A l'aide d'une spatule en bois, Sainteté grattait le fond d'un bol en céramique. La pointe de la spatule était enrobée d'une pâte grise parsemée de pointes vertes dont émanait une forte odeur de fleur. Elle en huma le parfum, puis frotta la spatule contre le bord de sa bourse. Il ne restait qu'une fine couche résiduelle de la pâte grise dans le bol.Ravie, Sainteté approcha sa bourse de la fenêtre aux vitraux colorés. Les rayons du soleil jouaient sur les motifs fleuris des vitraux, créant une aura mystique dans la paume de sa main pâle où reposait cette petite bourse en cuir. Les joues de Sainteté se rosirent en admirant sa première création alchimique.
En se servant du baume de Selyne elle avait reproduit une version bas de gamme d'un baume empêchant le sommeil. Maintenant il lui suffisait d'en appliquer régulièrement et si le marquis tentait de lui faire boire une potion, elle serait à même de résister à l'effet. Du moins elle l'espérait. Elle attacha la bourse à la cordelette qui resserrait sa taille par-dessus sa robe blanche.
Du bout du doigts, elle frotta le fond du bol et étala le baume juste sous son nez. L'odeur fleuri emplit ses narines.
Soulagée, elle se laissa tomber dans son lit, ses yeux chocolat fixant le plafond. Sa chambre n'avait rien d'extravagant, étroite, des murs blancs et une étagère à moitié vide. Peu meublée, le détail anodin de cette pièce était son entrée. Un carré dans le sol menait à un escalier avec une porte.
Si elle n'avait pas appliqué ce baume, elle se serait certainement assoupie. Pour la première fois depuis des semaines, elle se sentait sereine.
Lorsqu'elle entendit des voix lointaines, émanant du jardin, elle se redressa et tendit l'oreille. Des jurons. Des hommes hurlaient des jurons dans le jardin de Sermethril. Insolite.
Elle bondit hors de son lit et ouvrit la fenêtre avec fulgurance. Un soleil éblouissant ravivait les couleurs du jardin. Juste sous la tour, les feuillages des arbres lui dissimulaient l'allée principale. Elle n'entendait que les voix de deux hommes semblant se battre.
—Tiens le mieux que ça ! Mais aidez nous ma parole vous êtes payés à quoi à Sermethril ?
—Cessez vos jérémiades !
Sainteté recula d'un pas en reconnaissant la voix grondante du marquis.
—Aidez-les et suivez moi.
Les yeux de Sainteté brillèrent de curiosité. Le marquis avait reçu quelque chose de lourd à porter. Certainement la suite de son plan. Guidée par sa curiosité, elle ferma la fenêtre, se chaussa, se ganta puis se recouvrit de son voile avant de dévaler les escaliers de sa tour.
Collée à la porte du bureau du marquis, elle fronça les sourcils. Pas une voix ne lui parvenait à travers la porte. Doucement, elle l'entrouvrit et y jeta un couo d'oeil. Personne. Après avoir attendu quelques instants elle se résigna à l'évidence. Personne ne viendrait, la cargaison devait être destinée à une autre pièce. Serait-ce une nouvelle relique ? L'idée de traverser le couloir des reliques lui donna la chair de poule mais la peur de rater la suite du plan du marquis à son encontre demeurait plus grande.
Déterminée, elle ferma la porte et déambula dans les couloirs en longeant les murs jusqu'à atteindre l'escalier secondaire, le seul qui menait aux couloirs des reliques. Elle grimpa l'escalier en colimaçons avec appréhension. Une fois arrivée à l'étage des reliques, elle hésita. Aucune fenêtre, ce couloir étriqué et tortueux s'étendait dans le cœur du domaine. Des torches perçaient la pénombre mais sous son voile Sainteté ne contemplait que des tâches orangées et un couloir obscure.
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Les Douze
FantasyUn siècle que plus une âme ne ment en Atleia. Car mentir revient à briser l'une des Douze et quiconque y déroge est damné à se transformer en démon. Malgré tous les efforts mis en place par la Couronne et l'Eglise pour organiser le pays autour des...