Chapitre 5 [2/3]

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Des rires résonnaient dans la maisonnette alors que Karel et Henson évoquaient le bon vieux temps autour d'un bol de soupe chaude. Irimel les observait en silence, peu friand des histoires qui évoquaient le père d'Albarath. Il soufflait en contemplant le chaudron que sa mère maintenait au chaud sur le feu de la cheminée. Des jours qu'il n'avait ni bu, ni mangé, mais il ne ressentait ni soif, ni faim. Ses poils de barbe n'avaient pas poussé d'un millimètre depuis qu'il avait mis pied dans cette cave. Son corps semblait figé dans le temps car même la fatigue était absente.

Lorsque sa mère l'approcha avec un bol, il se prépara à refuser une énième fois avec politesse mais elle pointa la fenêtre. Plusieurs fois, avec vigueur, son regard vacillant du bol à la fenêtre. Il se releva de son banc en comprenant.

—Te tracasse pas, je vais la chercher.

Sa mère le remercia d'un grand sourire alors qu'il sortait.

Il protégea ses yeux du soleil et fut ravi de ne pas avoir son manteau sur les épaules tant il devait faire chaud. Il ne s'éternisa pas sur la météo et balada son regard sur les alentours. La cousine d'Albarath, celle qui l'avait plaqué contre un mur et touché pour retirer ses plumes, ne pouvait pas être partie bien loin.

Personne près de l'écurie ou de la grange, il avança le long de la calèche avant de l'apercevoir. Debout dans sa robe blanche, elle se tenait devant l'étang et le dévisageait.

—Je te cherchais, il y a de la soupe. lança Irimel.

Une moue dubitative, Adrienne resta sur place sans le lâcher du regard. Inquiet qu'elle ait mal compris, Irimel s'avança vers la terre humide qui bordait l'étendue d'eau verdâtre.

—Il y a un problème ?

—Je ne comprends pas, vous êtes toujours un démon mais vous avez l'air..si humain..

Irimel se força à sourire, essayant tant bien que mal de cacher son embarras à l'évocation de son état. Il était toujours un démon mais plus aucune plume ne frottait sa peau sous sa chemise et ses yeux n'avaient rien de luisant.

—Si j'ai bien compris, tu en es la responsable.

Elle le regarda avec étonnement.

—Ce n'est pas moi qui vous ai rendu le contrôle, je ne connais pas les secrets de la sorcellerie de Merychel.

—Moi non plus mais je parlais des plumes..

Irimel sentit son estomac se nouer rien qu'en énonçant les plumes qui avaient recouvert son corps. Il plongea son regard dans l'eau verte qui scintillait sous les rayons de soleil perçant les feuillages.

—J'ignore pourquoi mon toucher a cet effet, à quoi bon rendre leur apparence humaine aux démons, s'ils restent des démons, souffla Adrienne. Le Seigneur m'a donné une faculté des plus étranges.

Doucement, Adrienne relevait les pans de sa robe qui frottait la terre humide, tout en scrutant Irimel de haut en bas.

—Sans les plumes, je me sens presque normal.

—Presque ?

Il serra les dents. Dire qu'il se sentait parfaitement normal aurait été un mensonge. A quoi bon dire la vérité maintenant que je suis un démon ?

—Est ce que.. vous souffrez dans cet état ? continua Adrienne.

Son vouvoiement inutile commençait à l'ennuyer autant que ses questions.

—Non, je ne souffre pas.

—Que mangez-vous en tant que démon ?

Il soupira, excédé par son visage qui le fixait avec curiosité comme s'il était une créature nouvelle.

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