Chapitre 48: Le cheval de Troie

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Dans l'état où je me trouve, je ne peux pas faire grand-chose à l'exception de hurler !

Rebecca, si elle est dans le bâtiment, fait la sourde oreille, mais au terme d'une trentaine de minutes, elle finit par se manifester. Je m'avachis la gorge en feu, à bout de souffle.

Rebecca s'est débarrassée de sa robe déchirée par les soins de Tommaso en faveur d'une robe en coton blanc immaculé qui la fait ressembler à une vierge sacrificielle. D'ailleurs, tous ses vêtements sont de cette acabit, comme si Tommaso cherchait constamment à voir en elle une certaine pureté qu'il n'hésite pas à souiller.

– Il faut que j'aille aux toilettes, c'est urgent.

– Le maître m'a interdit de te détacher.

Le maître ? Cette appellation me hérisse, ce n'est pas un maître, mais un bourreau.

– Je t'en prie, Rebecca, épargne-moi l'humiliation de me faire pipi dessus. En plus, où veux-tu que j'aille ? Ma jambe est complètement bousillée.

Elle a la décence d'adopter une mine coupable. Malgré les élancements que je ressens au plus profond de ma chair, je n'arrive pas à lui en vouloir, car je pressens que, durant son année de captivité, Rebecca a vécu des choses que je ne veux même pas imaginer.

– C'est une urgence, je te promets de me tenir tranquille et le maître n'en saura rien. J'espère qu'elle n'a pas noté mon sarcasme.

Il y a une minute d'hésitation. Rebecca me fait penser à une petite fille face à un inconnu agitant devant son visage une sucette. Elle veut cette sucrerie, elle en meurt d'envie, mais ses parents lui ont interdit de s'adresser à des inconnus, alors la petite fille hésite.

Les épaules frêles de Rebecca s'affaissent et elle cède.

Elle disparaît pour revenir, sans surprise, avec son pistolet électrique. Je reste calme alors qu'elle détache mes liens. Je n'ai pas menti, j'ai vraiment besoin d'aller aux toilettes, mais dès que mon cerveau ne sera plus dans ma vessie, je mettrai en place un plan.

Je monte les marches grinçantes sans faire de mouvements brusques. Je traverse le salon, vide de toute décoration à l'exception d'un canapé. Au mur, il y a un papier peint aux motifs circulaires horribles. De la cuisine équipée, me parvient une délicieuse odeur. Je meurs de faim, donc forcément, mon estomac se contracte dans le vide, faisant au passage des bruits gênants.

Je comprends pourquoi, quand ils sont venus ici, les garçons ont trouvé la maison étrange. Elle est beaucoup trop propre et impersonnelle, c'est comme si personne n'habitait ici. C'est peut-être l'impression que veut donner Tommaso.

Rebecca, toujours derrière moi à distance prudente, me fait emprunter un petit couloir. J'ouvre la porte de la salle de bain et pénètre à l'intérieur. Elle fait mine de me tirer dessus quand je tente de fermer la porte derrière moi. Je lève les mains en signe de reddition et d'apaisement avant de faire mes besoins. Pas besoin d'intimité, de toute façon elle m'a déjà vu nu en me faisant ma toilette.

Ma jambe n'est pas belle à voir, la compresse est imbibée de sang et les entailles me brûlent. Perdre autant de sang m'inquiète, mais si je traîne jusqu'à ce que Tommaso revienne, cette blessure sera le cadet de mes soucis. J'ai peur qu'il ne lui vienne à l'esprit de me dresser comme il l'a fait avec Rebecca.

Je me lave les mains avant de m'asperger le visage d'eau. Rebecca me tourne autour pour me permettre de sortir sans grand effort. Je lui arrache son arme et lui envoie une décharge. J'étouffe mon sentiment de culpabilité quand elle me lance un regard accusateur avant de s'effondrer sur le sol de la salle de bain.

La Pieuvre De L'ombre 1( Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant