Sur un coup de tête - Avatar (Neteyam) [𝐄𝐍 𝐏𝐀𝐔𝐒𝐄]

54 - Pente glissante

Assise sur un tronc d'arbre devant le feu, à côté de Lief'aa, je prête à peine attention aux discussions et à la bonne ambience qui règne autour de moi. Totalement indifférente au petit monde qui m'entoure, je garde les yeux rivés/focalisés sur la pierre de Yoa've. Le regard presque flou et hyptnotisé par les jolis reflets nacrés, je ravale mon affliction, perdue dans les sombres méandres de mes pensées.

— Qu'est-ce que c'est ?

Je relève brusquement la tête dans un sursaut, et avise Neteyam, assit à ma gauche. Pourtant la dernière fois que j'ai posé les yeux sur lui, il était à quelques mètres de l'autre côté du foyer, en face de moi.

Je ne l'ai même pas vu arriver.

Un moment de latence me saisit et je bugue légèrement avant de me ressaisir et de lui répondre, bafouillant légèrement.

— Oh, ça, euh...

Du coin de l'œil je vois Lief'aa cesser de parler avec Ma'rou et me lancer une œillade que je devine sans peine perplexe.

Neteyam doit comprendre que le sujet est sensible car il se rattrape :

— Tu n'es pas obligée de m'en parler, dit-il plus bas, c'est juste que je t'ai souvent vue avec quand tu semblais au bord du gouffre. Et les fois où tu t'étais au point de commettre l'irréparable, tu ne l'avais pas.

Le fait que Neteyam ait vu tout ça me fout un sale coup au cœur. J'ignorais qu'il avait assisté à tant de mes vaines tentatives d'en finir avec ce monde. Pourtant je pensais que la seule et unique fois était celle où il m'a justement sauvée, dans le laboratoire de Bridgehead, en tirant une flêche sur la fiole de cyanure que je m'apprêtais à ingérer. Ah non, il y avait aussi celle où j'ai essayé avec le pistolet, c'est vrai. Quand je me suis enfermée dans ce cagibi, et qu'il m'a retrouvée en pleurs, plus lâche que jamais.

Ces fois-là, la colère sourde qui grondait en lui m'a toujours heurtée de plein fouet et aussi questionnée. S'est-il dit que je n'étais qu'une pauvre merde incapable de faire face à ses choix ? Rien qu'un démon parmi tant d'autres coincé dans un corps Avatar défaillant ?

Voyant que je ne réponds pas, il ajoute plus doucement :

— Je comprendrais si tu ne veux rien me dire. Mais j'aimerais vraiment...

Puis-je lui refuser des explications alors qu'il m'a sauvée de la mort ? Je ne pense pas.

— Pas ici, dis-je.

— OK.

Après un court instant, je me lève, serrant la petite pierre plate dans mon poings, et me dirige vers le chemin bordant la mer, longeant par la même occasion l'orée de la forêt tropicale.

Je me retourne en constatant que Neteyam ne me suit pas, et hausse un sourcil à son attention. Il ferait mieux de se dépêcher, mon courage ne fera pas long feu.

Devinant que je compte bel et bien lui révéler le secret de ce bijou et que je souhaite qu'il me suive, le jeune Na'vi affiche une expression étonnée, se met debout d'un bond et me rejoint rapidement alors que je me mets à marcher.

Je n'ai cure des regards curieux et interrogatifs qui se posent sur nous. Ils peuvent bien s'imaginer ce qu'ils veulent, sur le moment cela m'est bien égal.

Neteyam me rattrape bien vite, et se place à ma droite. Il est si proche que nos bras se frôlent à chaque mouvement. Je déglutis, perturbée par cette proximité.

Quand je songe qu'au début il refusait de se tenir trop près de moi...

La gorge serrée par les réminescences de ces mauvais souvenirs, je continue de marcher en silence. Neteyam ne dit rien non plus, ne me presse pas, respecte mon mutisme. J'ai toujours trouvé sa maturité appréciable.