Avec son bois clair dénué de peinture, la calèche semblait briller sous la lueur vive du soleil, contrastant avec la muraille noire qui encerclait la cour du château d'Ostrigh. Le véhicule n'avait pas pâti des événements de la tour et deux chevaux en bonne santé y avaient été attelés.
Assis à l'avant de la calèche, Henson les salua d'une main en relevant son béret. Il se tenait prêt à démarrer. Sans savoir quoi lui dire, Merychel lui fit simplement un signe de tête avant de grimper dans la calèche.
—Ah !
Peu habitué par sa grande taille, il avait heurté son front dans le haut de l'embrasure de la portière.
—Votre Altesse ? s'inquiéta Henson.
Merychel grimaça en frottant son front. Il ne sait pas...
Sans insister, Merychel s'engouffra dans la calèche en prenant soin de baisser sa tête. Adrienne s'empressa de s'asseoir à ses côtés et Irimel s'installa sur la banquette en face, seul.
Les roues grincèrent et la calèche remua, dévalant le chemin de terre qui quittait le château d'Ostrigh.
Craignant d'apercevoir cette "maudite tour", Irimel évitait d'observer les alentours ensoleillés et baladait son regard à l'intérieur de la calèche. Face à lui, Adrienne répétait l'étiquette de Sermethril que Merychel écoutait avec attention. Plus que l'étiquette, il la questionnait sur le comportement qu'avait Albarath avec ses cousines.
Comme convenu il avait fait des efforts sur son apparence. Les traits rouges sur sa peau pâle laissaient deviner l'épreuve délicate qu'avait été son premier rasage. Sa coiffure, propre et bien peignée, révélait sa cicatrice qui partait de son sourcil à son cuir chevelu. Un détail qui fit plisser les yeux d'Irimel car il dévoilait une autre attention : Merychel essayait de se démarquer d'Albarath. Impossible avec son visage. Irimel grogna en sentant des plumes le démanger dans sa nuque.
Il évita de regarder Merychel durant le reste du trajet. Préférant balader son regard dans le bleu clair de la robe d'Adrienne où ses cheveux châtains tombaient tel une cascade.
Partis en début d'après-midi, il avait été décidé de faire un arrêt dans une auberge pour éviter d'arriver à Sermethril en soirée. Ce qui paraissait, selon les propos d'Adrienne, comme un "manque de respect" qui risquait de fâcher le marquis.
Ils passèrent la nuit dans une auberge au nord de la Baronnie de Clusette. Une nuit calme sans autre incident que le lit vide d'Irimel. Ses compères n'en dirent rien. Pourtant lorsque le sorcier s'éveilla de ses cauchemars habituels, sa main droite endoloris, il n'avait d'yeux que pour ce lit vide. Les démons n'ont pas besoin de sommeil ? Il n'avait pas vu Irimel manger ou boire non plus depuis sa transformation. Mais son absence dans son lit ne suffisait pas à prouver la théorie du sorcier. Il préfère peut-être m'éviter.
Ils retrouvèrent Irimel dans la matinée lorsqu'ils reprirent leurs places respectives dans la calèche pour la suite du trajet.
Une longue tresse basculait sur l'épaule d'Adrienne au rythme des secousses du véhicule tandis que Merychel lui enroulait une bande autour de la main gauche.
—Si tes sœurs connaissent ton visage, elles risquent de te dénoncer à ton père, non ? demanda Merychel.
—Je croyais qu'elles t'avaient aidé à fuir ! dit Irimel avec confusion.
—Il n'y a que Selyne que je crains. expliqua Adrienne. Mais elle ne devrait pas me dénoncer si elle veut garder son palefrenier secret..
Affalé sur la banquette en face, les bras croisés, Irimel fixait avec curiosité la marque violacée d'Adrienne que Merychel recouvrait d'une bande jaunâtre.

VOUS LISEZ
Les Douze
FantasiUn siècle que plus une âme ne ment en Atleia. Car mentir revient à briser l'une des Douze et quiconque y déroge est damné à se transformer en démon. Malgré tous les efforts mis en place par la Couronne et l'Eglise pour organiser le pays autour des...