont donné la motivation de me battre pour parvenir à la tête de ce royaume. Après l'annonce du roi, ma place est peut-être acquise, malgré les quelques réfractaires. Et même si après ma prodigieuse apparition au bal d'hier, nombreux sont les courtisans qui ont vu leur image de moi changer, je me sens d'autant plus prête à persévérer pour montrer à la terre entière de quoi je suis capable. Que j'en suis capable.

La fête s'est peut-être terminée tard, mais c'est comme si le palais entier s'était levé à l'aube. De nombreux serviteurs traversent les couloirs, les bras chargés d'éléments de décoration, de plateaux vides et de tissus entremêlés les uns aux autres. J'imagine qu'il faut rendre à la salle de réception son aspect originel le plus tôt possible.

Je sais toutefois que la reine ne raterait pour rien au monde le petit-déjeuner, et qu'elle m'y attend aussi par la même occasion.

Un bourdonnement supplante soudain le bruit de mes pas sur le sol dallé et la mélodie guillerette qui résonne dans ma tête, comme une conversation mal chuchotée au détour du couloir. Je m'approche un peu plus de la source lorsque je reconnais un timbre familier depuis peu et un autre qui m'est totalement inconnu.

C'est Eudora avec... Avec qui, d'ailleurs ?

Je ralentis l'allure, plaque le dos contre le mur et tends l'oreille.

— Pourquoi être venu jusqu'ici, pauvre imbécile ?!

— Vous... vous avez ordonné de vous tenir au courant dès que les choses évolueraient, bredouille la voix masculine.

— Pas au point de me suivre à la Capitale des Astres, sombre crétin !

— Mais... ils sont prêts, Votre Altesse. Ils attendent vos o...

— Ne dis pas un mot de plus !

La virulence de la princesse est en totale opposition avec l'attitude sereine, angélique et appréciable qu'elle affiche depuis le premier jour.

— Très bien, tu vas m'écouter attentivement, chuchote-t-elle tellement bas qu'il me faut retenir ma respiration pour pouvoir l'entendre. Tu vas te diriger immédiatement jusqu'au carrosse qui part ce matin pour Amerald. Débrouille-toi pour que le cocher pense que tu fais partie du voyage.

— Mais, Votre Altesse...

L'homme s'interrompt brusquement, puis bafouille des excuses sans que je ne parvienne à comprendre le reste de ses paroles.

Je longe un peu plus le couloir pour me rapprocher d'eux mais leur échange ne se limite plus qu'à des chuchotis indescriptibles.

— Sais-tu que c'est très mal d'écouter aux portes ? énonce une voix féminine au creux de mon oreille.

Je sursaute, les lèvres crispées et pivote sur moi-même. Yvelta me dévisage, un sourire taquin vissé sur les lèvres. Son intérêt pour la situation déborde de ses yeux gris.

— Alors, qui est-ce que tu épies ?

À quoi me servirait de mentir ? Je ne suis pas très doué pour ça de toute manière. Je pose une main sur ma poitrine, comme pour aider mon cœur à retrouver un rythme régulier.

Asteria : L'Héritage des AstresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant