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Saya

Le village est en proie à des flammes d'une grandeur et d'une violence spectaculaire. Les gens qui ne sont pas dans le palais s'y précipitent pour se mettre à l'abri tandis que je cours dans le sens opposé pour échapper à la cinquantaine de soldats qui me pourchassent. Ils sont rapides pour des soldats qui ne font rien de leurs journées à part boire du vin et jouer aux cartes. Au moins, mon départ leur aura fait faire un peu d'exercice...

Je me retourne et frappe dans des tonneaux en bois avec mon pied pour leur barrer la route. Le contenu des tonneaux se renverse et les gardes glissent dans le liquide brunâtre, qui paraît être de l'eau usée...

Je vous l'accorde, ce que je viens de faire est un coup bas, très bas. Odieux, même. 

Je continue ma course sans me retourner, ralentir pourrait me coûter la vie. À cause des incendies qui se sont déclarés partout dans le royaume par ma faute – ou grâce, tout dépend du point de vue – il règne une atroce chaleur, l'air devient lourd et plein de cendres. Respirer se fait difficile et il devient de plus en plus fatiguant de courir avec la température qui ne cesse d'augmenter. Mais je ne m'arrête pas. Après-tout, que sont un peu de chaleur et de fatigue comparées à la mort ?

Je pense à revenir dans la forêt du royaume, là où j'ai attaché mon cheval. M'enfuir avec sera moins fatiguant et plus rapide. Si j'y vais sans Malicia, ils la tueront.

Je ne veux pas voir ma jument morte.

Après avoir passé dix minutes à courir sans interruption, je distingue l'entrée de la forêt, indiquée par une pancarte dans laquelle était gravée l'inscription "Forêt de Satylia". Je lève les yeux au ciel, soudainement exaspéré par le fait que les Satyliens se sentent obligés d'écrire Satylia partout où ils peuvent le faire et rentre dans la forêt, sans pour autant ralentir. Au contraire j'accélère, je crains que les soldats ne me tendent une embuscade.

Je suis à l'affût du moindre mouvement, du moindre bruit, de la moindre respiration, du moindre son qui pourrait les trahir. Après avoir couru un laps de temps qui m'a paru être une éternité, je retrouve enfin ma chère Malicia, qui hennit bruyamment en me voyant venir vers elle. Je pose ma main sur sa tête, lui intimant dans une pensée de ne pas faire de bruit. Elle a l'air d'avoir compris. Je lui tapote gentiment le front puis me met en selle.

***

Après avoir traversé des plaines et gravi des collines pendant plusieurs heures, je m'arrête à l'entrée d'un royaume, ou plutôt de ce qu'il en reste... Le fait que la pancarte portant le nom du royaume tienne encore debout me semble être un miracle vu l'état des lieux.

D'après la pancarte, le royaume s'appelle Necropolys.

« La cité des morts » en ancien Satylien...

Singulier comme nom...

Je n'en ai jamais entendu parler...

Je descends de mon cheval, l'attache à un arbre et avance sur le chemin qui mène au château. En allant vers le palais, je m'arrête à une auberge pour essayer d'en savoir un peu plus sur ce royaume et qui est son dirigeant. L'Hermine Noire, c'est ainsi que cette auberge se nomme..

Il n'y a pas que la ville qui est morte à ce que je vois, l'inspiration aussi y est passée. Lorsque je pousse la porte, la patronne a l'air tellement contente de me voir que je ne juge pas nécessaire de la saluer et me dirige directement vers elle. Une fois en face d'elle, je lui demande:

— Auriez-vous l'amabilité de m'indiquer quelle est la distance entre Satylia et cette...contrée et qui est son roi ?

Elle me toise, l'air ennuyé et déclare de façon nonchalante :

The Bastard PrinceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant