La Mélodie des Plumes - Tome 1

Chapitre 10 : Secrets enfouis

— Aucun contrôle vraiment. Allez, fais un effort.

Elune se reconcentra tant bien que mal. Depuis le levé du jour, Orlyë l'obligeait à se soumettre à l'entrainement le plus éreintant qui soit. Comme annoncé, un Maglien de l'Esprit s'était joint à lui. Dès lors, il s'acharnait à accentuer chaque émotion ressentie par la jeune fille. Chacune d'entre elle était passée au crible. La tâche d'Elune était simple. Elle devait dominer l'émotion qui la prenait. Mais jusqu'à présent, elle n'était même pas parvenue à faire quoi que ce soit. Dès que le Maglien s'attaquait à une de ses émotions, celle-ci jaillissait d'elle et éclatait au grand jour.

— Allez ! Un tel manque de contrôle n'est pas digne d'une Maglienne ! reprit Orlyë d'un ton cassant.

— Je n'en suis pas une ! explosa Elune sans même chercher à se contenir. Vous le savez très bien ! En fait, vous vous en tapez ! Vous voulez juste en profiter pour vous défouler !

Le Maître du Temps leva une main. L'autre Maglien abaissa ses mains. La lumière rosée qui l'entourait, lui et son Artefact, s'éteignit. La colère d'Elune reflua la laissant complètement vidée. Elle tomba à genoux, le souffle court. Après la peur, la tristesse, le malaise, la surprise, l'anxiété et le dégoût, la colère l'avait achevée. Elle ne parvenait plus à discerner ses propres ressentis de ce que créait l'autre en elle.

— Voilà qui est nouveau, commenta Orlyë glacial. Tu n'en es pas une ?

Elune fit non de la tête, trop épuisée pour répondre.

— Debout.

L'ordre claqua. Elune se releva. Son tortionnaire lui empoigna les poignets. Une décharge la traversa à son contact.

— Pas une, hein ?

Si son regard avait pu la poignarder, il l'aurait sans doute fait. Elune ne répliqua pas.

— Tu vas voir si tu n'en es pas une.

Sa poigne se resserra autour du bras de son élève. Elune poussa un petit cri de douleur.

— Tu vas te mettre dos à la maison, tendre ton bras et dire staka. Tu as bien entendu ? Staka.

Il la lâcha. Elle se tourna. Au bout de l'île, un arbre se dressait. Ses branches arboraient de magnifiques fleurs. Ses feuilles d'un vert tendre ne semblaient pas souffrir de la sécheresse qui prenait les terres eyliennes. Elune leva son bras.

— Staka, marmonna-t-elle.

Rien ne se passa.

— Recommence, ordonna son maître. Et plus clairement.

— Staka.

Rien.

Orlyë se planta à côté d'elle plus froid et raide que jamais.

— Mets-y de la volonté. Oublie tes préjugés. Dis-le comme si tu y croyais vraiment.

Le bras levé devant elle comme si quelque chose allait se passer, Elune se sentait idiote. Les deux Magliens l'observait.

— Je vous dis que... reprit-elle excédée.

— Fais le.

Si l'unique façon de leur prouver qu'ils avaient tort était de se ridiculiser, elle devait s'y plier. Elle ferma les yeux et se concentra.

— Staka !

Une décharge d'énergie la traversa. Un éclair surgit de nulle part frappa l'arbre. Elune tomba à genoux. Ses dernières réserves d'énergie venaient d'être réduite à néant. Elle fixa ébahie le tronc abattu.