The Bastard Prince

28.

Reagan

Je remets précipitamment l'objet de mes découvertes là où il était quand j'entends la trappe des archives être soulevée. Mon cœur bat à toute vitesse à l'entente du bruit des pas qui se rapprochent du lieu où je me trouve. Je me dépêche de finir de remettre les tiroirs sur leurs rails et prends l'équerre dans la main, sur le point de la ranger, quand j'entends la voix de Mère derrière moi:

— Reagan ? Pourrais-je savoir ce que tu fais dans les archives, à une heure si matinale?

Je vais finir comme Dyaneyra si elle apprend que je sais pour sa mort, alors partons sur un mensonge...

— Le clocher m'a réveillé et je n'ai pas voulu me rendormir après, alors je me suis dit que venir à la bibliothèque m'apaiserait. De plus, ça faisait longtemps que je n'y avais pas posé les pieds. La porte de la réserve était ouverte, je suis rentré...

— Et donc tu as deviné comme par magie qu'il y avait une trappe en dessous du tapis, qui est bien trop épais pour que tu en vois la forme à travers ?

— J'ai trébuché sur un des plis et j'ai emporté le tapis avec moi. Ça a dévoilé la trappe et quand je l'ai vu j'ai été curieux de savoir ce qu'il y avait dessous. inventé-je. Je suis désolée que ma présence ici...vous importune, rajouté-je précipitamment pour qu'elle me croit. Elle paraît satisfaite de mon explication et ne me questionne pas plus. Un silence embarrassant règne dans la salle, et aucun de nous ne le brise. Je toussote enfin avant de lui dire, en espérant qu'aborder n'importe quel sujet qu'elle apprécie lui fasse oublier que j'ai miraculeusement découvert l'existence des archives:

— Je voulais vous demander...Y aurait-il un moyen d'écrire à ma future fiancée ? Je pensais que commencer à faire connaissance par le biais de lettres rendrait les choses plus naturelles pour notre rencontre au palais.

Je vois que ma tentative de changer de sujet a marché car elle hausse un sourcil. Une expression d'agréable surprise peignant ses traits. L'air mélangeant joie et soulagement,, elle me dit:

— Je vois que la raison t'est enfin revenue, merci mon Dieu. Oui, bien sûr. Tu peux lui écrire une lettre et demander à un des soldats du royaume d'aller l'envoyer. Ou tu peux même y aller toi-même. Tu as l'air de vouloir faire cela par toi-même. Et je ne peux que comprendre et t'y encourager. Tu t'investis enfin pour faire de Satylia la grande puissance qu'elle était jadis.

Je lui adresse un sourire maladroit avant de balbutier une réponse qui devrait me faire rentrer dans ses bonnes faveurs aujourd'hui:

— Oui...J'aimerais...faire les choses comme il faut...

— Et c'est très bien, Reagan. Bon, et bien...Qu'attends-tu ? Va écrire à ta future épouse.

Bah oui, maintenant que tu lui as dit, il faut vraiment le faire.

Je hoche la tête de haut en bas et la salue silencieusement avant de lui tourner le dos et de remonter à la réserve. Je sors de la bibliothèque rapidement, et m'enferme dans ma chambre pour m'installer à mon bureau pour écrire mes lettres.

Deux pour la princesse Nesayem, et une pour Haayal. La première pour Nesayem sera celle que je ferai lire à Mère et celle que je lui demanderai de faire lire à ses parents. La deuxième, celle que j'enverrai vraiment. Et celle-là ne sera pas pour lui faire mille et une promesses que je ne tiendrais pas après le mariage, mais pour être honnête sur tous mes sentiments face à cette situation, en espérant que je ne sois pas le seul à penser ainsi. Je pense qu'elle non plus ne veut pas se marier, elle n'a que seize ans. Je prie pour que mon intuition soit bonne. Avec un peu de chance, elle pourrait même agréer à ma proposition de collaboration pour éviter ce mariage forcé. Je tire de mon tiroir de bureau un rouleau de parchemin et saisit une plume de paon dans mon pot de plumes. Je la trempe dans mon encrier et commence à écrire. Les mots me viennent naturellement, l'envie d'exprimer le fond de ma pensée plus forte que jamais auparavant. Après une dizaine de minutes à écrire, je relis ma lettre dans ma tête: