Un new-yorkais en Californie

296 23 2
                                    

- Je dis pas qu'il le fait nécessairement exprès, simplement que ça lui arrive bien plus souvent que la moyenne, soupire Maggie. Et c'est pas normal !

Je me glisse à droite de Raven et dépose mon plateau sur la table. La cafétéria est blindée à cette heure, comme tous les jours depuis que les températures ont commencé à descendre franchement.

- Elle est toujours en boucle sur Mike ? interrogé-je la brune avant d'avaler une rasade d'eau.

Elle n'a pas besoin d'esquisser le moindre son, son regard blasé parle pour elle. Depuis ce matin, elle l'a pris en grippe, j'ignore ce que le blond lui a fait, mais je jure que si elle n'arrête pas très vite, je lui tords le cou. Bowers est insupportable, je suis la première à le reconnaître, mais nous le rabâcher pendant des heures l'est tout autant.

- C'est bon Maggie, il a pas tué ta mère non plus, lâche-le un peu.

La réflexion de Raphaël cloue le bec à la californienne, qui, vexée que son cousin ne prenne pas son parti, nous punit par son silence. Autour de la table, personne ne réagit, pourtant je suis sûre que tout le monde est secrètement satisfait.

- Salut les loulous, regardez qui a enfin pu dégager un peu de son temps pour déjeuner avec nous.

Je relève la tête et accueille Mike et Marco avec un sourire.

- Eh bah alors, Margaret, encore en train de bouder ? Non, parce que l'objectif c'est qu'il reste avec nous, pas que tu le fasses fuir en trente secondes, ajoute le blond sous le ton de la plaisanterie, un pouce en direction de notre ami.

Et c'est comme s'il avait déclenché un cataclysme, la blonde le fusille tellement du regard que j'ai peur qu'elle se fasse une crampe à l'iris.

- J'ai pas l'intention de partir, promis ! confie Marco en prenant place à l'extrémité de la table.

Son sourire est communicatif et détend tout le monde, sauf ma cousine par alliance qui se mue un peu plus dans un silence qui ne lui sied guère.

- Eh Eli, m'apostrophe le nouvel arrivant, j'ai pas eu l'occasion de te le dire ce matin, alors joyeux anniversaire !

Il lève son verre dans ma direction et je le remercie chaleureusement. Cette journée s'est bien déroulée jusqu'à présent, si on oublie la mauvaise humeur de Maggie. Le manque de mes proches, avec qui j'ai fêté mes dix-sept derniers anniversaires, ne me crève pas le cœur comme je l'aurais pensé. C'est plutôt comme une piqûre douce qui étreint ma poitrine sans trop la malmener. Il faut dire que depuis mon réveil, ma famille et mes amis se sont pliés en quatre pour me faire oublier les absents, et ce, à grands renforts de pancakes, d'embrassades chaleureuses et de chanson surprise sur le parking. J'ai même eu le droit à un énorme câlin de Diego qui ne voulait plus me lâcher jusqu'à ce que sa mère s'agace d'être en retard pour l'école.

- Alors, s'intéresse Marco, quelque chose de prévu pour fêter ta majorité ?

- Juste un resto en famille, ce soir. Et puis, on est toujours punis donc on oublie le week-end à faire la fête, soupiré-je un peu déçue.

Je ne m'imaginais pas, il y a quelques mois encore, passer mon anniversaire en quarantaine. Je ne devrais pas être surprise pour autant, ma vie entière va de travers depuis que je suis en Californie.

***

J'accueille l'annonce de la fin des cours comme une délivrance. Une heure d'histoire avec M. Bresson a suffi à me donner envie de me faire sauter la cervelle trois fois déjà. Lydia et moi parvenons à nous échapper de la cohue habituelle du hall et rejoignons nos amis sur le parking. Un vent pas possible nous accueille et je regrette de ne pas avoir pris le sweat que Lauren me proposait ce matin. Note pour plus tard : cette femme n'a jamais tort.

AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant