Un flocon incomplet.

Chapitre 29 - Noélie

Je reste figé sur place ne sachant pas s'il s'agit d'un rêve ou de la réalité. Ma coach est là, face à moi avec son sourire caractéristique qui me rassurait à chacun de mes doutes. Sa classe indéniable ne l'a pas quitté depuis notre précédente rencontre qui remonte à très loin, six mois. Son apparence ne laisse absolument pas deviner qu'elle vient de descendre d'un avion. Son côté apprêté en toute circonstance a toujours été un élément mystérieux pour moi, un secret qu'elle garde précieusement.

J'ai persisté à l'ignorer au maximum ces derniers mois, j'avais peur de la déception que je pouvais lire dans ses yeux.

— Je n'ai pas droit à un petit câlin. plaisante-t-elle.

Je balbutie des mots inintelligibles avant de me diriger vers elle et de l'enlacer. Ses embrassades ont toujours eu une allure très protectrice, un aspect maternel qui, lors de mes échecs, m'encourage directement.

Je m'écarte et me rends compte que je n'ai pu retenir un sourire. Je repense à tous les bons souvenirs que j'ai avec elle, avant que le mauvais ne prenne le dessus. Le jour où j'ai eu mon accident, j'avais démissionné sans qu'elle ne puisse me convaincre de me battre et de continuer le patin.

Un raclement de gorge me ramène à la réalité et je tourne la tête vers mon patron qui est à l'origine du son. Il fronce les sourcils dans l'incompréhension et je me permets donc de les introduire l'un à l'autre.

— Nash, je te présente mon entraîneuse.
— Nash ? M'interroge cette dernière.

J'acquiesce pendant que ses yeux pétillent. Évidemment, elle connaît toute mon histoire, toute notre histoire. Au début, je parlais de lui, tout le temps. Dès qu'on allait au restaurant, je conversais au sujet de mon ex qui était un cuisinier hors pair. Quand on allait voir des matchs de hockey, je contais la manière dont il ralliait ses troupes pour gagner. En bref, il n'a aucun secret pour elle.

Je joue avec mes doigts sentant son regard intrigué alors que Nash lui tend sa main pour la saluer tout comme Steve qui s'est présenté par lui-même.

Son attention revient vers moi arborant un sourire rempli de sous-entendus. Je connais assez Mia, pour savoir qu'elle aura déjà tout raconté à sa mère.

— Tu es rayonnante. se réjouit-elle.

Mon cœur se serre. Il est évident qu'elle songe à l'accident et à la Noélie d'après qui est loin de celle que je suis aujourd'hui. Une part d'elle est toujours au creux de mon âme, mais différemment, comme un encouragement à évoluer.

— C'est ce que nos clients déclarent également. Sourit Nash en me regardant.

Mes joues s'enflamment à ses mots et je repense à notre conversation. Tente-t-il de me complimenter pour me convaincre de rester ? Il m'a fait une proposition d'emploi y à moins de quinze minutes et je ne peux m'empêcher d'y songer sincèrement.

J'aime être ici, discuter avec les clients, les conseillers, les accueillir et même gérer les possibles conflits. J'apprécie le contact humain, alors que rien ne me préparait à ça, surtout après le lycée.

À l'époque, je pense que les étudiants ne se rendaient pas compte des conséquences de leurs mots. Au fond, c'est une des raisons pour lesquelles j'ai accepté sans hésiter l'opportunité de ma jeunesse. Je voulais changer d'environnement, le corps enseignant était incapable d'agir pour le bien-être de leur élève, j'ai dû protéger ce qui restait de positif en moi.

Depuis cette époque, j'ai constamment eu du mal avec la socialisation ; les moqueries, les injures et les rumeurs ont marqué cet épisode. J'ai toujours eu peur de revivre une telle période, afin de me protéger, je n'ai eu de cesse d'éviter les gens et me suis concentré sur le patin. Aujourd'hui, j'ai perdu mon refuge et ça m'a permis de découvrir que tous les humains n'étaient pas malveillants.