28. Addictions

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Matthew pdv :

Sur le chemin du retour, Élizabeth osa à peine me regarder, n'ayant pas le courage de me confronter, pas après ce que j'avais vu. Pourtant, la voir en larmes ne m'avait pas fait l'effet qu'elle pensait. Cela m'avait anéanti, certes mais cela m'avait aussi montré à quel point elle pouvait être incroyable. Je ne la voyais pas comme une femme faible, au contraire. À mes yeux Élizabeth Clark était la femme la plus forte qu'il m'avait été donné de voir.

Non pas parce qu'elle tombait, mais comme elle le disait, elle se relevait toujours. Comme tout le monde, elle avait des moments où elle se laissait bouleverser par ses émotions. Cependant, ce n'était pas quelque chose de décevant ou bien de minable, c'était quelque chose d'humain.

Et cette part d'humanité en elle ne s'était jamais éteinte, malgré ce que l'on avait essayé de me faire croire en m'évoquant l'existence de la célèbre machine de guerre.

Elle n'était ni une machine, ni faite pour la guerre.

La guerre, elle la vivait perpétuellement dans son cœur entre ses nombreux maux et ses nombreux tourments. Elle avait baigné si jeune dans la souffrance, qu'elle ne connaissait que ça. Elle avait fini par banaliser cela et croire que si elle l'infligeait elle ne la ressentirait pas.

Mais elle se trompait.

Lorsque nous arrivâmes enfin devant la maison, elle rentra avant moi, toujours sans dire un mot. Elle avait arrêté de pleurer, mais j'entendais encore les bruyants sanglots de son cœur.

Je rentrai à mon tour, et eus un haut le coeur lorsque je la vis assise sur un tabouret de la cuisine en train de se préparer un verre de whisky. Lentement basculer la bouteille afin d'y verser ce liquide destructeur.

Quand avait-elle commencé à boire ? Quand avait-elle pensé que l'alcool lui ferait oublier ses problèmes ?

Lentement, afin de ne pas la brusquer, j'arrivai derrière elle et lui pris des mains le verre. J'en bus l'intégralité et grimaçai. Le goût était tout simplement horrible.

J'avais renié contrairement à elle l'alcool depuis que j'avais vu l'effet qu'il pouvait avoir, sur mon père par exemple, mais je préférais largement m'infliger ça plutôt que de la laisser se l'infliger à elle-même.

- Je, je croyais que tu détestais boire ? Bégaya-t-elle en me dévisageant, les yeux encore rouges.

Je m'assis à ses côtés et soupirai :

- Je déteste toujours autant boire, mais si tu décides de t'accrocher à ton addiction je la prendrai à ta place.

- Tu n'as pas à faire ça, dit-elle d'une petite voix.

Je ne dis rien et saisis la bouteille. Petit à petit, alors que l'alcool me brûlait la gorge, j'engloutis le liquide afin d'en boire le quart. Ma tête se mise légèrement à tourner et mon esprit à se brouiller, mais je luttai. Je luttai parce que chaque gorgée que je prenais en plus, représentait chaque gorgée qu'elle boirait en moins.

- Mais ça va pas bien ! S'écria-t-elle en me confisquant la bouteille des mains comme si j'étais un enfant, et je crus retrouver ne serait-ce qu'un peu la Élizabeth que j'avais rencontrée, avec la même lueur de danger dans les yeux, je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas m'amuser moi aussi.

Elle en but le quart à son tour et je la laissai faire. Cette compétition qui n'en était pas une, entre elle et moi semblait occuper un peu son esprit. Elle paraissait moins triste et ce constat me réchauffa la poitrine.

Il ne restait plus beaucoup de whisky dans la bouteille, seulement assez pour remplir le verre. Élizabeth tendit sa main afin d'en boire l'intégralité mais je la retins.

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