Chapitre 15 - Nina

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Je fais les cent pas dans ma chambre, mes mains tremblant de rage. Chaque fois que je ferme les yeux, je revois la scène : papa, sa main qui s'abat sur Gianni, et ce cri déchirant. Depuis cet instant, quelque chose s'est brisé en moi. Je n'arrive plus à regarder mon père de la même manière.

Mon téléphone vibre sur le lit. Maman m'envoie un message pour me rappeler mon vol de ce soir. Je dois partir à Paris, chez elle, pour les vacances. Une part de moi est soulagée de pouvoir m'éloigner de cette maison, mais une autre est déchirée. Je vais laisser Gianni, Lucca... et Jen. Jen, elle, a toujours été là pour moi. Même si elle n'est pas ma mère, elle m'a toujours traitée comme si j'étais sa propre fille.

Je regarde ma valise ouverte. Je devrais finir de la préparer, mais je n'arrive pas à me concentrer. J'ai ce besoin brûlant de dire ce que j'ai sur le cœur avant de partir. Je ne peux pas partir sans faire face à papa. Pas après ce qu'il a fait. Gianni est mon petit frère, et même s'il n'est pas facile à comprendre, ça ne justifie pas ce qui s'est passé sur ce fichu bateau.

Je prends une grande inspiration, puis je sors de ma chambre. Je croise Jen dans le couloir. Elle porte son sourire fatigué, celui qu'elle essaie toujours d'afficher quand elle veut cacher son inquiétude.

- Ça va, ma chérie ? demande-t-elle doucement en posant une main sur mon bras.

Je sens ma gorge se serrer. Jen a toujours su comment apaiser mes émotions, mais cette fois, ça ne suffira pas.

- Jen, je... je dois parler à papa. Je ne peux pas partir comme ça.

Elle me regarde avec douceur, mais je vois bien qu'elle est inquiète.

- Je comprends, Nina. Fais attention, d'accord ? Elle me serre brièvement contre elle, et je m'accroche à ce câlin comme si c'était la dernière fois. Puis elle s'écarte, me laissant aller à ma confrontation.

Papa est dans le salon, affalé sur le canapé, comme s'il essayait de s'évader dans son téléphone, loin de la réalité. Je prends une grande inspiration et m'avance. Il ne lève même pas la tête quand j'entre. Je sens une colère sourde monter en moi.

- Papa, on doit parler.

Il me regarde enfin, l'air surpris. Évidemment, il ne s'attendait pas à ce que je dise quoi que ce soit. Il a sûrement cru que je partirais pour Paris sans un mot, comme si rien ne s'était passé.

- Nina, c'est pas le moment, je suis...

Je l'interromps, incapable de contenir ma colère plus longtemps.

- Pas le moment ?! Il y a eu un moment pour frapper Gianni, alors c'est le moment d'en parler !

Sa mâchoire se serre, et je vois ses poings se contracter. Mais je ne vais pas le laisser m'intimider. Je suis furieuse, et j'ai besoin de comprendre pourquoi il a fait ça.

- Tu l'as frappé, papa. Gianni a quatre ans, il ne comprend même pas ce qu'il a fait de mal. Et toi, tu l'as frappé comme s'il était coupable de tout ce qui va mal. Ma voix tremble, mais je continue, incapable de retenir ce que je ressens.

Il se redresse sur le canapé, essayant de retrouver un semblant de contrôle.

- Je m'en veux, Nina. Tu penses que ça me plaît de le voir souffrir ? C'est un gamin difficile, je fais ce que je peux...

- Ce que tu peux ?! Ma voix monte, remplie de reproches. Non, tu ne fais rien pour essayer de le comprendre. Tu t'énerves juste parce qu'il n'est pas comme les autres ! Mais c'est ton fils, papa !

Ses yeux se durcissent, mais je le vois lutter avec ses émotions.

- Je suis à bout, Nina. Tu crois que c'est facile ?! Il ne parle pas, il ne me regarde même pas. Je fais tout ce que je peux, mais parfois... parfois, je perds patience.

Je secoue la tête, sentant des larmes me monter aux yeux. Comment peut-il penser que c'est une excuse ? Je serre les poings, sentant ma propre colère monter en flèche.

- Perdre patience ? Gianni a besoin de toi, pas que tu lui fasses peur ! Je crie presque. C'est ton rôle d'être là pour lui, pas de l'écraser quand tu ne comprends pas !

Papa se lève, ses yeux plongés dans les miens, mais je ne recule pas. Il n'a pas le droit de me parler de "perdre patience" après ce qu'il a fait.

- Tu ne comprends pas, Nina...

- C'est toi qui ne comprends pas ! je coupe avec un sanglot étouffé. Tu n'essayes même pas de te rapprocher de lui ! Je vais à Paris, et j'ai même pas envie de revenir ici. Je ne peux pas rester dans une maison où tu ne fais que nous éloigner.

Mes mots le frappent, je le vois bien, mais je m'en fiche. Je ne supporte plus cette situation. C'est trop pour moi.

Il ne dit rien. Il reste là, à me regarder, comme s'il ne savait pas quoi répondre. Il baisse la tête, les épaules affaissées, et c'est là que je vois à quel point il est perdu.

Jen arrive dans le salon, probablement que l'heure du départ a sonné pour moi. Elle s'approche de moi, son regard entre nous deux, cherchant à comprendre la situation.

- On y va ma grande ? murmure-t-elle.

Je secoue la tête et me dirige vers la porte.

- Oui, dis-je d'une voix fatiguée. Est-ce que tu pourras dire à Gianni que je l'aime, et à Lucca aussi.

Elle acquiesce, on s'apprête à sortir quand papa murmure quelque chose. Je m'arrête, mais ne me retourne pas.

- Je suis désolé, Nina.

- Moi aussi, je réponds, les larmes roulant enfin sur mes joues.

Jen pose doucement sa main sur mon épaule, un geste qui me rassure un peu.

Elle me serre contre elle une dernière fois avant qu'on parte. C'est elle qui me donne la force de traverser tout ça. Puis je m'éloigne vers la voiture de ma belle-mère, tirant ma valise derrière moi, laissant derrière moi une maison pleine de silences et de regrets.

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Voici le quinzième chapitre ! Vous aurez le prochain demain.

N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez dans les commentaires ! À demain !

:)

L'écho du silenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant