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Saya

J'avance lentement dans un espace complètement vide et blanc, irradiant d'une lumière dont je ne parviens pas à identifier la source. La surface sur laquelle je marche me paraît être le sol, le mur et le plafond à la fois. Je sens qu'on me tire vers le bas, mais je suis toujours au même endroit. Visqueuse, elle me donne l'impression de m'y enfoncer à chaque pas que je fais. Je tourne la tête, espérant trouver une fin à cette "pièce", en vain. 

J'ai le tournis, mes oreilles bourdonnent désagréablement, renforçant mon vertige. Tant bien que mal, je continue de marcher pour trouver une sortie. Soudain, je sens le sol se dérober sous mes pieds. Je ferme les yeux, me préparant à heurter le sol. Le choc ne vient pas. Je me retrouve debout, comme si quelques secondes plus tôt, le sol ne s'était pas détruit sous mes jambes. 

Je rouvre précautionneusement un œil, puis l'autre. La pièce a radicalement changé d'aspect. La lumière aveuglante avait laissé sa place aux ténèbres les plus opaques. Je ne parviens même pas à distinguer mes mains lorsque je les tends devant moi. Les bourdonnements ont cessé, remplacés par un son répétitif de bris de verre. 

Je me déplace à tâtons dans cet espace sombre, à la recherche d'une quelconque source de lumière. Après avoir marché si longtemps, le temps ne m'apparaît n'être plus qu'une notion abstraite. Enfin, je distingue au loin un scintillement. Je soupire, soulagé puis me met à courir jusqu'à la source de ce scintillement, qui disparaît instantanément dès que je suis assez proche pour le toucher. 

En me retournant, je cogne de l'épaule un objet métallique, qui m'apparaît être un miroir. Dès que je le touche, la pièce s'éclaire, me laissant la détailler du regard. Tout est noir, comme tout était blanc dans la pièce de tout à l'heure. Tout. Des murs au plafond, en passant par le sol... Je me regarde dans le miroir, mais mon reflet n'y apparaît pas. Cependant, j'y distingue une silhouette lointaine qui me paraît vaguement familière. L'homme - la silhouette parait plutôt masculine - est complètement vêtu de noir, contrastant avec la chaise blanche sur laquelle il est assis et dans une pièce vide - blanche aussi - où il se trouve. 

Elle ressemble à celle dans laquelle je me trouvais avant d'atterrir ici. Déboussolé, je rapproche mon visage du miroir pour mieux voir ce qu'il reflète quand d'un coup, il se retrouve face à moi affichant un rictus effrayant sur les lèvres. Lorsque je reconnais son visage, un hoquet de stupeur me prend. Instinctivement, je recule.

C'est moi.

Néanmoins, dans le miroir, mes yeux sont complètement noirs. On ne distingue pas l'iris de la pupille du blanc de l'œil. Ma peau a perdu tout son éclat et est d'une pâleur maladive. Des veines violacées, presque noires la traversent. Elles commencent au milieu de la poitrine et remontent jusqu'au cou où elles paraissent s'enrouler autour, telles des chaînes. Puis, je remarque les cicatrices recouvrant le torse nu de mon "reflet". Il y en a tellement que je n'arrivais pas à en estimer le nombre. 

Certaines ont été laissées par des brûlures, d'autres par des lames. Leur couleur, d'un rouge bien trop vif à mon goût pour dater d'hier, jurent horriblement avec la couleur de la chair qu'elles ornent. Je n'ose imaginer les autres parties de son corps. C'est lorsque je lève le bras pour me gratter la tête d'un geste machinal - mon reflet m'imite - que je vois les entailles sur ses poignets. 

The Bastard PrinceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant