Know Your Worth [En ré-écriture]

Chapitre 26

- Charlotte - 

L'arrivée du message de Lucas fit fleurir un doux sourire sur le visage de Charlotte qui s'empressa de lui répondre. Les textos ne lui furent pas suffisant, car il l'appela.

— Salut chéri, chuchota Charlotte en décrochant immédiatement.
— Salut ma puce. Pourquoi tu murmures ?
— Hugo s'est endormi sur mes genoux en regardant le Roi Lion.

En réalité, Charlotte ne pouvait pas porter Hugo pour l'instant à cause des douleurs lancinantes dans son abdomen.

— Pauvre loulou, pouffa-t-il. Il a eu une longue journée. Et tu fais office d'oreiller, j'imagine ? En fait, je suis un peu jaloux, j'aimerais bien être à sa place...
— Petit malin, n'essaye pas de me tenter. Tu m'appelais pour un motif en particulier ?
— Non, juste pour terminer cette soirée avec le son de ta voix, flirta-t-il.

Le cœur de Charlotte chavira. Cet homme...

Ils discutèrent quelques instants. Lucas lui confia avoir accepté d'aider Kristen à transférer la tombe d'Ethan et Charlotte lui proposa immédiatement de l'accompagner dans cette épreuve. Le soulagement dans la voix de Lucas lui confirma qu'il avait besoin d'elle. Il n'avait pas osé formuler expressément son envie. Après l'avoir invité à venir prendre le petit déjeuner, elle raccrocha avant de glisser ses doigts dans les douces mèches de son petit garçon, calant sa respiration sur la sienne.

L'attitude de Lucas l'aida à comprendre. Accepter le soutien de quelqu'un n'était pas une marque de faiblesse, surtout si cela lui permettrait d'être plus fort à deux. Elle avait tourné le dos trop longtemps à tous et sa récente réconciliation avec sa mère lui avait ouvert les yeux sur son comportement entêté qui ne lui avait rien apporté.

Toutefois, Lucas n'avait pas formulé clairement sa requête et avait attendu que Charlotte le lui propose. Avait-il douté de sa réponse ? Non, tu lui as montré par ta propre attitude qu'il ne fallait rien demander. Charlotte souhaitait plus que tout être présente pour lui, tout comme Lucas aimerait être là pour elle. Car c'était ce que faisaient les couples. Ils étaient plus forts à deux.

*****

Le lendemain matin, Charlotte se réveilla avec un sentiment de calme qu'elle n'avait pas ressenti depuis longtemps. La journée à Muir Woods avait été un baume pour son âme, et elle se sentait prête à affronter ses peurs. Elle inspira profondément et décida d'appeler Diane pour s'excuser et tenter de réparer leur amitié.Lorsque Lucas arriva, Charlotte était en train de préparer le petit-déjeuner. Il lui sourit après un tendre et chaste baiser, et son cœur se réchauffa. Ils s'assirent ensemble après avoir installé les enfants devant un dessin animé. Lucas reposa sa tasse et lui prit la main, une lueur tourmentée dans le regard.

— Charlotte, je veux que tu saches que je suis désolé pour tout ce que je t'ai caché, commença-t-il. J'ai fait une erreur en ne te parlant pas de Kristen et d'Ethan. J'avais peur de te perdre, mais je réalise maintenant que la seule façon de construire quelque chose de solide est d'être honnête. Je ne t'ai jamais comparé à Kristen. Oui, au début tu m'as intrigué et genre au bout de 30 secondes, j'ai compris que c'était toi qui m'intéressais, ton charme, ton espièglerie, cette petite fossette coquine.
Charlotte hocha la tête, les yeux brillants.
— Je sais, chéri. J'ai aussi mes propres peurs et mes propres secrets. J'ai décidé de ne plus les laisser me contrôler. J'ai besoin de ton soutien, surtout maintenant.
Lucas embrassa la paume de la main de Charlotte.
— Je suis là pour toi, Charlotte. Quoi qu'il arrive, nous affronterons tout ensemble.

Les enfants interrompirent ce moment intense pour réclamer de jouer au foot avec Lucas. Elle profita d'un temps calme alors que le trio s'amusait dehors pour les observer à travers la vitre. Ils s'entendaient bien et les enfants acceptaient plus facilement Lucas que ce à quoi à elle s'attendait. Tom et Charlotte n'avaient pas réussi leur mariage aussi ils avaient pris sur eux de faire en sorte que leur séparation se passe le mieux possible.

Charlotte pesta quand son téléphone vibra de nouveau et l'appréhension la saisit quand elle reconnut le numéro de son oncologue. Elle nota machinalement le rendez-vous que la secrétaire lui fixa pour le lendemain matin, avant l'ouverture du cabinet. Celle-ci ne put rien lui dire de plus, secret médical oblige, d'une voix monocorde, pliée à cette pratique. Bizarrement Charlotte songea au nombre d'appels de ce genre qu'elle devait passer par jour. La maladie faisait partie de son quotidien. Les résultats de la biopsie étaient arrivés. Et qu'ils ne devaient pas être bons pour qu'il la convoque à la dernière minute dans un délai aussi court.

Saisie d'un léger vertige, Charlotte posa les mains sur le plan de travail pour se retenir, le cœur battant à toute allure. La maladie était revenue. En elle. Tapi dans l'ombre. Attendant son moment pour ressurgir. Un instant de faiblesse, comme en manque d'attention ces derniers temps car Charlotte était trop occupée à être heureuse. Avec ses enfants. Avec son métier. Avec ses amies. Avec Lucas. Mais maintenant, elle allait lui accorder toute son attention. Il n'allait pas le regretter. Elle l'avait déjà battu une fois, enfoiré, elle l'aurait encore. Putain de crabe.

Quand les enfants et Lucas revinrent de leur partie, Charlotte plaqua un sourire sur ses lèvres. Voir leurs joues rosies par le jeu et l'air frais lui donna un nouvel élan.Charlotte essaya de vivre sa journée comme elle l'aurait fait si tout allait bien : s'occuper de ses enfants, leur faire prendre la douche, préparer le dîner, brossage de dents, lecture du soir. Elle redoubla d'efforts en présence de Lucas, qu'elle avait surpris à plusieurs reprises à la dévisager. Il n'était pas dupe de son petit manège.
Sauf que ce soir, Charlotte était tendue et les enfants se chamaillaient et rechignaient à faire ce que leur mère leur demandait. Lucas prit le relais quand elle se mit à crier pour du dentifrice dans l'évier. Elle arriva malgré tout à les rassembler dans son lit et à les calmer en mettant de la musique acoustique. Les bisous et les câlins se firent plus longs que d'habitude, comme s'ils avaient senti son besoin de faire le plein de douceur et de force de leur part. Dans ce qu'elle considéra un moment de faiblesse, elle demanda à Lucas de rester pour la nuit. Bien entendu, le sommeil ne vint pas. À la faveur de l'obscurité, toutes les idées qu'elle avait repoussées l'assaillirent avec surtout les hypothèses et questions toutes aussi toxiques les unes que les autres.

Aurait-elle la force de me battre encore une fois ? Comment l'annoncer à Lucas qui a déjà tant à gérer ? Quel est le pronostic ? Comment payer les frais médicaux supplémentaires ? Est-ce que Tom allait en profiter pour demander la garde des enfants ?

Sa dernière pensée la tétanisa et elle se blottit contre Lucas, qui s'empressa de l'enlacer, prêt à la soutenir même à travers son sommeil.

Une douleur lancinante dans ses entrailles la réveilla en sursaut. Elle se leva précipitamment et se dirigea vers la salle de bain pour vomir dans les toilettes. Les spasmes se calmèrent au bout de quelques minutes, laissant Charlotte palettant et terrorisée. Elle se sentit soudainement très seule. Lucas accourut et la trouva assise sur le sol froid et dans le noir, les yeux humides.

Sans un mot, il s'assit à côté d'elle et lui prit doucement la main.
— Je suis là, ma puce, murmura-t-il. Tu n'as pas à affronter ça seule.
Charlotte hocha la tête, les larmes coulant librement.
— J'ai tellement peur, hoqueta-t-elle. J'ai rendez-vous demain matin pour les résultats. Je sens au fond de moi que c'est pas bon. Je sais pas si j'y arriverai cette fois.
Lucas serra sa main un peu plus fort et repoussa une boucle derrière son oreille.
— Tu es la personne la plus forte que je connaisse. Accepter de l'aide ou du soutien ne te rend pas faible. Tu n'as pas à traverser ça seule. Je voudrais être là pour toi, mais je ne veux pas m'imposer. Tu veux que je vienne demain ? demanda-t-il après une courte pause.

Charlotte acquiesça de nouveau de se laissa bercer dans l'étreinte réconfortante de l'homme sur qui elle allait s'appuyer pour affronter les moments à venir.