106 morts.
C'est le nombre d'Eyapatis tombés sous les mitrailleuses de la RDA. Un clan tout entier décimé, hommes, femmes et enfants, y compris des nourrissons. Aucune pitié ne leur a été accordée.
La nouvelle a plongé le récif entier dans un profond désespoir. Je sens en chacun de nous une rage sourde qui ne demande qu'à se réveiller. Les discussions ne tournent plus qu'autour de l'ennemi et de la revanche qui anime le clan.
Afin de constater l'ampleur des dégâts, nous nous sommes rendus sur les lieux du drame. J'ai exceptionnellement eu l'autorisation d'accompagner les Metkayinas au village des défunts Eyapatis, dont les dépouilles traînent tristement sur le sable, à la surface de l'eau et dans les vestiges calcinés des anciens maruis.
C'est le cœur serré que je déambule aux côtés de Ma'rou et Ca'horan dans ce qui reste du village rongé par les flammes meurtrières. Du sang, des blessures, des corps sans vie par dizaine s'étendent sous nos yeux apitoyés. C'est bien la première fois de ma vie que je fais face à un tel carnage. Et pourtant, ce ne sont pas les cadavres giseant les rues de Terrapolis qui manquent sur Terre.
Ce sinistre tableau ne me rappelle que trop bien les tueries terriennes, et que ce qui se passe sur ma planète d'origine est devenue une réalité dans un monde qui était de base exempt de cette forme de violence. Cela me fait prendre davantage conscience que nous entrons dans une ère difficile sur Pandora, et que nous devrons suer et nous battre corps et âme pour survivre au calvaire que les humains s'apprêtent à faire régner en ces lieux.
Je me mets à trembler en apercevant les corps brûlés et mutilés d'une famille, dont les corps s'enlaçaient dans une dernière étreinte avant de mourir. Je peux deviner la peur sur leur visages déformés et mangés par les flammes. Et dire que ces gens ne pourront pas connaître et poursuivre leur vie future comme ils l'auraient dû.
Ils sont morts sans préavis, ont péri sans la moindre pitié. Ils n'ont pas connu une fin tranquille. Ils n'auraient pas dû partir si vite sans amour et douceur autour d'eux pour les accompagner dans leur dernier souffle.
Tous ces adolescents, ces adultes heureux, ces enfants insouciants...
... ils ne méritaient pas ça.
J'ai un haut le cœur en balayant le village du regard. Puis j'observe de loin les autres Metkayinas, pleurant au chevet des défunts. Je vois Tonowari et Jake, côte à côte devant une famille. Je devine, aux restes de vêtements et de parure, qu'il s'agissait de l'Olo'eyktan, la tsahìk et leurs trois enfants. Une famille décrite comme aimante, proche de son clan et respectueuse.
Une lourde perte dont le récif aura du mal à se remettre.
Un clan entier a disparu, et sans le moindre rescapé pour rappeler sa mémoire. Ils sont tous restés un par un pour défendre leur village envers et contre tout, prêts à y laisser courageusement la vie. Je n'ose imaginer l'effroi qu'ils ont dû ressentir, la douleur lente et sordide qu'ils ont dû éprouver, en sentant leur vie les quitter peu à peu sous le joug des flammes. Eux qui en toute une vie, n'avaient jamais connu telle abomination.
Je peux presque entendre les cris de ces âmes en peine errant sur les coquilles vides qui nous entourent, attendant de trouver un repos éternel dans les bras d'Eywa.
La nausée me monte à la gorge et je la réprime en inspirant dans mon coude, afin d'éviter les odeurs nauséabondes des corps en putréfaction de parvenir à mes narines.
D'un geste sec, je resserre le baillon qui protège mon nez des agressions olfactives, et poursuis ma progresion, dans l'espoir de découvrir un indice, tomber sur un message bien provocateur de la RDA.
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Sur un coup de tête - Avatar (Neteyam) [𝐄𝐍 𝐏𝐀𝐔𝐒𝐄]
Hayran KurguRevna était une jeune humaine travaillant comme enfant de ménage au sein des locaux de recherche et laboratoires affiliés à l'armée et à la RDA, sur Terre. Âgée d'à peine onze ans, lorsqu'elle pénètre pour la première fois dans une section qui lui e...