𝙲𝙷𝙰𝙿𝙸𝚃𝚁𝙴 𝟹, 𝙺𝚒𝚎𝚛𝚎𝚗 | 𝟸

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Note d'autrice. 

Voici la dernière partie du chapitre 3, avec un petit flashback de la rencontre entre Ruby, la directrice de l'agence, et Kieren =) J'espère qu'il vous plaira, on en apprend peut-être plus sur la vie de Kieren et sur ses pouvoirs...

Bonne lecture et bon courage pour la semaine à venir !


Deux semaines plus tôt, Kieren essuyait des verres et offrait des cocktails simples aux clients d'une boîte de nuit souterraine.

Il avait trouvé ce job par hasard, en passant devant la porte d'entrée et son affiche discrète qui offrait un boulot moyennement payé pour quelques heures par soir. Ce devait être déjà son troisième du mois, et il commençait à se lasser de courir à droite et à gauche : un travail plus tranquille lui irait bien, alors il s'était dit, avant d'entrer tenter sa chance, que si ça ne fonctionnait pas il s'éloignerait de la ville pour quelques temps.

Kieren était entré, et en le voyant le patron l'avait regardé de longues secondes sous toutes les coutures avant de hocher la tête : tu attireras du monde.

Le premier soir, Kieren avait servi des vampires, des sorcières, des mages, quelques humains et plusieurs loup-garous. Les boîtes comme ça étaient rares en ville, car elle demandait une surveillance étroite et une sécurité de premier ordre : le premier accident aurait été fatal, et les excès étaient nombreux.

Il avait répondu à plusieurs sourires aguicheurs, obéit à ceux qui voulaient un verre unique, et hésité à repartir avec un mage aux yeux doux.

Les jours suivants, le monde avait doublé. La boîte était pleine, le patron ravi, et toute idée d'éloignement l'avait quitté. Il profitait de la musique, buvait quelques verres de sang pétillant derrière le bar, apprenait à connaître ses collègues, et passait le balai avec ceux qui faisaient habituellement la fermeture pour leur donner un coup de main. C'était une expérience nouvelle et Kieren était toujours heureux d'élargir ses horizons, de découvrir de nouvelles odeurs, de nouveaux goûts, de nouveaux sons. La présence des autres l'épuisait autant qu'elle le stimulait.

A la fin de la première semaine, il remarqua que les vampires se faisaient plus nombreux. Il intercepta des conversations en se promenant dans la salle, écouta distraitement quelques esprits, et s'écarta de mains curieuses qui tentaient de toucher sa peau tiède. La règle était de ne jamais rien faire avec des vampires : si sa présence les attirait naturellement, ses petites différences les rendaient tout de suite soupçonneux.

Ce soir-là, il essaya de ne pas écouter grand-chose : sa curiosité l'entraînait souvent dans des endroits qu'il ne voulait pas visiter, et il peinait à se retenir d'y aller à fond. Ses premiers mois en ville, deux ans plus tôt, avaient été bordéliques à souhait et il ne souhaitait pas revivre cela tout de suite.

Il n'était pas supposé aller trop souvent en salle car le patron l'appréciait bien davantage derrière le bar, où rester assis devant les barmans signifiait commander en continue. Quelques heures plus tôt, sa collègue lui avait demandé de prendre sa place, affirmant que les fréquentations de ces derniers jours l'effrayait. Elle en parlerait au patron une fois le service fini, mais les quelques regards qu'elle recevait lui glaçaient le sang. Son statut de louve lui attirait de toute façon les regards irrités des vampires du coin.

En passant devant une table où deux vampires avaient réclamé des verres de liqueur de sang, Kieren fut surpris de constater que l'un d'eux paraissait assez âgé. Il avait appris assez rapidement que malgré leur immortalité de l'âge, les vampires ne dépassaient que très rarement les 300 ou 400 ans : la solitude et la froideur d'un corps déjà mort les achevait mentalement bien avant leurs 200 ans, et la plupart se suicidaient d'une façon ou d'une autre. Du coin de l'œil, Kieren observa le vampire, qui physiquement paraissait dans la trentaine mais qui, d'après son odeur de poussière persistante et ses cheveux naturels presque blancs, était bien plus vieux.

Leurs regards se croisèrent, et celui du vieux vampire se plissa. Lui n'en avait que faire du joli visage de Kieren ou de son magnétisme naturel : il grogna presque dans sa direction, le poussant à s'éloigner en s'excusant d'un hochement de tête.

Ce fut à ce moment qu'il l'entendit : un souffle dans cette pièce pleine de bruit, mais Kieren eut un petit ralentissement avant de repartir vers le bar. Il balaya la pièce, repérant la femme à l'autre bout de la pièce qui attendait sagement sa commande, et attrapa le premier verre sur le comptoir pour l'emmener dans sa direction. Il aurait dû faire comme si de rien n'était, retourner à son poste en ignorant ce qu'il venait d'entendre dans la tête de ce type, mais ces derniers temps il peinait à ignorer l'injustice.

Son caractère changeait avec chaque semaine passée en ville. L'Atrium le rendait plus humain, plus doux, plus concerné par le sort des autres, et il ne savait quoi en penser.

Quand il arriva près de la femme, il posa le verre, se pencha rapidement et discrètement, et murmura :

— Ils savent que vous en avez après eux. Ils savent que vous les suivez. Si vous sortez ce soir en même temps qu'eux, vous êtes morte.

Il prit le temps d'accrocher son regard, vit ses yeux s'écarquiller doucement, détailla ses cheveux blancs négligemment relevés et son odeur de fleur. Puis tourna les talons, et décida que son rôle s'arrêtait là : si ce qu'il avait entendu était juste, alors ce que faisaient ces vampires était mal, même selon ses critères personnels. Cette policière ou quelque soit son rôle était prévenue, la suite de ne le regardait pas.

Ce soir-là, il continua son service comme si de rien n'était. Il vit les vampires sortir, il vit la femme les suivre, et quand il sortit dans la rue pour retourner chez lui, rien ne semblait différent de l'ordinaire.

Quand il arriva le lendemain pour prendre son service, la femme l'attendait devant le bar, dans une tenue plus sérieuse, entourée d'une odeur prenante de magie. Son expression curieuse et intéressée ne fut pas difficile à comprendre. 

Fangs and RosesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant