36.

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Saya

— Tu as fini de...me flatter comme ça ? Je n'aime pas ça. répond-elle en levant les yeux au ciel, sans pour autant cacher le sourire que mes paroles lui ont arraché.

Son sourire, qui creuse dans sa joue gauche une fossette adorable.

Son sourire, qui ne fait que renforcer à quel point elle porte bien son nom.

Son sourire, qui me fait tomber pour elle un peu plus à chaque fois que je le vois.

— Tant pis, tu vas devoir t'habituer à la vérité. Ce ne sont pas des flatteries, ce sont les faits.

Elle me met une claque sur le haut du crâne en me lançant un regard agacé. Elle lève les yeux, puis souffle:

— Bref...à mon tour. Un: Reagan m'a pris mes souvenirs pour que j'accepte de travailler pour lui, en me promettant de me les rendre une fois la mission accomplie. Deux: Pour qu'il me les rende, je suis censée te ramener à Satylia et te tuer là bas...

— Haayal...commencé-je.

Elle pose son index sur ma bouche pour me faire taire avant de m'ordonner:

— Laisse-moi finir s'il te plaît. Tu voulais la vérité, la voici. C'est déjà assez difficile comme ça, alors ne m'interromps pas.

J'acquiesce silencieusement, et l'écoute attentivement me raconter en détails ce qu'il s'est passé avec Reagan. Elle ne prend plus la peine de faire trois phrases vraies et une fausse, et me dit directement pourquoi elle a dû accepter cette mission. Et je ne suis pas en colère contre elle. Je comprends pourquoi elle a agit comme ça.

Il lui a enlevé ses souvenirs, et son passé, pour la contraindre à travailler pour lui. En plus de la menacer de la tuer si elle n'acceptait de le faire. Il lui a volé une partie d'elle, pour servir ses intérêts. Il a fait du mal à mon étoile, ma Haayal.

Raison de plus pour me venger de lui.

— Au début, ajoute-t-elle, je me moquais de devoir te tuer. Tu n'étais rien de plus que...ma cible, et ça servait mes intérêts. Et je crois que...quand je t'ai vu faire un cauchemar, les choses ont changé. Ce jour-là, j'ai vu que ton éternelle arrogance – ne le prends pas mal – n'est qu'un masque pour dissimuler ta vulnérabilité. Ce jour-là, j'ai vu que toi et moi, avions plus de points communs que je ne le soupçonnais. Je...me suis vue en toi en quelque sorte, bien que j'en ignore les principales raisons. Et aussi...

Elle s'interrompt, hésitante, mais finit par poursuivre:

— Je pensais tuer Reagan après t'avoir tué...et renverser l'équilibre des pouvoirs. J'avais une bonne raison, s'empresse-t-elle d'ajouter en me voyant hausser un sourcil. Je croyais réussir à améliorer les conditions de vie des Satyliens. De tous les Satyliens.

Contrairement à moi, son égoïsme ne guide pas complètement ses décisions. Elle s'inquiète aussi pour les autres. Pour ma part, rien ne compte pour moi si ce n'est ma propre personne...et maintenant la sienne. Je soupire, pince affectueusement son nez avant de lui chuchoter:

— Tu es tellement naïve, mon coeur. En me tuant, puis en tuant Reagan, tu aurais laissé le trône à...Furstinna. Ce serait encore pire qu'avoir l'autre idiot sur le trône ou moi-même. Et désolée de te décevoir, mais je ne prévois pas de te laisser me tuer...

Prononcer le prénom de celle qui a fait de mes dix huit ans de vie un enfer réveille en moi les sensations fantômes de la force de ses coups sur ma peau. Je peux presque encore entendre sa voix me crier mille paroles que je n'oublierai sûrement jamais. Je suis sur le point de me perdre à nouveau dans ma propre tête quand Haayal répond:

The Bastard PrinceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant