TRUE BLUE

23. couleur nuit

Jude

Mon regard vacille entre mes talons et mes doigts. J'ai le tournis. Plus rien ne me semble être dans mes capacités.

Alors que j'attends le signal derrière la porte noire, une migraine s'immisce lentement contre mes tempes. La musique est assourdie ici, j'ai peur du moment où elle ne le sera plus.

Je cherche le sens de cette mission, j'en oublie l'objectif. Je crois qu'il m'est même compliqué de me rappeler du plan. Je n'oublie jamais le plan.

J'ai caché au mieux les hématomes qui parsèment mon corps, mais certains ressortent à la lumière, malgré la couche de maquillage qui les recouvrent.

Lilith se tient à côté de moi, nous ne parlons pas. Je crois qu'elle a saisi que ce n'était pas le moment.

C'est à nous, nos fausses cartes d'identité passent comme une lettre à la poste. Comme prévu le type en costar noir nous trouves rapidement sur la liste d'invités.

Lilith émet un sourire satisfait en remerciant l'homme qui nous ouvre, tandis que je ne fais que la suivre, machinalement.

Sa robe est noir charbon, le contraste est divin avec ses cheveux blonds presque blanc.

La mienne est bleu nuit, nous avons échangé au dernier moment, je ne sais pas vraiment pourquoi, mais elle ne m'a pas laissé le choix.

Deux longues robes satinées, sans trop de détails, mais assez élégante et sophistiqués pour cet évènement.

Le poids du regard de Lili devient trop lourd, je succombe à le rencontrer. Elle pose une question silencieuse. « Est-ce que ça va ? » je ne sais même pas.

Pourquoi est-ce que je me sens si engourdis et effrayé ? j'ai fait des dizaines de missions dans ce genre, et on ne peut pas dire que ce soit la mort qui me force à y aller à reculons.

Je détourne les yeux.

- Eh Jude.

Elle glisse sa main contre mon avant-bras. Son contact me fait frissonner. J'ai envie de fondre en larme.

Mes iris se relèvent, rencontrant les siennes. La brûlure de mes pupilles alimente mon mal de tête. Je sens les larmes monter.

Non sans m'avoir lancé un regard rempli de compassion, elle avance, parce qu'elle sait que si elle pose une question de plus je vais craquer. Or, nous n'avons pas le temps pour ça.

La vaste salle est formée en un cercle. Au centre se trouve ce que je considèrerais comme la piste de danse. Tout atour, un bar sans fin, avec une fine bande dédiée aux personnes qui souhaite simplement consommer et parler.

Le plafond est assez bas.

Je relève la tête, il y a plusieurs étages, tous en cercles. Comme des énormes balcons régnant les uns sur les autres. Tous se rejoignent au centre, la vue sur ceux qui dansent. Les âmes innocentes.

Nous avons encore vingt minutes avant l'arrivée des autres, vingt minutes avant le carnage.

Pendant ce lapse de temps, nous devons repérer les positions d'Hayden et de son père, et les transmettre. Retranscrire à peu près tout en fait. Le nombres d'hommes armées, les potentiels acteurs de cette mascarade.