Chapitre 9 [4/4]

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L'odeur humide des marais envahissait leur narines alors qu'ils y progressaient à pieds. Les branches des arbres décharnés s'étiraient au-dessus d'eux comme de long filament de bois. Au milieu du chemin boueux, Mastel guidait la marche, suivi de près par Geoffrey avec Marylith sur le dos et Leonard avec sa brouette chargée de livres.

Aucun des deux ne manquait une occasion de se plaindre. L'un contestait la nécessité d'emporter les livres de la calèche royales, l'autre affirmait qu'une meurtrière ne méritait pas d'être portée. A leurs complaintes incessantes, Mastel se contentait de hocher la tête en silence, l'esprit occupé par les écussons des gardes qu'avait trouvé Karel dans les poches de la femme-medecin.

Écrasé par le poids de Marylith sur son dos, Geoffrey gémissait et grimaçait à chaque pas.

—Passer par les marais en voilà une idée saugrenue, souffla Geoffrey. Les dieux nous maudiront !

—C'est pas fini les superstitions vrymoises ? répliqua Leonard.T'as même pas un nom vrymois !

—Mes parents voulaient que je m'intègre facilement..

—T'as déjà vécu à Vrym au moins ?

Geoffrey sembla hésiter à répondre et gesticula pour remettre Marylith en place sur son dos. Ses cheveux blonds chatouillaient ses joues.

—Non, je ne suis jamais allé à Vrym. Mais j'ai hérité des valeurs ! Ne fais pas souffrir autrui ou ton âme en paiera le prix. Respecte les héros tombés car l'ombre de Shalirima suit leur volonté !

Mastel s'arrêta soudainement au milieu du chemin longé par l'eau boueuse.

—Je ne comprends pas Geoffrey. Quand je me suis réveillé vous lisiez une Bible. Je vous croyais un fervent croyant de l'Eglise des Douze. Pas des dieux vrymois.

Geoffrey releva la tête et sourit à Mastel.

—Je crois en tout ce qui a du pouvoir.

—Opportuniste, lâcha Leonard en le dépassant avec la brouette.

—Vous êtes juste naïfs de croire qu'il n'y a qu'un seul Dieu. se défendit Geoffrey. Puis-je poser Marylith ? Je crains de ne plus avoir de dos si ça continue plus longtemps.

Mastel observa les environs boueux parsemés d'arbres à l'écorce noire et pointa un saule pleureur au bord de l'eau.

—Déposons là ici. La femme qu'elle a tué est recherchée, je dois savoir pourquoi elle a agit ainsi.

Alors que Geoffrey se faufilait sous le feuillage verdoyant de l'arbre en question, Mastel sortit sa cloche et avec l'aide de Leonard, ils installèrent Marylith assise contre le tronc de l'arbre.

—On la réveille ? demanda Geoffrey.

—Pas le choix, je ne connais pas de sort qui fonctionne sur une cible endormie, dit Mastel. Je n'ai pas de sortilège pour la forcer à parler non plus mais sous l'effet d'un sort d'apaisement elle pourrait répondre à quelques questions.

Geoffrey fronça les sourcils alors que Leonard attrapait les épaules de Marylith et la secouait.

—MARYLITH ! beugla Leonard.

Elle se réveilla en sursaut et son regard se balada à vive allure sur les marais autour d'eux.

—On est où ? bafouilla-t-elle.

—Dans les marais de Ventbarg, répondit Mastel en tendant sa cloche dorée au-dessus d'elle.

Il fit sonner un premier tintement, Marylith fronça les sourcils et tenta de se lever mais ses compères la retinrent contre l'arbre.

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