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Saya

 Cela fait maintenant un mois que la Métamorphe - qui m'a d'ailleurs informé qu'elle s'appelle Haayal - et moi sommes devenus alliés.

Alliés...C'est un grand mot...

Elle ne me répond plus aussi insolemment qu'auparavant mais malgré tout, sa volonté de toujours obtenir l'ascendant sur moi en ayant le dernier mot est omniprésente et continue de m'insupporter. 

Sa présence ne m'est cependant pas aussi désagréable qu'avant. Bon, elle l'est toujours, mais moins qu'avant. Légèrement moins.

Elle s'est pliée à mes règles sans trop rechigner, je prends donc mon mal en patience la concernant, elle et ses habits blancs.

Derrière ce masque arrogant qu'elle arbore la majeure partie du temps, je peux voir une souffrance profonde, qu'elle tente tant bien que mal de cacher. Je vois dans son regard quand elle s'entraîne au combat ce voile de tristesse dont la lueur m'est si familière.

Cette même lueur...de désespoir que je voyais dans mes yeux lorsque je me regardais dans le miroir auparavant.

La tristesse est maîtresse de son âme, comme elle était maîtresse de la mienne à l'époque. Et cette tristesse finit toujours par se transformer en quelque chose de plus destructeur...pour elle et pour tout ce qui l'entoure. 

Après un mois pendant lequel elle n'a fait que s'entraîner au combat dans la cour du château envahie par les mauvaises herbes, j'ai décidé de lui apprendre à jouer du piano.

Je ne sais toujours pas pourquoi j'ai pris cette décision, d'ailleurs. 

Elle s'entraînait quand je suis venu lui demander de me rejoindre dans la salle du piano, sous prétexte que j'ai quelque chose à lui montrer. Néanmoins, j'avais oublié un détail, qu'elle me fait remarquer aussitôt arrivée dans la salle:

— Saya, je ne peux pas toucher le piano, tu te rappelles ? Seuls les membres de la famille royale le peuvent...

Elle marque une pause puis poursuit:

 — D'ailleurs, tu ne voudrais pas plutôt en savoir plus sur ce qui te rattache potentiellement à cette famille déchue, vu que tu peux jouer sur le piano qui leur était exclusivement réservé. Je pourrais me procurer des livres sur le royaume, si tu veux.

Elle ponctue sa phrase d'un regard interrogateur tandis que je réfléchis, perturbé. 

J'ai complètement oublié que je lui avais proposé de me tutoyer. Ça sonne plutôt bi–

Bref...

Je repense à sa proposition, puis lui demande

Qui te procurerait ces livres ? lui demandé-je

— Personne, je les...emprunterais définitivement.

 Un rire s'échappe de mes lèvres sans que je ne parvienne à le retenir. 

Un emprunt définitif, vraiment ? Pourquoi pas, il me faut absolument ces livres, mais à qui vas-tu voler ces livres. Pardon, emprunter, ces livres.

— Ça, c'est mon problème, mieux vaut que tu ne saches pas qui je vais les vo–les emprunter... Je fronce les sourcils, mais n'en demande pas plus. Même si je soupçonne que la personne à qui elle "empruntera" les livres n'est autre que mon très cher frère, je sais qu'elle ne va rien me dire de plus.

The Bastard PrinceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant