Faux semblants

Chapitre 21

Baptiste

Voir la police débarquer à la maison n'était pas ce que j'avais prévu dans mon emploi du temps aujourd'hui mais bon. Ils étaient là, alors je n'allais pas faire ma tête de con.

Surtout que d'après ce que je peux constater en ouvrant la porte, ils sont en mode attaque. Ils ne m'apprécient pas énormément. Ça se remarque directement. Sans spécialement dire bonjour je rentre dans le vif du sujet.

– Que puis-je pour vous messieurs ?

Belle entrée en matière. Le plus jeune lui répond aussitôt.

– Nous avons encore quelques questions de routine. Pourrions-nous entrer ?

– Bien entendu... j'ouvre la porte en grand, je me décale pour les laisser entrer. Installez-vous.

– Merci.

Je les suis, ils s'installent tous les deux sur le canapé par principe je m'assois sur le fauteuil. Le plus jeune mène l'interrogatoire :

– Nous avons interrogé Mademoiselle Dumont aujourd'hui mais nous cherchons des informations complémentaires.

Je ne savais même pas que Méline avait vu la police aujourd'hui. D'un  côté vu le ton de notre dernière conversation, elle n'allait pas se confier à moi. Est-ce que je suis contrarié ? Oui bien entendu mais elle doit sortir de ma vie. Bientôt les flics vont lui dévoiler le monstre que je représente. Je n'en doute pas. Surtout vu le profil de celui qui m'interroge non seulement j'ai remarqué qu'il appréciait mon amie, mais aussi il est attentif à toutes mes réactions. Je suis dans son collimateur, c'est certain.

– Je vous écoute.

– Nous avons appris que vous avez croisé au cinéma il y a quelques temps la fiancée de Monsieur Décan.

Je plisse le front, pour simuler un temps de réflexion.

– Effectivement, ça remonte à pas mal de temps maintenant. Je me souviens que nous étions au cinéma. Lorsque cette furie s'en est pris à Méline. Ça n'a pas duré bien longtemps.

– Pourriez-vous nous préciser la date et l'heure ?

Je montre mon étonnement. Franchement je n'ai aucune idée du jour exact.

– Je ne saurai vous dire. Je me souviens que c'était pas longtemps après notre première entrevue.

– D'accord. L'avez-vous revue depuis ?

– Non, pourquoi ? Je pensais que vous recherchiez son fiancé. Pourquoi m'interroger sur elle ? Je ne comprends pas bien.

Oui les gars dites moi qui vous avez retrouvé. J'ai hâte de l'entendre.

– Pour rien, simple enquête de routine. Tout indice peut être précieux pour notre enquête.

Vas-y prends moi pour un con. Je joue le mec naïf comme à mon habitude.

– J'en conclus que vous n'avez pas retrouver Marcel ?

Le flic plus âgé me fixe droit dans les yeux, il croit m'impressionner, mais non.... mon gars.

– En réalité nous avons retrouvé le cadavre de Monsieur Décan.

– Effrayant.

C'est tout ce que j'arrive à dire, en réalité. Je suis obligé de me contrôler au maximum, pour ne pas afficher à quel point je suis heureux qu'ils aient découvert mon œuvre. Mon âme démoniaque apprécie ce petit jeu. Messieurs il y a encore pas mal de cadavres à déterrer croyez moi. J'ai hâte.

Je me perds dans mes rêveries comme toujours quand je songe à mes victimes. J'ai une profonde tendresse pour le plaisir qu'ils m'ont apporté.

– Bon nous allons vous laisser alors.

Je sursaute en entendant la voix du jeune flic.

– Désolé je n'ai pu vous aider.

Les deux agents me sourient, puis se regardent. Oh ils me soupçonnent, c'est trop mignon. J'avoue adorer cette situation qui m'émoustille, une nouvelle histoire à suivre.

Devrais-je jouer à cache cache avec eux ? Le plus jeune me plaît bien, il semble intelligent et intéressant. Ce pourrait être sympa de tenter un petit jeu entre nous.

– Monsieur Caron, merci de nous avoir reçu.

Je reviens sur terre.

– Avec plaisir Messieurs.

Ils prennent le temps de bien m'observer et ont un doute me concernant. A force de fréquenter des crapules ils finissent par reconnaître les côtés sombres des gens et le mien n'est pas petit. Si le diable existait ce serait moi j'en suis certain.

Ils ont quitté les lieux mais je sais que le plus jeune n'est pas dupe. Il semble moins con que son collègue. Il sera pour moi un adversaire de taille, ce qui peut me plaire, le faire crapahuter après mes assassinat me semble intéressant. Son regard parait vif, ses silences bien plus explicites que ses paroles.

Je remarque qu'il a laissé son collègue mener la danse pour mieux m'observer. Il analyse mon lieu de vie, il me sonde à travers mon environnement. J'adore, je l'avoue. Voir un homme aussi tatillon que moi m'interpelle.

Nous allons nous revoir j'en suis certain. Comme j'ai l'intime conviction qu'il va s'intéresser à mon amie.

Ma petite Méline serait en sécurité avec un gars comme ce type j'en suis certain. Les flics ne sont pas idiots, ils ont compris qu'il y avait un lien avec les deux disparitions. Même s'ils ne m'ont rien dévoilé d'important ils ont retrouvé Marcel. Oh Marcel quel beau souvenir mais pas autant que la demoiselle qui a brûlé vive sous mes yeux. Ces souvenirs m'excitent de nouveau.

Je m'approche de la fenêtre pour observer les alentours, je remarque les deux fonctionnaires discuter ensemble. Tiens, tiens, tiens...

Je ne les ai pas laissés indifférents et cela me réjouit beaucoup trop. Le prédateur que je suis va être traqué, mon cœur s'anime, j'ai hâte de me confronter à ces deux hommes. Quoi que le plus âgé me donne des idées de meurtre, c'est une tête de mule sans imagination ni instinct. Je suis certain qu'il s'est souvent trompé dans ses enquêtes. Un con !

Par contre l'autre a du potentiel. Un nouveau jeu va se mettre en place. Pour le moment les pauvres ne savent rien. Ils enquêtent sur deux personnes disparues. Les petits naïfs, quand ils découvriront l'ampleur de mon œuvre, il sera déjà trop tard, je serai déjà parti loin, très loin. Tic, tac, tic, tac... Il va être temps pour moi de disparaître de cette vie.

Désolé ma petite Méline mais tu devras vivre sans moi.