33. Parce que je pense comme toi

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C'est d'abord un énorme mal de tête qui me ramène à moi. Il me faut plusieurs secondes avant de me rappeler où je suis et pourquoi j'ai si mal.

La douleur est si forte qu'elle m'empêche, dans un premier temps, d'effectuer le moindre mouvement. En revanche, j'entends que le calme est revenu sur le bateau. Seules quelques voix basses et les bruits habituels me reviennent aux oreilles. Après plusieurs minutes, je parviens enfin à ouvrir mes paupières. Je suis dans la cabine servant de poste de soins. Un rapide coup d'œil me rassure sur le fait que je n'ai pas de blessure grave. Et soudain c'est la panique...

Le sang, cette mare de sang que j'ai vue avant de perdre connaissance si elle ne venait pas de moi...

– Carla ?! Où-est Carla ! , je m'écrie.

– Je suis juste là petit pot de fleurs.

Carla va bien. Elle va bien. Si tout ce sang ne venait ni d'elle ni de moi alors... Je ne me souviens toujours pas de son prénom et je culpabilise. Ce jeune médecin chirurgien qui se tenait près de Carla et des canons à eau.

– Comment va-t'il ?

– Stéphane ? Son état a été stabilisé. Il est vivant. Par contre son bras...

La voix de Carla se brise.

– Il va devoir changer de métier en rentrant...

– Oh....

"Oh ?, c'est tout ce que je trouve à dire dans un moment pareil ? Un "oh" pitoyable !

– Les baleines ?

– On en a repéré deux. L'une avait été touchée par un harpon mais visiblement sa blessure était superficielle. Elle devrait s'en sortir sans problème. Les braconniers ont tous détalés. Elles sont tranquilles pour le moment. On a envoyé un autre bateau plus adapté pour la surveillance des cétacés sur leurs traces. Et nous on rentre pour voir ramener ton équipe et toi et pour que Stéph puisse être correctement soigné aussi. Laï souhaite également revenir sur le continent pour commencer à interpeller les politiques grâces aux images qu'on a filmées.

– Ok...

Je passe les jours suivant dans un état second. Je m'occupe et participe au maximum de tâches possibles pour me sentir utile et soulager un peu ma conscience. Je me suis précipitée pour sauver Carla a aucun momen je n'ai pensé à Stéphane. Si j'avais réagi autrement, il aurait encore son bras. Il resterait chirurgien sans devoir se reconvertir. J'ai l'impression d'être responsable de ce qui lui arrive et ce sentiment ne me quitte pas.

Carla le voit bien et tente, sans succès, de me faire entendre raison. Lorsqu'elle comprend que tout ce qu'elle me dit n'y change rien, elle envoie carrément Stéphane me parler. Je fais tout mon possible pour retenir mes larmes mais cela ne fonctionne pas vraiment.

Lui de son côté n'en verse pas une seule. Il m'explique qu'il ne regrette rien et que si cela était à refaire il le referait. Selon lui, ça valait le coup. Il n'a pas "perdu" son bras, mais certains nerfs ayant été touchés, il sait très bien que la chirurgie n'est plus une option. Il m'assure que des options il en a d'autres. Soudain, il me remercie.

– Pour quoi ?, je demande.

– Tu m'as sauvé la vie.

– Absolument pas. Je me suis jetée sur Carla pas sur toi.

– Oui mais je t'ai vue et j'ai compris alors je me suis décalé. A une seconde près, le harpon me perforait la cage thoracique.

– C'est vrai ?

– Oui. Merci d'être intervenue. Grâce à toi je suis en vie. Et à cause d'eux je dois juste changer de boulot. Mais après les semaines passées ici, je ne me voyais pas reprendre un vie normale de toute façon. Je pense que je vais rester avec Sea Shepherd. Ils ont besoin de médecins à bords et ça je peux le faire.

Le bal des papillons (Tome 2)    Après les cendres... le réveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant