Chapitre 30

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HARRY

Je fais les cent pas dans le salon, incapable de calmer mes nerfs. L'idée de revoir ma mère me glace. J'ai peur de ne pas réussir à jouer la comédie, de tout gâcher. Pourtant, pour les filles, je dois y arriver.

Les policiers sont en place, certains dans la cuisine, prêts à intervenir en cas de problème, et d'autres sont dehors, en tenue civile, surveillant discrètement les alentours.

« Harry, arrête de tourner, tu me donnes le vertige, » dit Niall, essayant de me tirer de ma spirale.

« Mais si je me rate, si je fais tout échouer... Je suis nul pour mentir, » dis-je, la voix tremblante.

Liam me pose une main rassurante sur l'épaule. « Tu y arriveras, Harry, pour Aria et Eleanor. Et même si tu hésites ou bégayes, ça n'aura rien d'anormal : tu pourras toujours dire que c'est l'émotion, que tu n'arrives pas à te remettre de la disparition d'Aria et que revoir maman fait remonter de trop d'émotions. Et puis, on est là. Si besoin, on t'aidera. »

Leurs mots me calment un peu, mais la peur est toujours là. Pour elles, je dois être à la hauteur.

Je prends une profonde inspiration, essayant de calmer le battement frénétique de mon cœur. Autour de moi, les garçons échangent un dernier regard, chacun comprenant que le moment approche. Tout est en place. Les policiers ont vérifié chaque sortie, chaque point stratégique. Pourtant, malgré tout ce soutien et cette préparation, je me sens vulnérable, comme si j'allais exposer une partie de moi que j'avais mis des années à enfouir.

Je m'assois finalement, luttant pour contenir mes pensées. Mes mains tremblent un peu, et je ferme les yeux, visualisant le visage de ma mère. Elle va être là, devant moi, et chaque fibre de mon être me crie de fuir, de ne pas affronter ce regard qui a toujours su me manipuler. Elle sait appuyer là où ça fait mal, elle sait tourner les mots pour que la culpabilité retombe toujours sur les autres.

« Harry... on est juste là, » murmure Niall à côté de moi, sa main posée sur mon épaule. Je hoche la tête sans ouvrir les yeux.

Puis, le silence s'épaissit. On entend un léger bruit à l'extérieur. Elle est là. Mon cœur se serre d'un coup, et la tension monte, comme une vague de froid qui envahit tout mon corps. La porte d'entrée s'ouvre doucement, chaque son amplifié dans mon esprit. Je fixe le sol, luttant pour respirer.

Je m'assois, essayant de garder un calme apparent malgré le tumulte intérieur. Ma mère entre dans la pièce, arborant ce sourire froid qui m'a hanté toute mon enfance. Derrière moi, Niall et Liam sont en retrait, cachés dans la cuisine où les policiers sont aussi postés, prêts à intervenir. Il est crucial que je ne laisse rien transparaître, que je lui donne l'illusion que je suis vulnérable, brisé par la perte d'Aria.

Elle s'installe en face de moi, posant ses mains bien à plat sur la table, adoptant une attitude faussement bienveillante. « Harry, mon pauvre garçon, tu as l'air tellement perdu... Je sais à quel point tu tenais à ta sœur. » Sa voix est douce, presque tendre. Un frisson me parcourt, et je lutte pour maintenir une expression neutre, pour éviter de laisser la moindre lueur de méfiance traverser mon regard.

Je baisse les yeux, jouant le rôle qu'elle attend, celui du fils brisé, en quête d'un réconfort familial. « Oui, c'est... c'est difficile », dis-je d'une voix volontairement faible, hésitante, comme si chaque mot m'arrachait une part de mon âme.

Elle incline la tête, scrutant mon visage, et je ressens son regard perçant, analysant chacun de mes gestes. Je la laisse faire, sachant que le moindre faux pas pourrait éveiller ses soupçons. Elle semble satisfaite, et continue, d'une voix pleine d'assurance : « Tu sais, Harry, j'ai toujours voulu le meilleur pour toi. Peut-être que, maintenant, nous pourrions repartir de zéro... » Elle laisse sa phrase en suspens, espérant que je saisis la perche tendue.

