8. Puisqu'il le faut

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- Fais chier, lâche Maxence.

Hugo le dévisage déconcerté. Il remarque très vite que Maxence ne me lâche pas des yeux et que son regard est loin d'être amical. Mon chef se tourne alors vers moi et je suppose qu'il lit sur mon visage décomposé un sentiment de panique.

- Y a un problème ? demande-t'il.

Tous les autres membres de l'équipe assistent à cette scène qui prend un réel côté gênant.

- Non aucun problème Hugo, lui répond finalement Maxence.

Ce moment n'est pas sans rappeler mon premier jour au refuge il y a plus de cinq ans, lorsque j'ai réalisé que nous allions devoir nous entendre lui et moi si je voulais vraiment garder cette place en tant que bénévole. Cette fois, les rôles sont légèrement inversés. Maxence a visiblement très bien compris que j'étais là avant lui et que mon rôle dans l'équipe est crucial puisque je suis sensée être sur le plateau chaque jour et que je dois présenter une chronique ou un mini reportage toutes les semaines.

Hugo nous scrute quelques instants d'un air suspicieux avant de finalement détourner l'attention et la conversation. Dans l'après-midi, je rejoins la loge que je partage avec une collègue. J'y suis très vite rejointe par Maxence.

- Salut !, commence-t'il.

- Salut.

- Il faut qu'on parle.

- Si je comprends bien c'est que quand toi tu l'as décidé ?, je rétorque agacée de me souvenir qu'il ne s'est pas gêné pour me rembarrer il y a moins de deux jours lorsque j'ai souhaité engager la conversation avec lui.

- La situation est différente désormais. Ce boulot est une belle opportunité pour pouvoir encore plus gagner en notoriété et développer ma clientèle tandis que toi...

- Oh moi ? Ce n'est "que" le boulot de mes rêves... Juste l'aboutissement d'années de boulot et de sacrifices.

- Je n'allais pas dire le contraire et en réalité peu importe. Ne vas surtout pas croire que cela m'enchante, loin de là, mais nous allons devoir nous entendre. Du moins faire semblant ici.

- Je suis d'accord.

L'entendre dire que nous allons "devoir faire semblant" me blesse. J'aurais aimé que les choses soient différentes. Nous aurions au moins pu essayer de nous entendre et de mettre nos rancoeurs de côté. Visiblement pour lui, c'est peine perdue.

- Marché conclu dans ce cas.

Sans un mot de plus, il tourne les talons et je reste là, les bras ballants à fixer la porte qu'il vient de refermer.

Je reçois un appel quelques instants plus tard. Ce que j'apprends alors me dévaste et fais passer au second plan Maxence, sa présence ici et son attitude froide distante vis à vis de moi.

Alors que je me pensais fin prête pour l'émission de ce soir, je comprends que j'ai encore des changements à apporter. Il est trop tard pour modifier le montage vidéo, mais je peux revoir mon intervention orale. J'en informe Hugo qui est tout à fait d'accord avec moi et qui me propose même de transmettre aux équipes techniques quelques fichiers pour venir appuyer mes propos. Je me plonge donc à nouveau le travail.

L'heure de ma première émission en direct finit par arriver. Je suis étonnamment sereine : Hugo nous a tellement bien préparés. Mais il a surtout su créer une cohésion entre tous les chroniqueurs en amont de cette rentrée. Ce qui nous permet à tous d'être à l'aise sur le plateau.

- Et maintenant c'est au tour de notre jeune recrue. J'ai l'honneur de vous présenter Calie qui nous proposera chaque semaine une chronique sur l'écologie ou la cause animale. Je suis certain que d'ici très peu de temps, sa réputation ne sera plus à faire. Alors Calie, que nous avez vous concocté pour cette première ?

Le bal des papillons (Tome 2)    Après les cendres... le réveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant