« La voix humaine ne pourra jamais couvrir la même distance que celle de la petite voix silencieuse de la conscience. » - Mahatma Gandhi
*****
- Deux bières s'il te plait, ma jolie.
- Bien.
J'ai souris aux deux hommes d'environ vingt-cinq ans qui venaient de s'installer au bar et je me suis retournée pour remplir deux verres que j'ai déposé devant chacun d'eux.
- Je te remercie. C'est quoi ton nom ? s'enquit celui de droite avec un sourire appuyé.
Ce genre d'hommes m'insupportait. Pourtant, il fallait que je m'y attende : travailler dans un bar attirait forcément ce genre de personnes et je devais m'efforcer de continuer à sourire.
- Laisse-la donc faire son travail, intervint le second.
La seule raison pour laquelle il avait parlé était parce qu'il semblait impatient de continuer de raconter son histoire, et non pour une quelconque défense envers moi. Mais c'était tant mieux, je n'avais pas envie de me lancer dans une discussion avec quelqu'un comme lui.
Pendant que je servais un autre homme au bar, celui qui m'avait demandé mon nom continuait de me regarder alors que son ami avait l'air passionné par ses propres paroles.
Jimmy, mon collègue qui travaillait aux tables et aussi fils du patron des lieux, est venu me raconter que les quatre femmes d'une quarantaine d'années assises à l'autre bout de la salle lui avait proposé de passer la fin de la soirée avec elles.
- Et bien vas-y, profites-en, rigolai-je.
- Non merci, et en plus, j'ai du travail, c'est dommage, répliqua-t-il ironiquement. Et toi aussi ! A tout à l'heure.
Il désigna d'un mouvement de la tête un nouvel arrivant qui s'installait sur un tabouret et s'éclipsa pour aller prendre une commande je ne savais où.
En m'approchant du jeune homme qui portait des lunettes de soleil - malgré le fait qu'il fasse nuit dehors et que la lumière des néons n'était pas si agressive - je l'ai tout de suite reconnu. C'était celui que j'avais aidé l'autre jour, pour retrouver sa canne.
- Bonsoir, vous avez choisi ? lui demandai-je en souriant.
- Un whisky s'il vous plait.
Je lui servis bien que je trouvais cela étrange. Comment il allait faire pour rentrer s'il buvait de trop ? Il avait surement quelqu'un pour venir le chercher, ou un taxi, je l'espérais.
- Merci.
- Si vous avez besoin, appelez-moi.
Il hocha la tête et but une gorgée de sa boisson. Je m'éloignai pour retourner vers les deux hommes de tout à l'heure, dont l'un d'eux avait visiblement déserté. Et bien sûr, c'était celui qui semblait avoir un certain intérêt pour moi qui était resté.
- Tu nous ressers s'il te plait ? me demanda-t-il en montrant les deux verres vides.
Je fis ce qu'il me demanda et revint avec les verres.
- Alors tu t'appelles Emmy ?
- C'est exact.
Il avait dû entendre Jimmy m'appeler par mon prénom tout à l'heure, et l'entendre de sa bouche m'irritait tout particulièrement. Je gardais le sourire mais j'avais hâte d'avoir quelqu'un d'autre à servir.
- Tu finis à quelle heure ce soir ?
- Tard, répondis-je vaguement sans me départir de mon sourire.
VOUS LISEZ
Avant de te voir
Romance« Les choses profondes sont toujours préparées et enveloppées par une certaine obscurité : les étoiles n'apparaissent que dans la nuit. » - Gustave Thibon, L'échelle de Jacob. *** « Je voulais la voir. De plus en plus. Plus les jours passaient, plus...