Je hoche lentement la tête, jouant le jeu. « Peut-être... » dis-je doucement. Derrière moi, je sens les garçons tendus, prêts à intervenir si nécessaire, mais je dois garder le contrôle. Je ne dois rien précipiter.

« Je suis tellement heureuse de te revoir », ajoute-t-elle, avec un sourire qui me glace le sang. « Peut-être que cette fois, tu comprendras à quel point je t'aime. » Ses mots sont dégoulinants de fausse sincérité, et j'essaie de ne pas laisser mon dégoût transparaître.

Je prends une inspiration, comme si j'essayais de trouver les mots, et j'articule : « Oui, peut-être qu'il est temps... de tourner la page, de laisser derrière nous tout ce qui a mal tourné. » Je baisse à nouveau le regard, jouant le rôle du fils hésitant, en quête de pardon. « On pourrait... peut-être se voir plus souvent, commencer par là ? »

Elle se redresse, visiblement satisfaite, comme si elle avait enfin obtenu ce qu'elle voulait. Elle tend la main, posant doucement sa paume glacée sur la mienne, et un frisson de malaise me parcourt. Mais je ne recule pas, je lui laisse croire que je suis tombé dans le piège de ses mensonges.

À cet instant, l'un des policiers dans la cuisine fait un geste discret, c'est le signal. Ils ont assez entendu, et tout est en place. Ma mère, concentrée sur moi, ne remarque rien. Alors qu'elle ouvre la bouche pour répondre, elle s'interrompt en voyant deux policiers en uniforme entrer dans la pièce, suivis par un autre en tenue civile.

Elle se fige, son visage passant de la surprise à la méfiance. « Qu'est-ce que... ? » murmure-t-elle, se tournant vers moi, l'incompréhension puis la panique commençant à poindre dans ses yeux.

Les policiers s'avancent, et l'un d'eux prend la parole : « Madame, vous êtes en état d'arrestation pour vos actions criminelles en lien avec l'enlèvement d'Aria et d'Eleanor, et pour complicité dans les sévices infligés. »

Elle me regarde, ses yeux se remplissant de rage et de trahison, et je garde mon calme, refusant de détourner le regard. Pour la première fois, je la vois pour ce qu'elle est réellement. Sa colère se transforme en une expression de pure haine, et elle crache : « Traître ! »

Je reste impassible, les bras croisés, muré dans le silence. Les policiers lui passent les menottes, et elle est emmenée hors de la pièce. Niall s'approche de moi et pose une main réconfortante sur mon épaule. « C'est fini, Harry. Tu as été incroyablement fort. »

Je ferme les yeux, laissant enfin la tension quitter mon corps. Pour la première fois depuis longtemps, je sens un poids se lever de mes épaules. Aria, Eleanor, et moi, nous pouvons enfin tourner la page et essayer de retrouver une paix que nous pensions perdue.

Alors qu'elle est entraînée hors de la pièce par les policiers, elle se retourne, les yeux fous de colère.

"Tu n'es qu'un traître, Harry. On aurait pu être heureux, toi et moi !" crie-t-elle, la voix tremblante de rage.

"On n'aurait jamais pu l'être," je réplique, la voix glaciale, chaque mot empli de certitude.

Elle me fixe avec un sourire venimeux. "Tu sais que tu n'as plus de famille, n'est-ce pas ? Tu viens d'envoyer la seule personne qui te restait en prison."

Je ris froidement, croisant les bras, et rétorque : "Tu n'as jamais été ma famille. Et crois-moi, je n'ai rien perdu aujourd'hui."

Elle se fige, cherchant à saisir mes mots, avant de blêmir soudain. "Comment ça ? Attends... elle est vivante ?" hurle-t-elle, réalisant la vérité.

À cet instant, un mouvement attire mon regard vers le haut de l'escalier. Les garçons sont là, silencieux, et derrière eux, je vois Aria et Eleanor. Ils étaient censés les tenir à l'écart, mais la scène a visiblement attiré tout le monde. Le silence est lourd, mais je perçois dans leurs yeux à tous cette même force. Pour la première fois, je sens que ma vraie famille est là, unie à mes côtés.

Renaissance Tome 2 « terminer »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant