Chapitre 17 - Jenifer

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Ce samedi matin, je me réveille une fois de plus avec cette boule dans l'estomac. Trois semaines. Cela fait trois semaines qu'Arnaud a décidé que nous devions faire une pause. Trois semaines de doutes, de silences pesants, et de cette tension qui flotte dans l'air à chaque fois qu'il passe à la maison. Il avait pourtant commencé à faire des efforts. On parlait davantage, on essayait de se reconnecter, et il avait même montré plus de patience avec les enfants. Mais tout cela s'est effondré d'un coup. Et maintenant, je sens que l'issue est inévitable.

Aujourd'hui, il doit passer pour parler aux enfants. Je sais que ce qu'il va dire ne présage rien de bon. J'essaie de me convaincre que ce n'est qu'une mauvaise phase, qu'il reviendra, qu'on trouvera un moyen. Mais une voix au fond de moi me dit que je m'accroche à un fil qui est déjà rompu.

Lucca est au football. Je dois le récupérer d'ici une heure environ. Nina, elle, elle est dans sa chambre, elle est rentrée de Paris il y a deux jours. Elle finit ses devoirs pour la rentrée. Gianni est dans le salon, assis par terre, jouant distraitement avec ses petites voitures qui lui restent fidèles. Il est plus calme que d'habitude, enfermé dans son monde silencieux, comme souvent. Je m'assieds près de lui, glissant une main dans ses cheveux. Je ne sais pas s'il se rend compte de la tension autour de nous, mais il semble plus distant que d'habitude.

Je lui parle doucement.

- Ça va, mon chéri ? Tu veux que je joue avec toi ?

Il ne répond pas, ne me regarde même pas. Ses petites voitures défilent silencieusement sur le tapis. J'essaie de ne pas prendre ça trop personnellement, mais mon cœur se serre. Je veux tellement qu'il soit heureux, qu'il se sente bien, mais tout semble toujours hors de ma portée avec lui.

C'est à ce moment-là qu'Arnaud arrive. Sans frapper. L'air grave. Mon estomac se tord immédiatement. Je sais déjà que cette conversation ne va rien apporter de bon. Gianni ne lève même pas les yeux, concentré sur ses voitures.

- Salut, dis-je d'une voix que j'essaie de rendre neutre.

- Salut, répond-il froidement.

Il me regarde à peine avant de déclarer :

- Il faut qu'on parle.

Je sens mon cœur s'emballer. Je m'attends au pire, comme à chaque fois qu'il prononce ces mots. Je respire profondément pour ne pas montrer ma nervosité, mais j'ai déjà l'impression que tout s'effondre autour de moi.

Arnaud s'assied sur le canapé, le visage fermé. Gianni continue de jouer, impassible. J'attends, chaque seconde de silence étant un supplice. Finalement, Arnaud prend une grande inspiration.

- Je suis en train de chercher un appartement, lâche-t-il.

Mon souffle se coupe, mon cœur rate un battement. Un appartement ? C'est plus qu'une pause, c'est la fin. Je me mords l'intérieur de la joue pour ne pas éclater. Je n'arrive pas à y croire. On devait trouver une solution, mais il a déjà décidé.

- Un appartement ? Je peine à articuler.

- Oui, dit-il, toujours aussi froid. Pour la garde partagée de Gianni on verra en fonction de ses retours du centre... concernant Nina, je ne veux pas te couper de lien avec elle. Dès qu'elle souhaite venir te voir et que tu es d'accord, elle viendra. Et pour Lucca... Il pourra venir chez moi quand il le voudra...

À cet instant, Nina descend l'escalier. Elle a entendu la conversation. Ses yeux sont déjà brillants, emplis de confusion et de tristesse.

- Papa... tu veux vraiment partir ? demande-t-elle d'une voix faible, tremblante.

Arnaud se passe une main sur le visage avant de répondre.

- Oui, Nina. Mais je ne pars pas loin. Ça ne change rien pour toi. Tu pourras venir chez Jen quand tu voudras.

Nina secoue la tête avec force, sa voix montant d'un cran.

- Bien sûr que ça change ! Tu abandonnes tout le monde ici ! Tu abandonnes Jen, les garçons... et moi ! Pourquoi tu fais ça ?

Arnaud soupire, clairement épuisé par cette confrontation.

- Nina, ce n'est pas aussi simple...

Elle croise les bras, le regard noir.

- Pourquoi tu fais semblant que tout allait bien, alors ? Tu disais que ça irait mieux et maintenant tu veux partir ? C'est lâche !

Je sens mes larmes monter, mais je me retiens. Voir Nina aussi bouleversée me déchire. Et Arnaud, lui, reste figé, sans réaction.

Gianni, lui, a soudain arrêté de jouer. Il lève enfin les yeux, curieux, puis se remet à manipuler ses voitures en silence. Je pose ma main sur son épaule.

- Nini, papa va déménager... tu vas avoir deux maison... dis-je d'une voix douce.

Gianni reste silencieux, ses petites mains tremblant légèrement autour de sa voiture. Arnaud s'approche de lui et s'accroupit à sa hauteur.

- Gianni, je vais bientôt avoir une autre maison. Tu viendras me voir, et on fera plein d'activités ensemble, d'accord ?

Gianni le fixe quelques secondes, ses yeux scrutant le visage de son père. Il ne parle toujours pas, mais je vois la tension dans ses épaules. Il hoche faiblement la tête, un geste à peine perceptible, mais c'est tout ce qu'Arnaud obtient.

- Ça va aller mon grand, continue Arnaud, tendant la main pour toucher son bras, mais Gianni recule légèrement, sans un mot. Arnaud soupire et se redresse.

L'ambiance est lourde. Je sens que tout va s'effondrer.

Arnaud se tourne vers moi, visiblement épuisé.

- Jen, je suis désolé que ça se passe comme ça, murmure-t-il.

Il s'approche, tendant la main vers moi. Ses doigts frôlent les miens, et avant que je puisse réagir, il m'embrasse doucement sur la joue.

- Je te souhaite vraiment le meilleur, murmure-t-il.

Je ferme les yeux, sentant mes larmes prêtes à déborder. Pourquoi fait-il ça maintenant ? Pourquoi reste-t-il tendre alors qu'il me détruit ?

Il se recule ensuite, jette un dernier regard à Nina et à Gianni, puis se dirige vers la porte.

- Je vous tiendrai au courant pour l'appartement. Nina tu resteras ici le temps que je trouve. Puis je passerai voir Lucca... pour lui dire...

Nina, les yeux rouges, le suit du regard. Elle ne bouge pas, figée dans l'incompréhension. Gianni reste immobile à côté de moi, ses voitures oubliées. Je caresse doucement ses cheveux, mais il ne réagit pas.

- Tout ira bien mon chaton..., chuchotai-je, mais je n'y crois pas moi-même.

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Voici le dix-septième chapitre ! Vous aurez le prochain demain.

N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez dans les commentaires ! À demain !

:)

L'écho du silenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant