Chacun vaqua à sa tâche.
L'un le long de l'eau gelée, l'autre en haut de la tour.
Irimel lutta avec la brume dont les formes qui se dessinaient au loin lui donnaient l'illusion d'apercevoir une potentielle barque à la place d'un rocher ou d'un buisson.
Le sang avait imbibé le gilet du sorcier et c'est en tremblant qu'Adrienne le déboutonna pour y glisser ses mains.
Lorsqu'Irimel réapparut en haut de la tour, Adrienne le découvrit recouvert d'un épais plumage qui gonflait sa chemise. Des plumes tapissaient son visage avec fouillis, rendant impossible de discerner son expression, mais ses yeux luisaient toujours d'une lueur rouge.
Adrienne s'empressa d'attraper sa main, puis elle lui présenta le carnet à la couverture ensanglantée et la cloche avec les empreintes rouges.
—Allons y.
Il se pencha vers le sorcier, referma le manteau et le prit dans ses bras. La tête aux cheveux frisés bascula vers l'arrière. Tandis que ses bras et ses jambes vacillaient au rythme des pas d'Irimel.
Ils descendirent en silence, ignorant une nouvelle fois les corps des deux alchimistes qui s'étaient fracassés au sol.
Une petite barque grise les attendait sur la rive, ainsi que l'un des sacs de toile qu'Irimel avait ramené de la calèche, dont l'intérieur avait été chargé d'une lourde pierre.
Il déposa le sorcier dans l'herbe et enroula une corde autour de sa taille à laquelle il accrocha le sac. Puis avec précaution, il le déplaça dans la barque qui grinça et remua sur l'eau. Il rajouta le sac chargé de la pierre et fut rassuré de voir la barque tenir. En guise de pagaie il n'avait qu'une planche qu'il cala près du sorcier avant de monter et de se tourner vers Adrienne. Il hésita puis lui tendit la main.
Celle-ci l'attrapa et monta avec lui. Chacun se plaça dans un coin de la barque, le sorcier étalé entre eux.
La barque glissa sur le lac au rythme de la planche d'Irimel qui remuait la surface. Un faible courant portait leur progression sur l'étendue d'eau glaciale. Au loin, Adrienne devina que le lac débouchait sur une cascade. Les flots le guideront.
Lorsque la tour leur apparut comme une forme indistincte dans la brume, Irimel déposa la planche dans la barque et attendit que l'embarcation s'immobilise. La barque continua de tanguer doucement vers l'avant mais Irimel fut satisfait, le courant restait faible.
Ils échangèrent un regard, une nouvelle fois, le plumage d'Irimel avait gonflé, mais Adrienne se tenait trop loin pour le toucher.
—On y est..
Sa voix sonnait plus rauque que d'habitude. Adrienne hocha la tête. Les doigts d'Irimel effleurèrent le manteau du prince, puis il glissa ses mains sous ses épaules et le redressa. Sous ses plumes, Adrienne ne percevait pas sa grimace, mais elle devina à son regard qu'il attendait qu'elle attrape les jambes du sorcier.
Comme lors de sa fuite de Sermethril, elle saisit ses jambes.
Ils le soulevèrent à l'unisson.
—Doucement, murmura Irimel.
Le sac chargé de la pierre demeurait dans la barque, un mouvement brusque et la barque se retournait.
Adrienne suivit son mouvement avec minutie, lentement le corps du sorcier s'enfonça dans l'eau. Ils prirent un instant pour se replacer, sans pour autant le lâcher. A moitié dans l'eau, le manteau du prince flottait autour du corps du sorcier. Irimel réussit à le tenir seulement d'une main pour attraper le sac dans l'autre. Puis il chercha le regard d'Adrienne, elle sanglotait à nouveau mais cessa en croisant ses yeux rubis.
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Les Douze
FantasíaUn siècle que plus une âme ne ment en Atleia. Car mentir revient à briser l'une des Douze et quiconque y déroge est damné à se transformer en démon. Malgré tous les efforts mis en place par la Couronne et l'Eglise pour organiser le pays autour des...