Les Douze

Chapitre 6 [1/3]

Des nuages gris obscurcissaient le ciel en ce début d'après-midi. Debouts contre la calèche royale, Irimel et Adrienne restaient silencieux. L'un portait son long manteau noir par dessus une chemise et un pantalon propre. L'autre était vêtue d'une robe vert pâle qui remontait jusqu'à son cou où une longue natte ondulait doucement sous la brise. Elle avait pris soin de conserver sa cordelette avec sa bourse à la ceinture.

La porte de la maisonnette s'ouvrit brusquement et Merychel en surgit. Son gilet bleu clair, taché de terre et déboutonné, flottait dans l'air alors qu'il avançait d'un pas énervé. Il s'élança vers la calèche suivi par Albarath dont le visage était déformé d'un rictus de colère.

—Pourquoi tu insistes pour garder ce vieux gilet ? Un jour tu seras bien forcé de t'en séparer !

En guise de réponse, Merychel termina de fermer son gilet en fixant le prince d'un regard de défi. Une fois fait, il ouvrit la calèche et se jeta sur l'une des banquettes. Voyant l'occasion idéale, Adrienne se dépêcha de se glisser à ses côtés.

Albarath tapa du pied tandis que les parents d'Irimel sortaient à leur tour.

—Vous y allez vraiment en calèche ? demanda Karel, dubitatif.

Albarath passa une main dans ses cheveux, manquant une mèche qui vint sur le coin de son œil et sourit.

—C'est pour la forme.

Les parents hochèrent la tête, esquissant un sourire forcé.

—Puisque vous partez pour le château d'Ostrigh juste après, nous vous souhaitons bon voyage. Soyez prudents.

Charlotta et Karel inclinèrent leur tête, puis touchèrent leur front d'une main avant de la placer, paume ouverte sur le cœur. Albarath et Irimel répétèrent le mouvement sous le regard curieux d'Adrienne.

—Que le vent marin guide vos pas et les flots vos âmes, souffla Karel.

Albarath monta suivit d'Irimel. La calèche commença à secouer et les roues grincèrent. Mais le regard confus d'Adrienne n'échappa pas à son cousin.

—Tu ne connais pas le salut des flots ?

Elle remua timidement sa tête dans la négative. A côté d'elle, Merychel prétendait ne rien entendre et fixait la fenêtre.

Albaraht bomba le torse en se penchant vers sa cousine.

—Ce n'est pas étonnant, seuls les rares encore fidèles à la couronne le font. C'est devenu célèbre lorsque le roi Philbert a salué ses fameux corsaires partis sillonner la mer après avoir proclamé l'ère du sel et le début de la piraterie en l'an 1425-

Irimel lui mit un coup de coude.

—Ne commence pas.

—Selyne fait ça aussi ! s'étonna Adrienne.

—Vomir des livres d'histoire en plein milieu d'une conversation ? rétorqua Irimel avec surprise.

—Oui.

—Oh c'est normal, répondit Albarath, un grand sourire aux lèvres. C'est notre jeu à elle et moi.

A peine avait-il parlé qu'Irimel et Adrienne avaient détourné le regard, comme si le simple fait de voir l'un ou l'autre les dérangeait. Le prince les dévisagea avec confusion.

—Oyez ! Oyez ! clama une voix à l'extérieur. La quatrième fille de Sermethril a disparu ! La quatrième fille de Sermethril a disparu !

Merychel chercha à croisa le regard d'Albarath qui opina.