GABRIELLA
Mars 2023, New-York
Convoquée au commissariat, je presse le pas pour rejoindre l'établissement, esquivant les New-Yorkais qui courent aussi vite que moi sur les trottoirs. L'anxiété est à son paroxysme puisqu'Eddy n'a rien voulu me dire au téléphone. Il m'a simplement intimé de rappliquer au plus vite.
Je m'engouffre dans le poste de police où Finwick m'attend déjà, un air satisfait sur son visage rabougri. Derrière lui, Eddy m'observe avec une mine désolée qui ne m'indique rien qui vaille.
— On ne vous attendait plus, peste le policier.
— Finissons-en, je réplique.
Le policier me guide jusqu'à son bureau, bien que je connaisse la route par cœur. Il s'installe dans le même fauteuil que le jour où il m'avait balancé toutes ces informations infâmes sur La Meute, ce même jour où il avait tenté de me corrompre.
Il tambourine sur son clavier d'ordinateur puis presse le bouton de l'imprimante pour faire sortir quelques photos qui, tout à coup, me font sursauter d'effroi.
— Votre cher client a été attaqué dans sa cellule, hier, par trois hommes.
Je ne peux que constater les dégâts causés sur le visage habituellement angélique de mon petit ami. Sur ces photos qui s'apparentent à un film d'horreur, sa figure tuméfiée n'a plus rien d'humain. Seuls ses yeux bleus transcendent l'image, sinon je ne l'aurais probablement même pas reconnu avec sa lèvre fendue et ses yeux si gonflés qu'on pourrait croire qu'il a été attaqué par un essaim d'abeilles affamées.
— A-t-on identifié les responsables ? je demande, la voix tremblante.
— Une vague affaire de gang. Probablement des membres de l'Épine. Encore des affaires bien honnêtes, ironise le brigadier.
— Il faut le transférer !
Finwick ricane, ce son infernal résonnant dans mes oreilles comme des ongles sur un tableau noir.
— Bien sûr, et pourquoi pas le libérer aussi ?
— Vous n'êtes pas supposé garantir la sécurité des individus ?
Mon ton se veut chevaleresque, je défie Jeremiah, mais il ne tombe pas dans mon piège et se contente de me répondre d'une voix plate.
— Je garantis la sécurité des citoyens honnêtes. Je ne suis pas partisan de protéger ceux-là même qui mettent en danger la population.
Sans un mot ni un brin de considération pour la pourriture qui me fait face, je me lève et quitte le bureau sans cérémonie. J'entends le brigadier m'interpeller, mais je suis aveuglée par la rage, galvanisée par cette haine que je nourris pour cet homme abject qui n'a de cesse de démontrer à chaque fois un peu plus quelle ordure il est.
Les avocats ne sont pas toujours du bon côté de l'histoire. Parfois, ils sont obligés de défendre des hommes qui mériteraient de passer leur vie derrière les barreaux, voire pire. Dans ces cas-là, le mot d'ordre est la garantie des libertés fondamentales d'un être humain. On ne parle plus de personnalité, mais d'humain au sens large. Et aucun avocat ne doit bafouer ces droits et libertés qui s'exercent pour quiconque, même les hommes les plus vils.
Je suis toujours dans un état second lorsque je rejoins l'extérieur du bâtiment, hermétique au froid qui fouette mon corps. J'allume rageusement une cigarette, faisant les cent pas pour tenter de dégager une idée de mon esprit embrumé par les récentes informations. Mais rien n'y fait, la peur entrave mon bon sens et je me retrouve acculée par la crainte que la prochaine fois, Nate meurt sous les coups.
M'éloignant de quelques pas, je tourne finalement au coin de la rue pour gagner une artère moins fréquentée et faire taire le brouhaha ambiant qui n'arrange rien au capharnaüm de mes pensées.
Soudain, un homme se glisse derrière moi à la vitesse de l'éclair, et tout ce que je sens, c'est une odeur nauséabonde semblable à de l'éther.
Du chloroforme.
Et je tombe, inconsciente.

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LA MEUTE
RomanceGabriella et Nate filent le parfait amour lorsqu'un jour, ce dernier disparaît mystérieusement des radars ne laissant qu'un simple post-it sur le réfrigérateur. Quatre ans plus tard, bien que Gabriella ait réalisé son rêve de devenir avocate, sa vie...